Israël : la libération des prisonniers palestiniens en quatre actes
Vingt-six détenus ont été relâchés mardi dans le cadre des négociations de paix entre Israéliens et Palestiniens. Mais le Premier ministre israélien a annoncé dans la foulée de nouvelles constructions dans une colonie de Jérusalem-Est.
Vingt-six détenus palestiniens ont été relâchés par Israël, dans la nuit de mardi 29 à mercredi 30 octobre. Cette nouvelle vague de libérations s'inscrit dans le cadre des difficiles négociations de paix en cours, sous l'égide des Etats-Unis. Une décision censément pacifique, mais qui tend un peu plus les discussions. Explications.
Acte 1 : vingt-six prisonniers relâchés
Mardi soir, peu après une heure du matin, un groupe de 21 détenus a quitté la prison israélienne d'Ofer, près de Jérusalem, à bord de deux minibus aux vitres teintées. Les prisonniers ont ensuite été accueillis par le président palestinien, Mahmoud Abbas, et leurs familles à la Mouqata'a, siège de l'Autorité palestinienne à Ramallah (Cisjordanie). Au même moment, cinq autres prisonniers ont été remis en liberté dans la bande de Gaza.
Pour l'Autorité palestinienne, ces libérations sont stratégiquement très importantes. Elles prouvent la capacité de Mahmoud Abbas à négocier avec lsraël, démarche que condamne le Hamas, principal adversaire du président palestinien.
Acte 2 : des libérations condamnées en Israël
Ces libérations ont provoqué de vives tensions au sein de la coalition gouvernementale conduite par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu. Car ces 26 détenus palestiniens avaient été presque tous condamnés à des peines de prison à vie pour le meurtre d'Israéliens. Le parti Foyer juif, formation ultranationaliste qui prône les activités de peuplement en Cisjordanie, a ouvertement soutenu les demandes de la part de victimes d'attentats palestiniens et leurs proches d'annuler l'amnistie. La Cour suprême israélienne a rejeté mardi un recours présenté en ce sens.
"La décision de libérer les prisonniers est une des décisions les plus difficiles que j'ai eu à prendre. Elle est injuste, car ces terroristes sont relâchés avant d'avoir purgé leur peine. Mon cœur est avec les familles en deuil", a affirmé lundi le Benjamin Netanyahu. Ce dernier a expliqué qu'il fallait "tenir compte du poids de la réalité". "Nous sommes obligés de manœuvrer sur un front international complexe", a-t-il plaidé, en appelant les membres de son gouvernement à adopter "une vision à long terme".
Acte 3 : de nouvelles colonies en contrepartie
Plus que par des appels à la résignation, Benyamin Netanyahu a voulu désamorcer la colère des ultranationaliste par des actes. Aussitôt après la libération des prisonniers, la radio militaire a ainsi annoncé qu'Israël allait construire 1 500 logements dans le quartier de Ramat Shlomo, à Jérusalem-Est, une colonie peuplée de juifs ultra-orthodoxes, sur un territoire considéré par les Palestiniens comme faisant partie de leur futur Etat.
Au total, Benyamin Netanyahu et son ministre de l'Intérieur, Gidéon Saar, ont donné leur aval à quatre plans de construction. En plus des 1 500 nouveaux logements prévus à Ramat Shlomo, des permis d'agrandissement à des habitations existantes seront également accordés. Selon un haut responsable du gouvernement israélien, "les Américains et les Palestiniens" sont "au courant à l'avance de cet arrangement".
Acte 4 : la colère des Palestiniens
Bien qu'ayant filtré une semaine auparavant, l'annonce de ces nouvelles constructions a provoqué la colère de l'Autorité palestinienne. Cette décision "détruit le processus de paix et est un message à la communauté internationale qu'Israël est un pays qui ne respecte pas le droit international et qui continue de placer des obstacles à ce processus", a affirmé le porte-parole du président Mahmoud Abbas. "Elle conduit les parties palestiniennes et arabes à perdre confiance dans la capacité de ce gouvernement à faire la paix."
Par ailleurs, les dirigeants palestiniens ont nié avoir accepté ces constructions dans les colonies juives en échange du retour de leurs prisonniers. "Créer un lien entre la libération d'un nouveau groupe de prisonniers et l'annonce de milliers de logements dans les colonies va à l'encontre de tous les engagements pris avant les négociations", a déclaré le négociateur palestinien, Yasser Abd Rabbo.
Ces nouvelles constructions pourraient mettre à mal les discussions autour d'un futur plan de paix, qui "s'intensifient", a indiqué le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, le 21 octobre. Mais la veille de la libération des prisonniers, le négociateur palestinien avait lui déclaré que les pourparlers n'avaient "pas fait de progrès tangible", déplorant que "l'actuelle position de négociation israélienne est la pire depuis plus de vingt ans".
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