Midterms : si Joe Biden perd le Congrès, "c'est la fin du mandat utile", estime un ex-ambassadeur de France à Washington
Si les Républicains l'emportent à la Chambre, confirmant les pronostics, le président démocrate Joe Biden sera condamné à l'élection jusqu'au terme de son mandat, explique Gérard Araud, ambassadeur de France à Washington de 2014 à 2019.
Selon Gérard Araud, ambassadeur de France à Washington de 2014 à 2019, invité mardi 8 novembre sur franceinfo, si le président américain perd la majorité au Congrès lors des élections de mi-mandat, "c'est la fin du mandat utile de Joe Biden, il sera très largement condamné à l'inaction". À deux ans des prochaines élections présidentielles, les Américains doivent désigner mardi une large partie de leurs représentants au Congrès. Alors que Donald Trump rêve d’une revanche en 2024, Joe Biden joue gros.
franceinfo : Joe Biden peut-il s’en sortir ?
Gérard Araud : Le terrain est lourd comme on dit au football. D'abord parce que dans les élections de mi-mandat, en général, l'administration en place se fait battre très généralement. Vous y ajoutez l'inflation à 8,5%. Vous ajoutez la criminalité qui est en hausse et le fait que Joe Biden est discuté parce qu'il montre à l'évidence des faiblesses. Il a fait des gaffes, a des absences et donc on commence à douter de lui. Tous les sondages donnent en effet très vraisemblablement la chambre basse aux républicains. En ce qui concerne le Sénat, ce sera peut-être un peu plus disputé.
Si le président américain perdait le contrôle du Sénat et de la Chambre des représentants, serait-il condamné à l'inaction ?
Il sera très largement condamné à l'inaction. Le système américain fait que le président ne peut pas dépenser 1 dollar sans l'approbation du Congrès.
"Si le Congrès est Républicain, ce sera un Congrès extrêmement polarisé, c'est-à-dire un Congrès de combat qui n'acceptera aucun compromis avec le président."
Gérard Araud, ex-ambassadeur de France à Washingtonà franceinfo
Ce sera vraiment le blocage des institutions américaines, et cela jusqu'à la présidentielle de 2024. On peut quasiment affirmer que c'est la fin du mandat utile de Joe Biden s’il perd le Congrès.
Certains évoquent une procédure de destitution contre le président américain. Est-ce qu'il faut s'attendre à ce que les Républicains rendent impossible la fin du mandat de Joe Biden ?
Totalement ! La polarisation politique aux États-Unis est extrême. Un certain nombre de députés trumpistes veulent faire payer à Biden les deux procédures de destitution qui avaient été lancées par les démocrates sous la présidence de Donald Trump. Ils veulent prendre leur revanche. Il n'y a aucune base pour, évidemment, lancer une procédure de destitution. C'est simplement de la vengeance, c'est de la haine dans une vie politique ou les deux parties ne se parlent plus. Ils n'ont plus rien en commun.
Quel est le poids aujourd'hui de Donald Trump dans cette campagne des Républicains ?
Une bonne partie des Républicains, au fond, préférerait que Donald Trump disparaisse de la vie politique, étant donné qu'il est quand même un personnage extrêmement controversé, et en particulier dans certains milieux conservateurs qui n'acceptent pas ses excès, ses foucades, ses vulgarités. Mais il exerce un contrôle très ferme sur les militants du parti. Or, aux États-Unis, les élus, avant de se faire élire, doivent passer par les primaires du parti. Et ces primaires du parti sont dominées par les militants qui sont en général trumpistes, ce qui donne à Donald Trump une très forte influence sur le Parti républicain. Même si les dirigeants de celui-ci ne peuvent pas le supporter.
Donald Trump se prépare-t-il pour 2024 ?
Il veut y retourner depuis le début pour prendre sa revanche sur Joe Biden. Sa candidature ne fait aucun doute. Est-ce qu'il gagnera les primaires républicaines ? Il a de fortes chances de l'emporter.
"Se présenter contre Donald Trump dans des primaires, c'est risquer gros face à des militants fanatisés et face à la brutalité, au caractère extrêmement vindicatif de Donald Trump."
Gérard Araudà franceinfo
Et parmi les Républicains, celui dont on parle tout le temps, c'est le gouverneur de Floride, Ron DeSantis. Je ne suis pas sûr qu'il ose franchir le pas parce qu'après tout, il peut préférer être tout simplement le vice-président d'un candidat, Donald Trump, pour ensuite se présenter quatre ans plus tard.
Est-il possible que certains candidats républicains refusent de reconnaître leur défaite s'ils sont battus comme l'avait fait Donald Trump ?
C'est même probable. Il peut même y avoir des incidents dans les centres de vote. Les Républicains peuvent décider sous prétexte qu'il y aurait pu avoir des fraudes de se ruer vers les centres de vote pour prétendument veiller à ce qu'il n'y ait pas de fraude. Or, aux États-Unis, tout le monde est armé, donc on ne peut pas exclure des incidents au cours du dépouillement parce qu'en plus ce dépouillement se fait de manière très artisanale. Chaque État organise les élections comme il le veut et cela veut dire que dans certains États, on met plusieurs jours à connaître le résultat. Ce qui, évidemment, donne le temps à toutes les théories du complot. On peut en effet avoir certains candidats imitant Donald Trump et refusant le résultat des élections.
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