Visite d'Emmanuel Macron au Liban : "Si la France ne s'engage pas, il y a un véritable risque d'embrasement", selon le chercheur Karim Emile Bitar
Pour Karim Emile Bitar, la marge de manœuvre de la France "est assez réduite, mais elle est symboliquement importante". Emmanuel Macron doit retourner lundi 31 août à Beyrouth après une première visite au début du mois.
Emmanuel Macron doit se rendre lundi 31 août au Liban quasi un mois après l'explosion survenue à Beyrouth, faisant 188 morts, selon un dernier bilan. "Si la France ne s'engage pas [au Liban], il y a un véritable risque d'embrasement, il y a un véritable risque que les guerres par procuration qui se déroulent dans plusieurs pays de la région, en Syrie, au Yémen ou ailleurs, ne finissent par atteindre le Liban", estime Karim Emile Bitar, directeur de l’Institut des sciences politiques de l’université Saint-Joseph de Beyrouth, directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), dimanche 30 août sur franceinfo.
On estime que la France a un rôle à jouer, que ce n'est pas de l'ingérence
Karim Emile Bitarà franceinfo
"Au Liban, très peu de gens critiquent cette visite" d'Emmanuel Macron, la deuxième en moins d'un mois. "On estime que la France a un rôle à jouer, que ce n'est pas de l'ingérence", indique Karime Emile Bitar. La visite d'Emmanuel Macron "coïncide avec le centenaire de la proclamation de l'Etat du Grand Liban, c'était l'époque où le Liban était sous mandat français, le 1er septembre 1920", rappelle le chercheur. Il y a donc "des liens historiques très forts, des liens émotionnels" entre les deux pays. Et cela peut expliquer que la France soit "le seul pays qui parle à toutes les factions libanaises".
Karim Emile Bitar explique que dans la région "toutes les puissances ont leur propre calcul, la Russie, l'Iran, la Turquie, les Etats-Unis, l'Arabie Saoudite" et "la France est l'un des pays qui est en contact avec la plupart de ces puissances". "La France peut être bien placée pour essayer de négocier un modus vivendi entre les différents partis libanais et les différentes puissances régionales pour éviter qu'elles ne se servent du Liban comme d'un champ de bataille ou comme une caisse de résonnance", estime-t-il.
Aucun ministre n'a été interrogé, les vrais responsables sont totalement déresponsabilisés
Karim Emile Bitarà franceinfo
Le 4 août, une double explosion survenait dans la capitale libanaise, depuis "la ville est toujours sous le choc" et "l'enquête n'a pas du tout avancé". Si "quelques fonctionnaires de troisième ou quatrième catégorie" ont été arrêté, "aucun ministre n'a été interrogé, les vrais responsables sont totalement déresponsabilisés", regrette Karim Emile Bitar. Il est persuadé que "l'Etat n'est pas près de porter véritablement la moindre responsabilité, le gouvernement a démissionné mais a continué les vieilles pratiques de partage du pouvoir". Pour cet expert, "l'oligarchie s'accroche alors que le peuple réclame depuis plus d'un an le renouvellement de cette classe politique".
La classe politique se maintient au pouvoir
Selon Karim Emile Bitar, "l'Etat est aux abonnés absents, ce sont surtout des initiatives privées, des citoyens, des ONG qui sont présentes". Le directeur de recherche a appelé la communauté internationale, "c'est-à-dire surtout l'Union européenne, les bailleurs de fonds, l'agence française pour le développement" à soutenir "ces initiatives privées". "Le peuple libanais ne souhaite pas que l'aide internationale soit siphonnée par une classe politique corrompue qui s'appuie sur un réseau clientéliste, il souhaite que s'il y a une aide internationale, elle aille directement à ceux qui en ont véritablement à cette population qui a été durement touchée", assure-t-il.
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