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Reportage Turquie : le prudent espoir des victimes du régime, licenciées ou limogées pour déloyauté supposée envers Erdogan

Le premier tour de l'élection présidentielle turque a lieu dimanche 14 mai. Il sera scruté avec attention par les 125 000 personnes limogées car jugées déloyales envers le président Erdogan, qui s'est livré depuis dix ans à une véritable chasse aux sorcières.
Article rédigé par Jean-Sébastien Soldaïni
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Une affiche de campagne pour Recep Tayyip Erdogan dans les rues d'Istanbul, le 11 mai 2023. (UMIT TURHAN COSKUN / AFP)

Si Arsi accepte de parler, c’est dans ce qu’elle qualifie elle-même d’abri : un local syndical où, après avoir été licenciée par un simple décret, cette ancienne chercheuse en psychologie a trouvé de l’écoute, un soutien psychologique et financier. "Si Erdogan gagne encore, je vivrai cela comme une sorte de chute, une dépression que nous serons nombreux à vivre, alors il vaut mieux ne pas y penser", glisse-t-elle, après cinq ans qu’elle ne veut pas vivre à nouveau.

Depuis dix ans, Recep Tayyip Erdogan a resserré l’étau sur l’opposition, se livrant à une chasse aux sorcières dans l’administration. 125 000 personnes ont été "purgées", limogées de leur poste car jugées déloyales envers le président turc.

>> "Moi, je ne vois pas de crise en Turquie" : avant les élections, la base électorale du président Recep Tayyip Erdogan défend son action

Ces victimes de "purges" politiques attendent avec impatience et anxiété l'élection présidentielle, dont le premier tour a lieu dimanche 14 mai. Attablée dans un café branché, Deniz espère une défaite de Recep Tayyip Erdogan pour pouvoir, dit-elle, réparer l’injustice qu’elle a subie. "Je veux retourner à mon travail, reprendre mon poste, mais je veux aussi prendre la tête d’une commission pour restructurer mon entreprise".

"La vie des Turcs ne vaut pas grand-chose"

Ce désir de revanche mais aussi cette fierté d'avoir tenu face à un système, Deniz la partage avec Ekin, un ancien fonctionnaire administratif. "Ce qu’on vit n’est qu’une facette de ce qu’est ce pays, souligne Ekin. On peut vous virer, vous emprisonner sans vous dire pourquoi, et sans même s’excuser. La vie des Turcs ne vaut pas grand-chose."

Pour Ekin, une défaite de Recep Tayyip Erdogan ne signifie pas forcément un avenir meilleur. Il en est persuadé, dans ce pays : tout peut à nouveau basculer très vite. 

Turquie : rencontre avec les victimes des "purges" politiques - Reportage de Jean-Sébastien Soldaïni

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