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Encore ministre, Cahuzac ne coopérait pas à l'enquête lancée sur lui par Bercy

Dans un entretien à "Mediapart", Pierre Moscovici s'explique sur les démarches lancées par ses services après les premières informations du site. Il apparaît notamment que Jérôme Cahuzac a refusé de signer une attestation fiscale dès la mi-décembre.

Article rédigé par franceinfo
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Pierre Moscovici, ministre de l'Economie et des Finances (G), aux côtés de Jérôme Cahuzac, ex-ministre du Budget, et Bernard Cazeneuve, son successeur, lors de la passation de pouvoir entre ces deux derniers, le 20 mars 2013 à Bercy. (MIGUEL MEDINA / AFP)

"Je suis heureux de pouvoir dialoguer avec Mediapart." Pierre Moscovici, ministre de l'Economie et des Finances, s'explique, dimanche 14 avril, dans un entretien accordé au site d'information qui a plongé son ministère dans la tempête de l'affaire Cahuzac.

Il revient sur l'enquête administrative lancée par ses services à la suite des premières révélations de Mediapart, le 4 décembre, et révèle au passage les réticences dont a fait preuve l'ex-ministre du Budget au cours de la procédure. Pierre Moscovici, accusé par certains d'avoir couvert son ancien ministre, entend "démontrer sa bonne foi" dans cette affaire.

Francetv info retrace, à partir des déclarations du ministre, les différentes étapes de vérification suivies par Bercy.

7 décembre : Bercy lance son enquête administrative

Selon Pierre Moscovici, son ministère a lancé les premières mesures de vérification "trois jours après la première publication de l'enquête de Mediapart", le 4 décembre. "Une muraille de Chine a été installée au ministère", explique Moscovici. "Jérôme Cahuzac a été exclu de tout ce qui relevait de son propre dossier et toutes les informations sont revenues à mon niveau." Et ce, à la demande même du principal intéressé, selon Pierre Moscovici.

14 décembre : le fisc demande une attestation à Cahuzac

Pourtant, dès le début de la procédure, le ministre semble peu zélé pour répondre aux demandes de l'administration fiscale.

En particulier, cette dernière demande le 14 décembre à Jérôme Cahuzac d'attester par écrit "d'éventuels 'comptes bancaires ouverts, clos ou utilisés à l’étranger'", selon Moscovici. De l'aveu de ce dernier, Cahuzac "n'y a pas répondu".

Interrogé par Mediapart sur la raison pour laquelle ce refus ne l'a pas "alerté", Pierre Moscovici admet "des doutes". "C’est ce qui nous a conduits à diligenter la demande d’entraide avec la Suisse et à insister fortement pour avoir une réponse rapide", explique le patron de Bercy.

24 janvier : Bercy fait une demande d'entraide à la Suisse

Selon Pierre Moscovici, Bercy songe à "la fin du mois de décembre" à faire appel à la Suisse pour une demande d'entraide administrative, "parce que cela fait trop longtemps que la question est posée et est toujours sur la table". Elle est officiellement adressée le 24 janvier, plus d'un mois après la demande d'attestation faite à Cahuzac et restée sans réponse.

"Il n’était pas logique de le faire avant", explique le ministre pour justifier ce délai. "Je rappelle que notre convention avec la Suisse prévoit que les voies administratives nationales doivent être épuisées avant de demander l’entraide" précise Moscovici, en référence à la demande d'attestation.

31 janvier : une réponse, mais à une question mal posée

L'administration suisse répond le 31 janvier. Entre temps, Pierre Moscovici a conversé par téléphone à deux reprises avec son homologue suisse, explique-t-il. "Je ne lui demande qu'une seule chose : de répondre à notre demande d’assistance technique, et de le faire vite. (...) Parce que nous voulions savoir."

Problème : la réponse des autorités suisses passe à côté du scandale, et blanchit en apparence le ministre. Et pour cause : la question était mal posée. Faisant suite à la demande française, la Suisse atteste que Jérôme Cahuzac n'a pas eu de compte à l'UBS entre 2006 et 2012. Il sera révélé par la suite que le compte au nom de Jérôme Cahuzac était en réalité géré par la banque Reyl, et que son ouverture remontait à une date antérieure.

Accusé d'avoir volontairement restreint le champ de l'investigation, Pierre Moscovici s'est déjà défendu sur ce point au micro de RTL, invoquant les contraintes de la convention d'entraide. "Peut-on me reprocher d’avoir fondé ma requête sur les informations de Mediapart ? (...) Si j’avais su que ce compte pouvait avoir été déplacé dans une autre banque, naturellement, j’aurais posé la question", assure aujourd'hui le ministre face à Mediapart.

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