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Publication du patrimoine des ministres : opération mains propres ou écran de fumée ?

Tous les membres du gouvernement devront détailler leur patrimoine d'ici au 15 avril. Suffisant pour convaincre les Français ?

Article rédigé par Camille Caldini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, arrive à l'Elysée (Paris), le 8 avril 2013. (BERTRAND LANGLOIS / AFP)

Empêtré dans l'affaire Cahuzac, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, promet la transparence totale sur les patrimoines des ministres, "d'ici le 15 avril". Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée en charge des Personnes handicapées, a pris de l'avance en livrant, lundi 8 avril, le détail de ses biens. Dans l'opposition, plusieurs élus et responsables réclament une "opération mains propres" au sommet de l'Etat. La machine de communication est en marche, mais suffira-t-elle à rassurer les Français ? Rien n'est moins sûr, au vu des premières déclarations de patrimoine.

Des déclarations sous-évaluées ?

Valeur des biens immobiliers, soldes des comptes en banque, assurance-vie, marques des véhicules, et même nombre de kayaks pour Eva Joly… Les élus prétendent jouer cartes sur table. Sur son blog, Marie-Arlette Carlotti se déclare propriétaire de deux appartements et d'une maison, évalués à un total de 565 000 euros. La somme paraît faible à certains utilisateurs de Twitter, qui ironisent sur cette estimation :

Sur le même réseau social, le sénateur UMP de Seine-Saint-Denis Philippe Dallier dévoile son patrimoine en trois tweets, lundi. Laurent Wauquiez, député UMP de Haute-Loire, a exposé, la veille, son patrimoine dans les pages du Journal du Dimanche. Là aussi, tout semble y être : un appartement et une maison, le montant du prêt que le couple doit encore rembourser… Il manque pourtant une estimation récente de l'appartement acheté en 2002 et de la maison acquise en 2008, qui donnerait une idée plus précise de la valeur du patrimoine de l'élu.

Par ailleurs, Rue89 s'interroge sur ce que Laurent Wauquiez a choisi de déclarer : "Pourquoi n’y figurent pas d’éventuels diamants, œuvres d’art ou meubles – qui ont une valeur potentiellement plus élevée qu’une voiture dont la cote se dégrade à vue d’œil". L'élu, âgé de 37 ans, n'est peut-être pas un collectionneur. D'autres, comme l'amateur d'art Laurent Fabius, sont attendus au tournant.

Les tricheurs tricheront toujours

"Ce n'est pas ce qu'ils déclarent qui nous intéresse, c'est ce qu'ils ne déclarent pas", remarquent plusieurs utilisateurs de Twitter. Jérôme Cahuzac, le ministre par qui tout a commencé, est par exemple soupçonné d'avoir "omis sciemment de déclarer une part substantielle de son patrimoine", lors de sa prise de fonction à Bercy, en mai 2012. L'ancien ministre du Budget, déjà mis en examen pour "blanchiment de fraude fiscale", risque d'être poursuivi au pénal à cause de ce mensonge.

"Aucun texte ne peut obliger quiconque à dire la vérité ! Pas plus, du reste, que n'importe quelle sanction, si sévère soit-elle", analyse Julie Benetti, professeure de droit public à l'université de Reims et ex-membre de la Commission Jospin sur la rénovation de la vie publique, interrogée par Le Nouvel Observateur.

Les Français n'ont déjà plus confiance

La pente à remonter est raide. La défiance des Français vise en premier lieu l'exécutif, accusé de ne pas savoir gérer la crise politique et morale qu'il traverse. Les cotes de confiance de François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont encore dégringolé, à 29 et 26% d'avis favorables, après les aveux de Jérôme Cahuzac sur son compte suisse.

Mais l'affaire éclabousse au passage toute la classe politique. Selon un sondage Harris Interactive, cité par La Tribune, 75% des personnes interrogées pensent que "l'affaire Jérôme Cahuzac n'est pas qu'une affaire personnelle et a un impact négatif dans la confiance qu' [elles ont] envers les responsables politiques". Il faudra sûrement plus qu'une opération mains propres pour laver la mémoire des électeurs.

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