Les droits de l’homme, invités surprise de la visite de François Hollande au Caire
François Hollande poursuit sa tournée au Moyen-Orient : après le Liban, le président français est en Egypte depuis dimanche soir. Sous les ors de la résidence officielle de la présidence égyptienne, après un accueil martial fleuri d’un tapis rouge, de coups de canons et d’honneurs militaires, François Hollande a notamment pu évoquer devant la presse la question des droits de l’homme, dans un pays accusé de réprimer l’opposition et la société civile.
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Le président Sissi vraisemblablement irrité
Alors que l’entourage de François Hollande avait assuré que ces sujets, crispants diplomatiquement, seraient évoqués "de manière discrète et efficace" au Caire, ils ont finalement occupé la quasi-totalité de la conférence de presse, irritant vraisemblablement le président égyptien. Abdel Fattah al-Sissi avait pourtant pris la parole le premier en évoquant d’emblée la question, alors que de nombreuses ONG françaises lui reprochent arrestations arbitraires, pratique de la torture et impunité des forces de sécurité (il y aurait à cet égard quelque 40 000 prisonniers politiques en Egypte, une répression sans égal même sous l’ère Moubarak).
Le maréchal al-Sissi, au pouvoir depuis deux ans, a ainsi expliqué que son pays faisait ses premiers pas d’Etat démocratique. Et répondu sécurité et lutte contre le terrorisme à tous ceux qui ont évoqué la répression. "Soyez rassurés , a ainsi déclaré al-Sissi devant la presse réunie au palais Qubba. Nous sommes ici dans un Etat de droit. Et je suis sérieux, je ne fais pas de réponse politicienne pour faire plaisir. Nous devons protéger un Etat de 90 millions d’habitants, qui doivent vivre en sécurité. Si cet Etat devait s’effondrer, vous ne pouvez même pas imaginer les conséquences dans la région et en Europe. Nous ne violons pas les droits de l’homme. Mais il y a des forces du mal qui veulent donner une mauvaise image de l’Egypte, dans le pays et dans le monde."
Rattraper la Légion d'honneur remise au Saoudien ben-Nayef en mars
Lutter contre le terrorisme, lui a répondu François Hollande, "suppose de la fermeté mais aussi un Etat, et un Etat de droit. C'est le sens de ce que la France évoque quand elle parle des droits de l'homme. Les droits de l'homme, ce n'est pas une contrainte, c'est aussi une façon de lutter contre le terrorisme. " D’ordinaire, lors de telles visites, les prises de parole du chef de l’Etat sur ces sujets ne dépassent pas le cadre de discussions privées avec leurs homologues. L’intervention publique de François Hollande sur ces sujets diplomatiquement crispant est une manière pour l’Elysée de rattraper la très contestée Légion d’honneur attribuée au prince saoudien Mohamed ben Nayef en mars dernier.
En suspens, le cas Lang et l'enquête sur l'étudiant italien torturé à mort
Pour autant, de nombreuses questions restent en suspens, notamment celles qui entourent le cas d’Eric Lang, un Français mort dans un commissariat du Caire en 2013. A-t-il été tué par ses co-détenus ou par des policiers ? La plainte déposée par la famille n’a toujours pas reçu d’écho concret. François Hollande assure que le nom du Français a été mentionné devant le président égyptien. Mais sa mère, Nicole, a le sentiment tenace que l’histoire de son fils a été volontairement mise de côté. L’Italie, qui vient de connaître un cas similaire avec un étudiant torturé à mort, a de son côté rappelé son ambassadeur pour protester contre les lenteurs de l’enquête.
Le sujet des droits de l’homme évoqué, celui des contrats d’armement devrait lui succéder : la France est aussi l'un des principaux fournisseurs d'armes du régime égyptien, qui lui a notamment acheté en 2015 24 avions de combat Rafale, une frégate multimissions et les deux navires Mistral dont Paris avait annulé la vente à la Russie en raison de la crise ukrainienne.
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