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Négociations entre Paris et Washington sur le rôle de la SNCF dans la Shoah

Les deux parties évoquent d'éventuelles indemnisations des familles de victimes américaines de l'Holocauste transportées entre 1942 et 1944.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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La gare désaffectée de Bobigny (Seine-Sain-Denis), en janvier 2011. Ici, les déportés du camp de Drancy partaient en train pour rejoindre les chambres à gaz nazies, pendant la seconde guerre mondiale. (BORIS HORVAT / AFP)

Paris et Washington ont ouvert des négociations sur d'éventuelles indemnisations des familles des victimes américaines de l'Holocauste transportées par la SNCF entre 1942 et 1944. Après plusieurs rencontres informelles en 2013, des diplomates des deux pays ont amorcé ces négociations le 6 février à Paris, selon le Washington Post (en anglais), vendredi 21 février. Cette information a été confirmée par l'avocat des familles des victimes, Stuart Eizenstat, et l'ambassade de France à Washington.

Le dossier est d'autant plus sensible pour le groupe ferroviaire qu'il pourrait lui barrer l'accès à des marchés publics américains. 

Des discussions diplomatiques

Réquisitionnée par le régime de Vichy, la SNCF, entreprise publique, a déporté au total 76 000 Juifs dans des wagons de marchandises à travers le pays et vers les camps nazis de concentration et d'extermination entre 1942 et 1944. En 2011, le groupe avait reconnu avoir été un "rouage de la machine nazie d'extermination".

Les familles ont confié le dossier à l'avocat Stuart Eizenstat, qui a déjà obtenu des indemnisations pour des victimes de la Shoah en Allemagne, en Autriche et en Suisse. Il n'a encore rien divulgué sur le contenu des discussions en cours, excepté que les deux parties "étaient en train de définir le nombre" de victimes concernées. 

"On est dans une discussion avec les autorités américaines pour nous assurer qu'on ne laisse pas des gens de côté", a expliqué une porte-parole de l'ambassade de France aux Etats-Unis. Le mécanisme français d'indemnisation des victimes de la déportation couvre tous les citoyens français, y compris les binationaux, et les résidents qui étaient en France au 1er septembre 1939. Cette fois, il pourrait s'appliquer à des victime "qui ne rentraient pas dans les critères initiaux".

Des élus américains ont déposé un projet de loi

Dans l'Etat américain du Maryland, deux élus ont présenté un projet de loi pour restreindre l'accès de la SNCF aux marchés public, aussi longtemps qu'elle n'aura pas versé d'indemnités pour son rôle dans la déportation des Juifs. Une étape indispensable, selon eux, avant que la SNCF puisse se porte candidate, via sa filiale Keolis America, à un projet public-privé de 6 milliards de dollars, portant sur la création et l'exploitation d'une ligne ferroviaire de 25 kilomètres.

Selon une association représentant les victimes et leurs familles, la Coalition for Holocaust Rail Justice, "il reste très peu de temps aux victimes de la SNCF pour qu'il leur soit rendu justice de leur vivant et qu'elles puissent tourner la page". Un ancien déporté, Leo Bretholtz, a lancé une pétition pour réclamer des réparations, qui a recueilli à ce jour 108 000 signatures.

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