Cet article date de plus de six ans.

Conflit entre l'Iran et Israël : retour sur trois mois de tensions de plus en plus vives entre les deux pays

L'aviation israélienne a mené plusieurs raids sur des bases iraniennes en Syrie, jeudi 10 mai, faisant plusieurs morts, en représailles à des tirs de roquettes. Depuis février, la situation ne cesse de s'envenimer entre les deux pays.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Après un tir de missile en périphérie de Damas (Syrie), le 10 mai 2018. (OMAR SANADIKI / Reuters)

Une "ligne rouge" aurait été franchie, selon le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. Israël a mené des dizaines de raids aériens en Syrie, jeudi 10 mai, affirmant riposter à des tirs de roquettes iraniennes lancées contre les militaires israéliens stationnées sur le plateau du Golan. Ces tirs – qui n'ont pas été confirmés par une source indépendante – seraient une première attaque directe de la part de l'Iran contre des positions israéliennes.

Franceinfo revient sur les étapes qui ont mené à cette escalade des tensions entre les deux pays.

Février 2018 : Israël bombarde un aéroport militaire syrien utilisé par les Iraniens

Les récentes hostilités entre les deux pays ont commencé le 10 février. A cette date, l'armée israélienne vise l'aéroport militaire syrien de Tiyas, près de Homs, dans l'ouest de la Syrie. L'Etat hébreu agit alors en représailles au survol de l'espace aérien israélien par ce qu'elle a identifié comme un drone iranien. Un hélicoptère israélien de type Apache l'intercepte et l'abat. Selon les renseignements israéliens, l'objet volant provenait de la base militaire aérienne de Tiyas, où seraient stationnés des Gardiens de la révolution, les unités d'élite iraniennes. L'Iran "entraîne la région vers une escalade de violence dont il paiera le prix", accuse Jonathan Conricus, le porte-parole de l'armée israélienne.

De leur côté, le régime syrien et ses alliés iraniens nient toute violation de l'espace aérien israélien. Selon eux, les frappes israéliennes ont pris pour cible une "unité de drones" utilisée "pour la collecte d'informations dans la lutte contre les organisations terroristes, notamment le groupe Etat islamique", rapporte RFI.

La réponse israélienne est pourtant immédiate. L'aviation de Tsahal bombarde douze cibles en Syrie : trois batteries de défense anti-aériennes, et quatre cibles iraniennes. C'est la première fois que l'armée israélienne affirme viser des objectifs iraniens. Un avion de combat F-16 israélien est abattu lors du raid, probablement par la défense anti-aérienne syrienne. Les deux pilotes réussissent à s'éjecter, mais l'un des deux est grièvement blessé. L'avion s'écrase dans le nord d'Israël, sans faire de blessés.

9 avril : l'aéroport syrien est de nouveau attaqué

Le 9 avril, une série de missiles vise la même base aérienne syrienne. Cette frappe survient après l'attaque chimique présumée à Douma, en banlieue de Damas, deux jours plus tôt. Le régime syrien est accusé d'avoir tué des civils. La communauté internationale condamne l'utilisation d'armes chimiques. Et en réaction, la France et les Etats-Unis promettent d'apporter une réponse "forte et commune". Deux jours plus tard, le raid aérien contre l'aéroport est attribué dans un premier temps à ces deux pays. Mais Français et Américains démentent avoir bombardé ce site. Les regards se tournent alors vers Israël, qui refuse de confirmer en être à l'origine. Des sources militaires israéliennes ont cependant affirmé au New York Times que l'armée d'Israël en était bien à l'origine.

Selon l'agence de presse iranienne Tasnim, sept militaires iraniens ont été tués dans l'attaque, parmi les 14 morts au total.

29 avril : des tirs de missiles provoquent 26 morts en Syrie, en majorité des Iraniens

Les responsables israéliens ont depuis multiplié les déclarations pour dénoncer l'implantation de l'Iran en Syrie. Soutien indéfectible du régime syrien de Bachar Al-Assad, l'Iran engage plusieurs centaines de militaires sur le théâtre de guerre. Ces derniers ont la fonction d'encadrer plus de 20 000 miliciens chiites venus de l’Iran, mais aussi du Pakistan, de l’Afghanistan, du Liban et d’Irak, explique La Croix.

Le 29 avril, des positions militaires iraniennes sont visées par des frappes. Un aéroport militaire d'Alep, dans le nord de la Syrie, et la "Brigade 47" d'Hama, dans le centre, où sont stationnées des forces iraniennes, sont visés par des bombardements "probablement israéliens", selon l'OSDH (Observatoire syrien des droits de l'homme). Au moins 26 combattants, en majorité iraniens, sont tués par les tirs de missiles, d'après la même source.

Du 8 au 10 mai : la violence monte d'un cran

L'armée israélienne est en alerte. Presque un mois après les premières frappes israéliennes contre des positions iraniennes en Syrie, le 8 mai, Donald Trump annonce que les États-Unis se retirent de l'accord sur le nucléaire iranien. De quoi mettre le feu aux poudres. Dans la soirée qui suit l'annonce, des bombardements attribués à Israël visent un dépôt d'armes des Gardiens de la révolution iraniens, au sud de Damas, selon l'OSDH. Selon la même source, 15 combattants étrangers favorables au régime syrien, dont huit Iraniens, sont tués.

La situation s'envenime la nuit suivante. Peu après minuit, le 10 mai, une vingtaine de projectiles et de roquettes sont tirés en direction des forces israéliennes stationnées sur le plateau du Golan, un ancien territoire syrien occupé par l'Etat hébreu depuis 1967. Quatre projectiles sont interceptés. Les autres sont tombés "en dehors d'Israël", a affirmé Tsahal. Israël attribue les tirs aux brigades iraniennes Al-Qods.

Si aucune victime n'est à déplorer, la riposte est cependant immédiate. L'aviation israélienne frappe dans un premier temps le lance-roquettes d'où étaient partis les projectiles, dans la périphérie de Damas. Elle vise ensuite environ 70 cibles militaires iraniennes, sites de renseignement, de logistique, de stockage et postes d'observation en Syrie, selon Jonathan Conricus, un porte-parole de l'armée israélienne. La Russie confirme que l'armée israélienne a tiré 70 missiles, dont 60 à partir d'avions de chasse. Les bombardements tuent 23 combattants pro-régime, dont 18 étrangers, a précisé l'OSDH. 

Israël maintient la pression. "Toute réplique syrienne rencontrera une réaction israélienne", menace Tsahal. Des avions survolaient massivement l'espace aérien syrien, selon des témoins. De fortes détonations ont également été entendues le 10 mai au matin. Des bases militaires, un dépôt d'armes et un radar militaire sont touchés, selon l'agence officielle pro-régime Sana. Par ailleurs, plusieurs dizaines de missiles sont "abattus dans le ciel syrien par les systèmes anti-aériens", selon la même source, qui ne donne pas plus de précisions sur les cibles visées par les frappes. 

L'Iran et Israël affirment aujourd'hui rechercher l'apaisement. L'armée israélienne assure ne pas chercher l'embrasement, tout en se disant prête à tous les scénarios. De son côté, le président iranien, Hassan Rohani, affirme que son pays ne veut pas de "nouvelles tensions" au Moyen-Orient, soulignant que "l'Iran a toujours cherché à faire baisser les tensions".

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.