Mort de Yasser Arafat : la justice française ouvre une instruction pour "assassinat"
La veuve du leader palestinien avait déposé plainte contre X, à Nanterre, le 31 juillet.
JUSTICE - Une information judiciaire pour assassinat concernant le décès de Yasser Arafat en 2004 a été ouverte, mardi 28 août, par le parquet de Nanterre, selon des sources proches du dossier. Un ou plusieurs juges d'instruction vont être nommés très prochainement. La justice donne ainsi suite à la requête de la veuve du leader palestinien, Souha Arafat, qui a déposé plainte contre X pour assassinat le 31 juillet dernier.
Elle a porté plainte après la diffusion par la chaîne Al-Jazeera d'un documentaire où il apparaît qu'une "quantité anormale de polonium" a été découverte sur les effets personnels de l'ex-dirigeant, mort le 11 novembre 2004 à l'hôpital militaire français de Percy (Hauts-de-Seine). Le film a relancé la thèse d'un empoisonnement, tout comme le compte-rendu d'hospitalisation de Yasser Arafat, publié par le site Slate.fr mardi 28 août.
Pourquoi Yasser Arafat a-t-il été hospitalisé ?
Les premiers symptômes apparaissent à Ramallah (Cisjordanie), le 12 octobre 2004, lorsque le leader palestinien ressent nausées, douleurs abdominales et fièvre. Une première prise de sang ne révèle rien d'anormal. Mais le 18 octobre, le taux de ses plaquettes chute brusquement, pour atteindre 53 000/m3 deux jours plus tard, une concentration anormalement basse (thrombopénie). Un examen de la mœlle oesseuse est pratiqué, mais ne révèle rien de suspect.
Malgré des perfusions et un traitement par corticoïdes, l'état de Yasser Arafat ne s'améliore pas, et sa thrombopénie s'aggrave. C'est à ce moment qu'est prise la décision de le transférer en France, à l'hôpital militaire de Percy.
Que révèle le rapport publié par Slate ?
Le compte-rendu relate l'hospitalisation du leader palestinien dans le service d'hématologie de l'hôpital des Hauts-de-Seine. Le 29 octobre 2004, Yasser Arafat y est admis en urgence pour "l’exploration d’une thrombopénie dans un contexte d’altération de l’état général évoluant depuis deux semaines".
A son arrivée, il est affaibli physiquement mais semble avoir toute sa tête. Face à la persistance des troubles digestifs (qui ont déjà fait perdre plus de 3 kg en deux semaines au leader palestinien), les médecins pratiquent une batterie de tests cliniques.
Le professeur Thierry Revel synthétise les résultats et conclut à une inflammation de la partie basse du tube digestif, des troubles de la mœlle osseuse ainsi qu'à une "coagulation vasculaire disséminée sévère", qui empêche la coagulation et provoque des hémorragies.
Le patient est réhydraté, commence à suivre un traitement médical (antibiotiques, corticoïdes) mais son état s'aggrave le 2 novembre, et il tombe dans un coma profond le lendemain. Transféré en réanimation, Yasser Arafat ne reprendra jamais connaissance et meurt le 11 novembre 2004.
Pourquoi ne connaît-on pas les causes du décès ?
Tout simplement parce que le corps de Yasser Arafat n'a jamais subi d'autopsie scientifique, sans qu'aucune raison ne soit jamais fournie. Sur accord du gouvernement français, les synthèses du dossier médical ont été transmis à Nasser Al-Qidoua, représentant de la Palestine aux Nations unies et neveu de Yasser Arafat.
D'où vient la thèse de l'empoisonnement ?
Cette théorie est née après la découverte de polonium sur des affaires ayant appartenues au leader palestinien après des analyses pratiquées dans un laboratoire de Lausanne (Suisse). Slate précise que le compte-rendu d'hospitalisation montre que les analyses pratiquées sur des échantillons urinaires ont exclu la présence de certains rayonnements radioactifs, même si le polonium n’a pas été spécifiquement recherché dans les examens de l’époque.
Une exhumation pour de nouvelles analyses
Pour tâcher d’y voir plus clair, la dépouille de Yasser Arafat va être exhumée pour subir des analyses biologiques. L'institut de radiophysique du Centre hospitalier universitaire vaudois de Lausanne (CHUV) a confirmé vendredi 24 août qu'il allait examiner le corps après avoir obtenu l'autorisation de sa veuve, Souha Arafat, selon son porte-parole, repris par Le Parisien le 24 août.
Le CHUV attend une "confirmation écrite formelle de l'avocat" avant d'envoyer ses experts en Cisjordanie faire des prélèvements afin de rechercher une éventuelle présence de polonium. Ils ont également reçu le feu vert de l'Autorité palestinienne, qui s’est félicitée de l’ouverture de l'enquête pour assassinat.
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