Reportage "Notre vie est détruite, nous n'avons plus de futur" : les réfugiés syriens au Liban subissent les affrontements entre le Hezbollah et Israël

Entassés dans des camps au milieu des bombardements à la frontière libano-israélienne et en manque de tout, certains réfugiés syriens pensent à traverser la Méditerranée pour rejoindre l’Europe.
Article rédigé par Noé Pignède
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des enfants jouent dans un camp de réfugiés au sud du Liban, non loin de la frontière libano-israélienne. Février 2024. (ARTHUR SARRADIN / RADIOFRANCE)

Après quatre mois de guerre entre Israël et le Hamas sur le front à Gaza, le conflit s'est étendu au sud du Liban. Une guerre larvée à laquelle se livrent le Hezbollah libanais, soutien du Hamas palestinien, et l'armée israélienne.

La frontière entre les deux pays est le théâtre de bombardements quotidiens : au moins 248 personnes tuées au depuis le 8 octobre, dont 37 civils et 178 combattants du Hezbollah, selon le décompte du quotidien L'Orient-Le Jour. La plupart des habitants ont fui, mais certains sont trop pauvres pour quitter la zone. Parmi eux, les réfugiés syriens qui vivent au sud du pays depuis des années dans des conditions très précaires se retrouvent piégés dans une nouvelle guerre.

À quelques encablures de la frontière libano-israélienne, Houda et de sa famille s’entassent sous une tente de fortune. Dans ce camp boueux, au cœur de la zone d’affrontement, ils vivent au rythme des frappes qui visent quotidiennement les collines alentour depuis 134 jours. "En Syrie, il y a la guerre et maintenant, au Liban aussi, déplore-t-elle. La situation ne fait qu'empirer. On est terrorisés. Ma fille est devenue muette tellement elle a peur. La nuit, on sursaute à chaque explosion. Mon mari voulait partir mais on n'a pas d'argent pour fuir ailleurs". 

Des vies anéanties par les guerres

Les traumatismes de la guerre en Syrie reviennent. La famille manque de tout : Khaled, la quarantaine, travaillait dans les exploitations agricoles du village d'à côté, pour quelques dollars par jour. Des champs devenus inaccessibles à cause des bombardements. "On collecte du plastique et on fait des emprunts pour survivre, raconte-t-il. Mais depuis le début de la guerre, plus personne ne nous prête d'argent. Les Libanais, eux, ils reçoivent des aides, des cartons de nourritures. Nous, ça fait quatre mois qu'on n'a vu personne. Aucune ONG ne vient plus ici. On a besoin de sucre, de riz, de pain. Les Nations unies nous ont abandonnés".

Pour réchauffer les quelques mètres carrés où ils dorment à douze, la grand-mère fait brûler des déchets dans un vieux poêle à bois. À côté d'elle, Miled, père de quatre enfants, est réfugié ici depuis 2014. Il est originaire de la province d'Idlib en Syrie, une région également ravagée par la guerre. "En Syrie comme au Liban, on est morts. Qu'est-ce qu'on a fait pour mériter ça ? Dieu a maudit le peuple syrien. Notre vie est détruite. Nous n'avons plus de futur", dit-il.

"Moi j’ai 40 ans, c’est fini pour moi, mais je pense à mes enfants : il n’y en a pas un qui sait écrire son prénom. Il n’y a pas d’école".

Miled, réfugié syrien

à franceinfo

"Notre situation était déjà difficile avant, mais depuis le début la guerre en octobre, la vie est devenue impossible", ajoute-t-il. Avant notre départ, Miled confie son intention de traverser la Méditerranée pour rejoindre l'Europe avec sa famille. Un nouvel exil sur une embarcation de fortune, au péril de leurs vies.

Témoignages de réfugiés syriens dans le sud du Liban : reportage de Noé Pignède

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