Reste à charge zéro : les retraités "verront leur cotisation à leur mutuelle augmenter" de près de 10%
Selon le président de Santiane, un cabinet de conseil en mutuelles santé, la promesse d'Emmanuel Macron de rembourser intégralement les lunettes, les soins dentaires et auditives va entraîner mécaniquement une hausse de prix des mutuelles.
"Ce seront les seniors qui en pâtiront le plus, puisque ce sont eux qui sont les premiers concernés", affirme Pierre-Alain de Malleray, le président de Santiane, un cabinet de conseil en mutuelles santé, qui a travaillé sur l'une des promesses d'Emmanuel Macron : le remboursement total des lunettes, prothèses dentaires et auditives, afin de favoriser l'accès aux soins.
Selon l'étude de Santiane, le reste à charge zéro devrait entrainer pour les retraités une hausse des cotisations à leur mutuelle de 9,4% sur l'année, alors que le gouvernement promettait qu'il n'y aurait pas d'augmentation des complémentaires santé.
franceinfo : Vous avez étudié la consommation de 100 000 clients sur deux ans, vous vous êtes concentré sur les contrats individuels, et vous en concluez que la promesse sera intenable. Pourquoi ?
Pierre-Alain de Malleray : C'est relativement simple. Le reste à charge zéro est une promesse attrayante pour les consommateurs. C'est la gratuité totale en matière de soins dentaires, en matière d'optique et en matière d'audioprothèse. Tout cela va coûter de l'argent, et il faut bien que cette dépense soit répartie sur la sécurité sociale et sur la mutuelle. Ce seront les seniors qui en pâtiront le plus, puisque ce sont eux qui sont les premiers concernés. Ils verront leur cotisation augmenter de l'ordre de 9,4% d'ici à 2021. Si l'on prend l'exemple d'un couple de retraités qui paye 170 euros par mois pour sa complémentaire santé individuelle, à terme, la facture annuelle bondirait de 192 euros.
Il y a un effet mécanique, parce que ce sont bien eux qui ont le plus recours aux dépenses de santé ?
Absolument. Rien n'empêche les assureurs, les mutuelles de lisser cette augmentation, de la répartir sur différentes classes d'âge, de faire payer peut-être un peu plus les moins de 60 ans. Les mutuelles et les complémentaires santé sont des organismes libres de leur politique. Nous ne disons pas que chaque tarif va augmenter dans cette proportion-là, mais nous disons que c'est l'ordre de grandeur de la dépense supplémentaire qu'il va falloir financer pour payer le reste à charge zéro. Il ne faut pas voir uniquement le verre à moitié vide : il y a des cotisations qui vont augmenter, mais en face, il y a un vrai progrès pour l'accès aux soins. Nous parlons d'une gratuité totale sur un certain nombre d'actes, des soins optiques, dentaires et audioprothésistes. L'un des axes principaux de cette réforme, c'était de demander des efforts à tout le monde.
Et ceux qui ne pourront pas se payer ces complémentaires santé pourraient renoncer aux soins ?
Une partie de ceux qui renoncent aujourd'hui continueront bien sûr à le faire, mais nous pensons que le renoncement aux soins va reculer. Les mutuelles sont très largement répandues aujourd'hui : il y a 95% de la population française qui a souscrit aujourd'hui à une mutuelle. Nous ne nous attendons pas à ce qu'il y ait un renoncement massif à l'acquisition d'une mutuelle, en revanche, nous pouvons nous attendre à ce que des contrats non responsables, qui n'appliquent pas le reste à charge zéro, se développent pour un prix beaucoup plus abordable.
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