Cet article date de plus d'onze ans.

Les grands chantiers qui attendent Obama

Barack Obama conserve les rênes de la première économie du monde, mais d'importants chantiers l'attendent pour ce second mandat, à la fois en politique intérieure et sur la scène internationale. Passage en revue.
Article rédigé par Clara Beaudoux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (Jim Bourg Reuters)

Barack
Obama reste à la Maison-Blanche "plus déterminé et plus inspiré que
jamais
", a-t-il annoncé dès sa victoire mercredi. Et le président américain va en avoir
besoin, car de nombreux chantiers l'attendent. 

Politique intérieure : les questions économiques avant tout

Réduction du déficit budgétaire   Dans son premier discours
après l'annonce de sa victoire
, le président américain s'est engagé à coopérer avec
l'opposition républicaine pour réduire le déficit du pays. Depuis deux ans, Barack Obama se heurte aux divisions entre démocrates et républicains sur cette question. Et
le blocage pourrait perdurer suite au statut quo pesistant au Congrès (les républicains gardent le
contrôle de la Chambre des représentants tandis que les démocrates gardent une
courte majorité au Sénat). 

Pourtant, le président et les élus du Congrès doivent s'atteler
sans attendre au "mur budgétaire", cet ensemble de coupes automatiques
des dépenses publiques et de relèvement des impôts de quelque 600 milliards de
dollars qui menace le pays au 1er janvier si la Maison-Blanche et le Capitole ne parviennent pas à un accord.

Le compromis semble donc essentiel, mais les discussions s'annoncent
difficiles puisque le président a plaidé pendant la campagne pour une réduction
du déficit budgétaire de plus de 4.000 milliards de dollars sur dix ans en
augmentant les impôts des Américains les plus riches et en réduisant les
dépenses de défense, deux méthodes très impopulaires chez les républicains.

Croissance et chômage

Quels leviers le président américain pourra-t-il trouver pour relancer la croissance du pays ? Depuis leur
sortie de la récession en 2007-2009, les États-Unis n'ont pas réussi à renouer
avec une croissance soutenue, qui se maintient à 2% du produit intérieur brut (PIB). La campagne de Barack Obama a d'ailleurs été handicapée par la frustration des électeurs face à la lenteur de la reprise et à la montée de la dette publique, même si il semble bien qu'ils lui aient finalement accordé le bénéfice du doute. 

Autre défi : le pays n'a regagné que 4,5 des 8,7 millions
d'emplois perdus pendant la crise. Environ 23 millions d'Américains
restent sans emploi ou sous-employés. Le taux de chômage était de 7,9% en octobre.

Immigration et santé Au-delà des questions économiques, Barack Obama devrait aussi s'atteler à la réforme de l'immigration, une des grandes promesses inabouties de son premier mandat. Enfin, la réforme du système de santé, dite "Obamacare", doit entrer en vigueur en 2014 pour permettre à la quasi-totalité de la population de bénéficier d'une couverture maladie.

Politique étrangère : "Obama a les coudées franches"

La réélection de Barack Obama va permettre d'assurer une certaine continuité
de la politique américaine au sein de la scène internationale. Le président a notamment prévu de retirer les forces américaines d'Afghanistan d'ici fin 2014 (70.000 GI), transférant la responsabilité de la sécurité aux troupes afghanes, un dossier qui s'annonce compliqué tant la situation sur place reste délicate.

"Maintenant qu'est-ce qu'il veut faire, lui ? C'est
une autre question, puisqu'après tout quand on est réélu on a une marge de manœuvre
plus importante, on peut faire des choses qu'on ne pouvait pas faire
auparavant. D'autant qu'en politique étrangère le Congrès compte mais beaucoup
moins qu'en politique intérieure, de sorte qu'Obama a les coudées franches
", explique sur France Info Justin Vaïsse, historien et auteur de plusieurs livres
sur la politique américaine. 

Non-prolifération nucléaire

Au programme de Barack Obama :
les dossiers urgents donc, comme la Syrie ou l'Iran, "mais aussi deux grands
dossiers dans lesquels il va se lancer
", prévoit Justin Vaïsse. "Il va
essayer de parachever son rêve de progresser sur la non-prolifération nucléaire.
En 2009 à Prague il avait prononcé ce discours très ambitieux, très idéaliste,
en rêvant d'un monde dénué d'armes nucléaires. Une des façons d'y arriver ce
serait un nouveau traité avec la Russie à ce sujet
", explique l'historien. D'autant qu'Isarël menace depuis des mois de bombarder l'Iran pour stopper le programme nucléaire de Téhéran.

Un regard tourné vers l'Asie

"Le deuxième objectif c'est,
encore plus important, de continuer ce fameux pivot vers le monde émergent et l'Asie
en particulier, qu'il a amorcé au cours de son premier mandat. Essayer de se déprendre
des guerres au sol, de l'enlisement au Moyen-Orient, pour se tourner vers l'Asie
", et notamment la Chine, pousuit Justin Vaïsse.

Le conflit israélo-palestinien ? "Je ne vois pas pourquoi il irait s'y casser les dents une seconde fois" (Justin Vaïsse)

Quant au conflit israélo-palestinien, "je crains fort
que dans les deux années on n'ait que très très peu de mouvement
" sur ce
sujet, explique le spécialiste. Et pourtant après la réélection de Barack
Obama, le président palestinien Mahmoud Abbas l'a félicité souhaitant qu'il "continue
ses efforts pour la paix
", le négociateur palestinien Saëb Erakat espérant même que la réélection du
président américain conduise à la création d'un Etat palestinien. "Obama
s'y est déjà cassé les dents, je ne vois pas pourquoi il irait s'y casser les
dents une seconde fois, je ne vois pas pourquoi il irait dépenser son temps et
son capital politique là-dessus
", juge Justin
Vaïsse.

Et la "vieille Europe" dans tout ça ? Quant à l'Europe qui a été très peu évoquée lors de cette campagne américaine ? "**A ux yeux des Américains, les Européens sont les pires alliés du monde sauf qu'il n'y en a aucun autre ", indique l'historien. "Nous espérons beaucoup que les États-Unis, avec nous, s'intéressent davantage au sud et à l'est de la Méditerranée, et bien sûr à l'Afrique qui est le prochain continent émergent ", a déclaré pour sa part Elisabeth Guigou à l'issue de cette élection américaine. "Depuis deux ans, on sent un regain d'intérêt pour l'Europe ", "Je crois qu'il n'oublie pas la vieille Europe ", a jouté la présidente de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.