La Cour pénale internationale a annoncé lundi la délivrance d'un mandat d'arrêt contre le colonel Kadhafi
Poursuivi pour crimes contre l'humanité, le "guide de la révolution" libyenne est le second chef d'État poursuivi par la CPI, après le président soudanais Omar el-Béchir.
Des mandats d'arrêt ont aussi été délivrés contre le fils du colonel Kadhafi, Seif Al-Islam, et le chef des services de renseignements libyens, Abdallah Al-Senoussi.
Les trois hommes sont soupçonnés par le procureur de meurtres et de persécutions constitutifs de crimes contre l'humanité commis par les forces de sécurité sur la population civile libyenne depuis le 15 février, notamment à Tripoli, Benghazi et Misrata.
Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a estimé que la délivrance d'un mandat d'arrêt international "souligne une fois de plus son isolement" et "renforce" le bien-fondé des opérations en Libye. Selon l'ONU, les rebelles sont en train de prendre le dessus sur les forces loyalistes grâce aux frappes aériennes de l'OTAN.
Scènes de liesse à Benghazi
Des scènes de joie ont eu lieu lundi à Benghazi après l'annonce de la décision de la Cour pénale internationale (CPI) de lancer un mandat d'arrêt contre Mouammar Kadhafi, selon un photographe de l'AFP présent dans le bastion de la rébellion libyenne.
La population de la deuxième ville de Libye s'est laissée aller à des scènes de liesse, en tirant notamment en l'air des rafales d'armes à feu.
"Justicve a été rendue", a déclaré le président du Conseil national de transition (CNT), organe politique des rebelles libyens, Moustapha Abdeljalil. "Nous ferons tout ce que nous pourrons pour amener Kadhafi devant la justice", a-t-il dit. "Toute personne qui tenterait de le cacher sera traquée et présentée à la justice. (...) Les Libyens sont capables d'appliquer cette décision", a-t-il ajouté.
Cent jours de bombardements
Cette annonce de la CPI intervient au moment où la campagne de bombardements des pays membres de l'Otan pour aider les rebelles libyens dure depuis cent jours. Le conflit s'enlise, le colonel Kadhafi étant toujours au pouvoir.
La révolte en Libye a fait des milliers de morts, selon le procureur de la CPI, et entraîné la fuite à l'étranger de près de 650 000 Libyens ainsi que le déplacement à l'intérieur du pays de 243 000 autres, selon l'ONU.
Au nom de l'Afrique, le président sud-africain Jacob Zuma avait haussé le ton dimanche face à l'OTAN, soulignant qu'elle n'avait pas été mandatée par l'ONU pour conduire "l'assassinat politique" de M. Kadhafi.
"Criminellement responsables de meurtres"
Saisi par le Conseil de sécurité des Nations unies le 26 février, soit deux semaines seulement après l'éclatement de la révolte en Libye, le procureur de la CPI avait ouvert son enquête le 3 mars.
Seif al-Islam, 39 ans, "Premier ministre de facto", et Abdallah Al-Sanoussi, 62 ans, "bras droit" du colonel Kadhafi, ont "joué un rôle clé dans la mise en oeuvre de ce plan", selon M. Moreno-Ocampo.
Les trois hommes sont, estime-t-il, "criminellement responsables des meurtres, arrestations, détentions, disparitions et mauvais traitement contre des manifestants non armés et des dissidents présumés commis par les forces de sécurité libyennes depuis le 15 février".
Un seul chef d'État en exercice, le président soudanais Omar el-Béchir, fait jusqu'ici l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI recherché pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre au Darfour (Soudan), M. Béchir ne reconnaît pas la compétence de la Cour, qu'il défie régulièrement.
Entrée en fonction en 2002, la CPI ne dispose d'aucune force de police propre et dépend de la volonté des États pour l'exécution des mandats d'arrêt. La Cour a compétence en Libye en vertu de la résolution du Conseil de sécurité du 26 février, ce que contestent les autorités libyennes qui affirment ne pas être "concernées" par ses décisions, n'ayant pas ratifié le statut de Rome, son traité fondateur.
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