Législatives turques: Erdogan peut s'appuyer sur sa réussite économique
Immeubles, ponts, routes, tunnels, aéroports…. La Turquie donne toujours l’impression d’être un immense chantier. Il faut dire que les gouvernements dirigés par l’AKP ont toujours favorisé le secteur du BTP dans l’économie turque. Mais, derrière ce moteur de la croissance, la Turquie a construit une véritable puissance économique dans le cadre libéral défini par l'AKP d'Erdogan, même si aujourd'hui «nous ne sommes plus dans les années fabuleuses», nous explique l'universitaire Ahmet Insel. La croissance en 2014 n' a en effet atteint «que» 2,4%.
Istanbul sea tunnel approaching 'last meters' http://t.co/WAub9QyIum pic.twitter.com/gevnTkd8GT
— ANADOLU AGENCY (ENG) (@anadoluagency) June 3, 2015
Avec une population nombreuse (près de 80 millions d’habitants) et jeune (30 ans en moyenne), la Turquie a connu un impressionnant développement ces dernières années. Avec un PIB de 820 Mds USD en 2013, la Turquie est la 17ème puissance mondiale et affiche l’ambition de se hisser à la 10ème place en 2023, année du centenaire de la République. Elle est la première puissance économique du Moyen-Orient.
«La croissance moyenne du PIB a été de 5,2% sur la période 2002-2012 et l’économie a progressé de 4% en 2013. Avec une dette qui s’élève à 36,3% du PIB en 2013 et un déficit public de 1,2%, le gouvernement turc a atteint ses engagements pris en 2001, après la crise financière, de maîtrise des dépenses publiques», note le ministère français de l’économie à propos de la Turquie
Cette croissance record est notamment assise sur l'industrie et l'investissement. Ces derniers, étrangers ou non, ont permis l’émergence d’une industrie efficace et compétitive (du textile à l’automobile), même si le tissu économique reste riche en micro-entreprises peu productives. La bonne gestion des finances publiques a renforcé la crédibilité internationale du pays.
Certains secteurs (automobile, textile, construction) réussissent à exporter une partie de leur production ou savoir-faire. L'industrie automobile, qui s'est développée en partenariat avec des grandes marques mondiales (Renault, Fiat...) emploie ainsi plus de 500.000 personnes tandis que le secteur très dynamique de la construction s'est imposée dans des Etats voisins pour des grands projets.
Derrière ce tableau idylique, qui ne laisse pas paraître les inégalités sociales ou la faiblesse des revenus, se cachent certaines faiblesses structurelles.
Parmi celles-ci, on peut noter la persistance de l'inflation (8,1% en 2014) ou une faible productivité. L'«inflation reste forte, le taux de change de la monnaie volatil et les gains de productivité faibles. La compétitivité de l'économie demeure fragile et sa dépendance vis-à-vis de l'épargne étrangère est très élevée. Les politiques monétaire et financière visent à assurer la désinflation, tout en maintenant le taux de change et la croissance du crédit sur des trajectoires viables, mais l'inflation est nettement supérieure à l'objectif retenu et la dette privée a sensiblement augmenté», notait l’OCDE dans son rapport sur l’économie turque en 2014.
Et cette inflation peut avoir des conséquences négatives sur certains secteurs. «En 2014, la consommation des ménages, principale contributrice à l’activité (70% du PIB), a subi les effets d’une inflation forte, nourrie par la dépréciation de la livre turque, et de taux d’intérêt élevés. Dans ce contexte, le chômage a atteint un niveau élevé, proche de 10% de la population active», relevait pour sa part la Coface.
La monnaire, la livre turque, a poursuivi sa dépréciation (-10% sur un an et -24% depuis janvier 2013) entraînant des incertitudes sur le marché des capitaux, sur lequel la Turquie n 'a que peu d'influence. Cela a provoqué des polémiques politiques sur les taux d'intérêts fixés par la banque centrale. Cette dépréciation a contribué à l’augmentation de l’inflation, mais elle a bénéficié aux exportations sans que cela n'arrange beaucoup la balance commerciale du pays qui reste très déficitaire.
La Turquie s'est très rapidement relevée de la crise mondiale, même si les niveaux de croissance ne sont plus ceux d'il y quelques années. De plus, cette crise a eu un coût. Outre les problèmes liés au marché des capitaux entraînant une hausse des taux d'intérêt, les salaires sont restés très bas. Résultat, les conflits sociaux se sont multipliés. Et à l'approche des élections, les grèves massives dans le secteur clef de l'automobile se sont très vites terminées par des hausses de salaires.
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