Ultimatum américain sur le nucléaire iranien : "Les Européens ne vont pas jouer le jeu de Trump"
L'ancien ambassadeur français en Iran, François Nicoullaud, a expliqué, samedi sur franceinfo, que Donald Trump a l'"obsession de détruire systématiquement tout ce qu'a fait Obama".
Il est "peu réaliste" que l'Iran cède à l'ultimatum de trois mois imposé par Donald Trump, a estimé François Nicoullaud, samedi 13 janvier sur franceinfo. L'analyste en politiques internationales et ancien ambassadeur de France en Iran ne voit pas les Européens "jouer le jeu de Trump", alors que ce dernier a annoncé, jeudi soir, lever "pour la dernière fois", dans le cadre de l'accord sur le nucléaire signé en 2015, les sanctions économiques qui visent l'Iran.
franceinfo : Qu'est-ce que ce nouvel épisode a de différent par rapport aux autres ?
François Nicoullaud : La date finale de l'ultimatum se rapproche puisque, techniquement, Trump, dans trois mois, aura de nouveau à prendre la décision de maintenir, ou non, les sanctions qui s'appliquent à l'Iran. Il faut donc que, dans cette période, pour le satisfaire, l'Iran concentre un certain nombre d'obligations supplémentaires concernant son programme nucléaire et son programme balistique. Pour cela, Trump demande à la fois au Sénat, au Congrès, et à ses alliés européens, de faire pression sur l'Iran pour que le pays cède et accepte toute une série de contraintes supplémentaires. Ceci paraît malheureusement peu réaliste.
Les Européens sont-ils disposés à aider Donald Trump, malgré sa forte impopularité au niveau mondial ?
Non. Manifestement, les Européens ne vont pas jouer le jeu de Trump. Peut-être feront-ils un essai auprès des Iraniens, un dernier test pour voir s'ils sont prêts à faire quelques concessions, à trouver quelques petits gestes qui pourraient amadouer Trump, mais ça n'ira pas au-delà. De même, on va voir si le Sénat arrive à se mettre d'accord sur une nouvelle loi encadrant le programme iranien. Jusqu'à présent, ils n'y sont pas arrivés. L'horizon s'assombrit donc et on peut imaginer que Trump décide de sortir de l'accord dans trois mois.
D'un côté, l'Europe ne peut pas s'afficher soutenant Téhéran et, dans le même temps, ne peut pas suivre Donald Trump. Y a-t-il une forme de piège ?
Les Européens, jusqu'à présent dans cette négociation, ont toujours joué le jeu de dire que nous avons beaucoup de problèmes avec l'Iran, mais la question nucléaire est séparée du reste. C'est d'ailleurs la position, il ne faut pas l'oublier, des Chinois et des Russes, également parties de l'accord.
Est-on, ici, uniquement dans un cadre un peu puéril d'un Donald Trump qui veut uniquement effacer l'héritage Obama ?
Il y a cette obsession chez Trump de détruire systématiquement tout ce qu'a fait Obama. Il va peut-être y arriver, encore que la question se pose. Si les Américains se retirent de l'accord, il y a deux possibilités : ou les Iraniens s'en retirent et il n'y a plus d'accord, ou les Iraniens continuent avec les autres parties à l'accord, c’est-à-dire les Européens, les Russes et les Chinois. On aurait alors un accord qui continuerait à avancer, en quelque sorte, sur trois pattes. Cela marcherait plus mal, mais cela serait quand même un moindre mal. En tous cas, le reste du monde, en dehors des États-Unis, continuerait à développer des relations à peu près normales sur le plan économique, commercial et même sur le plan politique avec l'Iran.
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