Les disparitions forcées, l’autre plaie ouverte de la population en Syrie
A l’occasion de la journée internationale des victimes de disparition forcée, c'est-à-dire une privation de liberté dans un lieu tenu caché et une violation continue des droits de la personne enlevée, Amnesty International a décidé de braquer à nouveau les projecteurs sur les pratiques du régime syrien en la matière.
Selon cette ONG de défense des droits de l’homme, qui affirme travailler sur ce dossier depuis l’accession au pouvoir de la famille Assad en 1970, le nombre de ces disparitions a fortement augmenté depuis le début de la crise syrienne en 2011.
Privé de la lumière du soleil pendant trois ans
Rapportant le bilan d’organisations locales, Amnesty International fait état de milliers de civils tués aux mains des forces de sécurité syriennes, de 85000 personnes victimes de disparition forcée et de dizaines de milliers soumises à la torture et aux mauvais traitements par le gouvernement.
«On nous torturait tous les jours. Nous étions une trentaine dans la cellule. Lorsque les personnes mourraient, elles étaient remplacées. Au cours de mes trois ans d’emprisonnement, je n’ai pas quitté ma cellule une seule fois. Je n’ai pas vu la lumière du soleil pendant trois ans» témoigne un avocat d’Alep, ancien détenu libéré en mai 2014.
Autre témoignage accablant, celui du journaliste Shiyar Khalil qui racontait après sa libération en juin 2015 : «Au bout de deux mois de tortures et d’interrogatoires, on m’a dit que je devrais passer à la télévision syrienne et "avouer" que j’étais un terroriste et que je participais à des activités terroristes.»
Dans son rapport Amnesty souligne en effet que pour faire taire un opposant, «qu’il soit militant, journaliste, professionnel de santé ou de droit,…on l’enlève chez lui ou on l’arrête dans la rue et il disparaît dans un véritable trou noir.»
La disparition forcée, un crime selon le droit international
Selon Munira, une militante syrienne qui travaille avec une ONG soutenant les familles de détenus en Syrie, «ce que les familles des personnes détenues en Syrie veulent, c’est savoir où elles sont : dans quelle antenne de la Sûreté, quelle prison, ou alors l’endroit où elles ont été enterrées. Elles veulent savoir si leurs proches sont vivants, elles veulent pouvoir leur rendre visite et savoir s’ils ont accès à des soins médicaux.»
L’organisation de défense des droits de l’homme rappelle que les disparitions forcées sont considérées comme un crime par la législation internationale et même comme un crime contre l’humanité lorsqu’elles sont organisées, orchestrées et perpétrées massivement.
Elle déplore que «quatre ans après sa mise en place et après de nombreuses résolutions du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale de l’ONU, la Commission d’enquête n’a toujours pas réussi à obtenir l’accès à la Syrie» et ajoute «il est plus urgent que jamais d’agir.»
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