En accédant à des responsabilités ministérielles, les écologistes doivent revoir leur rapport au pouvoir
Deux écologistes ont obtenu, mercredi 16 mai, des ministères : Pascal Canfin comme ministre délégué chargé du développement, et Cécile Duflot, ministre de l'égalité, des territoires et du logement. Comment va évoluer leur rapport au pouvoir ?
Les écologistes d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) n'avaient pas occupé de responsabilités ministérielles depuis le gouvernement de Lionel Jospin.
Deux d'entre eux occupent depuis mercredi soir des responsabilités ministériels dans un gouvernement socialiste : Pascal Canfin au poste de ministre délégué chargé du Développement, et surtout Cécile Duflot en charge de l'égalité, des territoires et du logement.
Secrétaire nationale d'EELV, Cécile Duflot fait donc entrer au gouvernement son turbulent mouvement, allié au Parti socialiste malgré de profondes divisions, notamment sur la question du nucléaire. Cela risque d'en agacer plus d'un, à commencer par une partie de ses militants qui refusaient encore en mars de servir de "marchepied" aux "ambitions" de ses dirigeants.
Après avoir revendiqué un rapport différent à la politique, les écologistes doivent désormais assumer le fait que leurs cadres soient entrés au gouvernement. La patronne d'Europe Ecologie-Les Verts entame donc une partie délicate pour son parti : celle de l'épreuve du pouvoir et du pragmatisme.
Une "secte" de professionnels de la politique ?
Les cadres d'EELV ont fait beaucoup durant le second tour pour apparaître comme des alliés loyaux envers le Parti socialiste, allant jusqu'à tracter sur les marchés en faveur de François Hollande et faire voter par le Conseil fédéral le principe d'une participation au gouvernement début mai.
Ce faisant, ils ont pris le risque de faire passer le parti pour une "secte" de professionnels de la politique ambitionnant le pouvoir.
Réagissant aux critiques, l'actuel porte-parole du parti, Pascal Durand, pressenti pour devenir le prochain secrétaire national à la place de Cécile Duflot, s'est défendu mercredi.
"On n'a pas eu le temps de théoriser notre participation au gouvernement, a-t-il dit. C'est l'un de nos chantiers à venir, nous devrons mettre en perspective notre rapport au réformisme et au pouvoir." "On ne peut pas désirer changer le monde et ne pas vouloir se salir les mains", a-t-il ajouté.
De la résistance au réformisme
L'évolution n'est pourtant pas évidente pour ce parti politique. Issu du militantisme citoyen, il s'est en partie construit dans la culture du contre-pouvoir.
Ses grandes figures historiques restent José Bové, chantre de la désobéissance civile dans la lutte contre les OGM entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, et Noël Mamère, ancien journaliste devenu maire de Bègles où il a célébré en 2004 le premier mariage gay, annulé par la justice par la suite.
Mais les rapports de force ambigus qu'entretiennent les écologistes avec les socialistes, habitués à gouverner avec ces derniers dans les assemblées locales, vont se déplacer progressivement au Parlement, et surtout, au gouvernement.
Cécile Duflot, et Pascal Canfin dans une moindre mesure, devront faire preuve de solidarité gouvernementale alors que certaines décisions politiques pourraient aller à l'encontre de leurs convictions écologistes.
"Son défi [de Cécile Duflot, ndlr], notre défi, sera de garder notre fraîcheur et de montrer qu'on peut être différent dans l'exercice du pouvoir" déclare Stéphane Sitbon, son plus proche conseiller, dans l'Express.
"Elle a beau être mon amie, l'heure de l'épreuve de vérité a sonné", conclut-il.
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