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Ukraine : l'oligarque qui peut renverser la vapeur

Une voix, et non des moindres, se fait entendre depuis trois jours contre les séparatistes qui contrôlent plusieurs villes et occupent le siège du gouvernement régional dans l'est ukrainien. Celle du milliardaire de Donetsk, Rinat Akhmetov, plus grosse fortune d’Ukraine, 39e au monde. L’homme d’affaires de 47 ans emploie plus de 100.000 personnes et a une énorme influence dans la région.
Article rédigé par Mathilde Lemaire
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Rinat Akhmetov en plein discours © Reuters/Alexander Khudotioply)

De nombreux habitants de Donetsk le surnomment le "respecté". Musulman, fils d'un mineur tatar, Rinat Akhmetov a connu une folle ascension à la chute du communisme. Charbon, acier, électricité, banque, bâtiment…. Son empire est vaste et sa fortune estimée à 20 millards de dollars. Il ne se déplace qu’en voiture blindée dans un convoi, ou avec son Airbus personnel. Akhmetov possède aussi le mythique club de foot du Shakhtar Donetsk.

"Akhmetov est une figure incontournable dans la région. Il est né ici à Donetsk et a consacré sa vie à cette région et aux habitants de cette région. Avec sa holding, ses nombreuses entreprises, il fait vivre plus de 100.000 familles. Des gens à qui il offre des conditions de logement et de vie favorables, avec des aides pour leurs vacances et des bourses pour les études de leurs enfants. Pour cette raison, cet un homme aimé et un homme influent. Ses paroles sont prises très au sérieux par la population ", explique Iouri, l'un des cadres dirigeants du club de football vainqueur en 2009 de la coupe de l'UEFA.

 

  (Le stade du Shakhtar Donetsk, la Donbass Arena © Radio France/Jean-Marie Porcher)

 

Un modèle pour de nombreux citoyens

Proche de Ianoukovitch, Akhmetov a pris ses distances quand la colère a commencé à gronder à Kiev en décembre dernier. Depuis  la fuite du dictateur, il était discret. Les séparatistes le considéraient comme l’un des leurs, mais mardi, dans une vidéo, il les a accusés de semer le trouble et a appelé à l’unité du pays. Depuis mardi, le puissant oligarque fait même résonner les sirènes de ses usines et du grand stade du Donbass Arena à midi pile. Il incite vigoureusement ses salariés à des rassemblements à cette même heure. Il fait même envoyer des SMS à la population - aux chauffeurs de taxis notamment - pour leur demander de faire du bruit, de klaxonner à midi chaque jour.

"Akhmetov? Il a beaucoup de poids et d’autorité cet homme-là ! Ses propos des derniers jours encouragent des gens comme moi à se mobiliser contre ceux qui sèment le trouble, et font peur aux citoyens. J’espère que grâce à lui, la situation va changer dans la région pour que le calme revienne", confie Lila,** une jeune journaliste privée d’emploi depuis que les séparatistes ont pris d’assaut  la radio publique de Donetsk il y a quinze jours.

Un traître selon les séparatistes

Akhmetov a-t-il les moyens de siffler la fin de la partie et d’aider à la tenue de la Présidentielle dimanche dans l’est de l'Ukraine ? En tout cas, Vladimir Markevic, l’un des leaders séparatistes (président du Parlement de la République autoproclamée de Donetsk) ne veut pas se montrer inquiet. " Moi, je pensais qu’ Akhmetov était un homme bon, un homme de paix qui aime le sport et ne veut pas que le sang coule. On ne s’attendait pas à sa déclaration d’avant-hier. C'est une trahison. Je pense qu’il a reçu la mauvaise influence de Kiev. C’est pour ca qu’il prend ce mauvais chemin. C’est une provocation contre le peuple car c’est sur le dos du peuple que cet homme s’enrichit depuis 23 ans " commente le responsable pro-russe dans son bureau au dixième étage du siège du gouvernement régional.

 

  (Vladimir Markévic, président autoproclamé de Donetsk © Radio France/Jean-Marie Porcher)

 

Lâchés par Akhmetov, sans nouvelles, sans réponse de la Russie à laquelle ils ont demandé le rattachement, les séparatistes pourraient se retrouver fragilisés. Des dissensions sont apparues d'ailleurs mercredi entre les activistes de Donetsk et ceux de Slaviansk, ville bastion de l'insurrection, située également dans la région orientale du Donbass.

 

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