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Quatre fois où Jeanne Moreau s'est engagée pour les droits des femmes

Sans vouloir utiliser le mot, la comédienne a mené plusieurs combats féministes au cours de sa vie notamment en faveur du droit à l'avortement ou en prenant la défense des Pussy Riot.

Article rédigé par franceinfo
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Jeanne Moreau a plusieurs fois soutenu publiquement les droits des femmes. (COLLECTION CHRISTOPHEL)

La star du cinéma et de théâtre Jeanne Moreaumorte à l'âge de 89 ans, lundi 31 juillet, était une femme engagée. Notamment en faveur des droits des femmes. Celle qui refusait de se dire "féministe" car "le mot 'féminisme' [...] amoindrit, il amenuise le mot 'féminin'", confiait à Causette en 2015 "avoir vécu aussi bien comme une femme que comme un homme dans [s]a vie professionnelle et dans [s]a vie privée". Franceinfo a sélectionné quatre moments où elle a fait part de son engagement pour les femmes.

Quand elle a incarné l'adultère à l'écran et dans la vie

Dans Les Amants, sorti en 1958, Jeanne Moreau incarne une femme adultère partagée entre trois hommes. A l'époque, le film scandalise les catholiques de France. En cause, l'une des "premières scènes d’amour du cinéma français", selon François Truffaut. On y voit une Jeanne Moreau dénudée, prendre du plaisir dans un plan de plus d'une minute. Pour la première fois au cinéma, le cunnilingus est suggéré. En 1962, elle incarnera à nouveau une amante dans le célèbre "trouple" de Jules et Jim.

Mais la liberté sexuelle n'était pas qu'un rôle pour l'actrice. "J'ai séduit beaucoup d'hommes. J'ai toujours été vers des hommes qui avaient du talent. Je n'ai pas eu des amants pour avoir des amants", confiait-elle à L’Obs en 2012.

Quand elle a clamé haut et fort avoir avorté

Jeanne Moreau fait partie des signataires du "Manifeste des 343", une pétition parue dans le Nouvel Observateur le 5 avril 1971. Aux côtés de Simone de Beauvoir ou Catherine Deneuve, elle y déclarait avoir avorté. "L’avortement libre et gratuit n’est pas le but ultime de la lutte des femmes, écrivaient les signataires. Au contraire, il ne correspond qu’à l’exigence la plus élémentaire, ce sans quoi le combat politique ne peut même pas commencer."

En proclamant avoir avorté, Jeanne Moreau s'exposait à des poursuites pénales pouvant aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 20 000 francs d'amende. Le "Manifeste des 343" et la médiatisation, l'année suivante, du procès de Bobigny, contribueront à l'adoption de la loi Veil légalisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) en 1975.

"Elle m'avait raconté ces avortements clandestins qu'elle avait subis avant la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse, et le cancer de l'utérus qui avait suivi, raconte lundi sur RTL l'animateur Marc-Olivier Fogiel, qui l'a interviewée plusieurs fois. Elle voulait absolument témoigner encore et encore sur cette liberté qu'ont les femmes à disposer de leur corps à un moment donné où elle sentait un raidissement de la société sur cette question."

Quand elle a défendu les "femmes opprimées"

En septembre 1975, quelques mois après l'adoption de la loi Veil, Jeanne Moreau affirme une nouvelle fois son soutien à l'avortement, lors d'une interview avec le journaliste Paul Giannoli. "Voilà qu’aujourd’hui les femmes ont déclaré la guerre aux hommes. Enfin, certaines femmes ont déclaré la guerre aux hommes. Vous trouvez ça bien ?", lui demande le présentateur. "Certaines femmes sont opprimées oui. La majorité", répond l'actrice. Et de poursuivre : "[Une bourgeoise] a plus de duplicité. Elle a plus de moyens de se libérer en cachette de son mari. Elle a plus de moyens d’information aussi pour ne pas être enceinte à chaque fois qu’elle fait l’amour."

Revenant sur sa signature du "Manifeste des 343", l'actrice explique : "J’ai signé une seule pétition. Pour la liberté de l’avortement. C’était important parce que les gens qui signaient s’exposaient à des poursuites judiciaires et à l’emprisonnement. Alors, il est plus facile de mettre en prison une femme pas connue qui vit dans un HLM que des femmes célèbres."

Quand elle s'est engagée en faveur des Pussy Riot

Le 30 octobre 2013, Jeanne Moreau s’engage sur France Culture et dans Mediapart pour la défense des Pussy Riot, groupe de punk-rock féministe russe qui dénonce les dérives conservatrices et autoritaires de la Russie. Face caméra, elle lit la "Lettre du camp 14 de Mordovie", écrite par Nadejda Tolokonnikova, une membre de Pussy Riot condamnée à deux années de labeur en camp de travail et dont la famille n'a plus de nouvelles.

A l'époque, elle confie : "Je suis révoltée par ce qui arrive à cette jeune femme dont la vie est en danger. Malheureusement, elle n’est pas la seule. A mon âge, je ne peux plus monter sur les barricades. Je prends la parole [...] pour exprimer ma révolte. [...] Il faut que les Français fassent attention au Front national et à l’extrême droite internationale."

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