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Le "mur budgétaire" : la bombe à retardement américaine

Le compte à rebours est enclenché aux Etats-Unis. Faute d'accord entre l'administration Obama et les républicains, l'économie américaine entera en récession le 2 janvier prochain. Une échéance baptisée "fiscal cliff" ou "mur budgétaire". Si la bombe à retardement explose, l'effet de souffle se fera sentir dans la plupart des pays occidentaux. Explications.
Article rédigé par Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Chamber of commerce)

"Fiscal cliff" : le
hasard fait très mal les choses

L'expression désigne le choc économique qui menace les Etats-Unis
si deux mesures entrent en vigueur : les coupes budgétaires automatiques au
sein de l'administration Obama et la fin des avantages fiscaux de la présidence
Bush (voir infographie) . Une situation liée au blocage politique à Washington entre l'administration
démocrate et un Congrès dominé par les républicains.

Coupes budgétaires automatiques : Les Etats-Unis ont une règle d'endettement maximum : la
dette fédérale ne doit pas dépasser 16.394 milliards de dollars. "Ce qui
fait qu'à partir du moment où la dette a atteint ce plafond, l'Etat américain
est en cessation de paiement. Or, on ne peut pas imaginer que les Etats-Unis ne
remboursent pas leur dette
", explique à franceinfo.fr Benjamin Carton,
économiste spécialiste des Etats-Unis au Cepii, le centre d'études prospectives
et d'informations internationales.

Sauf qu'à l'été 2011, le pays est passé tout près d'un défaut de paiement. Le Congrès républicain a donc voté une loi pour réduire le déficit de 1.200 milliards de dollars sur dix ans. Dans
ce texte, une disposition prévoit des coupes automatiques si les parlementaires démocrates et républicains ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le détail de ce plan de
réduction. C'est ce qui s'est passé. Voilà pourquoi le budget
fédéral va subir une cure d'amaigrissement de 10% début 2013.

Hausse des taxes pour les ménages :

La situation actuelle vient aussi d'un héritage de... George W
Bush. L'ancien président avait fait passer au début des années 2000 une série
d'allégement fiscaux et d'exonérations provisoires pour soutenir le budget des
classes moyennes américaines. Ces mesures devaient s'arrêter en 2010. Mais
Obama a dû les prolonger de deux ans en échange de l'appui des républicains sur
sa proposition d'étendre les allocations chômage. Cette fois l'échéance est
arrivée, les mesures de Bush Jr arrivent à échéance le 31 décembre.

Encore besoin d'explication ? Pour les anglophones, Paddy
Hirsch de APM Marketplace fait une analogie pédagogique, et plutôt claire, avec
le film Thelma et Louise .

Quelles seraient les
conséquences du "fiscal cliff" ?

Du côté des contribuables américains Des milliers d'entre eux vont subir une hausse sensible des
impôts pour des milliers d'Américains. Pour se faire une idée des conséquences
concrètes pour ces derniers, le site Slate propose une infographie ludique et très
parlante
.

Du côté de l'économie américaine

Le Council of Economic Advisers, qui regroupe les
conseillers économiques d'Obama, estime que les ménages américains consommeront
pour 200 milliards de dollars de moins par rapport aux prévisions.

Or, le premier moteur de l'économie
américaine est la consommation. D'après le Congressional Budget Office,
l'organisme parlementaire de contrôle des finances publiques, le "fiscal
cliff" couterait 668 milliards de dollars ou 4% du PIB américain. En
clair, les Etats-Unis entreraient brutalement en récession.

Du côté de l'économie mondiale

Alors que ces derniers mois, l'inquiétude portait surtout
sur la crise de la dette de la zone euro, les regards se tournent désormais de
plus en plus vers Washington. C'est notamment le cas de la directrice du FMI
Christine Lagarde, sur la BBC  :

"Si, du fait du mur budgétaire, les Etats-Unis ont deux
points de pourcentage de croissance en moins, ce sera un point de pourcentage
de croissance en moins pour le Mexique et le Canada, vraisemblablement un peu
moins pour l'Europe et le Japon
"

Qu'est-ce qui bloque ?

Les négociations s'intensifient entre l'administration
démocrate et la majorité républicaine du Congrès pour trouver un accord. L'idée
serait de parvenir à réduire de 4.000 milliards les déficits publics sur les dix
prochaines années. "Mon espoir, en fait, est que cela soit fait avant
Noël
", explique Barack Obama. De fait, la session parlementaire américaine
se termine ce vendredi pour les congés de fin d'année. Mais, du moins en
apparence, les deux camps restent fermes sur leurs positions :

La position d'Obama Le président se dit prêt à "une réduction draconienne
des dépenses
" mais il exige également une hausse de 2% de l'impôt sur les
hauts revenus
. "Je ne peux pas transiger sur ce principe ", explique
Barack Obama.

La position des républicains Jusqu'à présent, ils ne veulent pas entendre parler d'une
hausse des impôts et souhaitent une limitation des niches et des exonérations
fiscales. Leur chef de file, le président de la Chambre John Boehner, souhaite
également une réduction plus marquée des dépenses, notamment en matière de
santé et de retraite, deux secteurs gérés par les programmes Medicare et Medicaid.

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