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Affaires Fillon : "Jamais un candidat n'a conduit une campagne de cette manière"

Empêtré dans une affaire d'emplois présumés fictifs de son épouse et de ses enfants, le candidat Les Républicains François Fillon est dans "une situation intenable", juge le politologue Olivier Ihl mardi, sur franceinfo. 

Article rédigé par franceinfo
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François Fillon, lors de sa visite sur l'île de la Réunion, en février 2017.  (AFP)

Sur franceinfo, mardi 14 février, Olivier Ihl, politologue à Sciences Po Grenoble, auteur du livre Une histoire de la représentation, a estimé que François Fillon, le candidat Les Républicains à la présidentielle, "ne parvient pas à reprendre la main" dans l'attente de la décision du parquet financier dans l'affaire d'emplois présumés fictifs de son épouse et de ses enfants. Et qu'il lui sera difficile de "conquérir un autre public".

franceinfo : Quand on en est au point d'annuler des rencontres prévues à chaque déplacement pour éviter les confrontations, est-ce qu'on appelle encore ça une campagne électorale ?

Olivier Ihl : C'est tout sauf une campagne électorale normale. Jamais, sous la Ve République, un candidat n'a conduit une campagne de cette manière. François Fillon est aujourd'hui au pied du mur. Ses réunions publiques sont, soit empêchées, soit perturbées. Elles sont de plus en plus espacées. Il suffit de regarder le site de sa campagne pour constater que l'agenda, qui propose les réunions à venir, est presque vide. La prochaine a lieu demain mais la suivante est le 24 février. Il n'est pas, à l'heure actuelle, en mesure de relever le défi qu'il s'est donné, c'est-à-dire séduire à nouveau son propre camp et l'opinion publique.

Certains politiques, dans son camp, préfèrent ne pas l'avoir chez eux, à l'image de Brice Hortefeux. Est-ce le signe que ses arguments ne prennent pas ?

Cette stratégie, qui a d'ailleurs changé depuis trois semaines, ne fonctionne pas. Il ne parvient pas à reprendre la main, il se trouve dans les cordes, à la merci d'une décision du parquet financier et subit la pression de plus en plus forte de son entourage, car on s'approche d'un temps qui sera irréversible. La situation est intenable pour lui.

Mais on a l'impression que les frondeurs de son propre camp n'ont pas plus de solution que François Fillon...

Non, car il est le candidat vainqueur de la primaire. Il a pris le leadership sur le parti. Il a donc tous les atouts en main.

Personne ne peut le faire changer de cap, même s'il va droit dans le mur. C'est précisément ça l'impasse Fillon aujourd'hui.

Olivier Ihl, politologue à Sciences Po Grenoble

à franceinfo

Même si on le voit, dans les sondages, le candidat Fillon ne s'est pas effondré. L'écart reste assez faible avec Emmanuel Macron ?

C'est vrai. Il y a une inconnue sur l'électorat très friable d'Emmanuel Macron. Les recompositions ne sont pas complètement actées du côté de la gauche et puis reste l'incertitude François Bayrou. On ne sait pas encore s'il va se présenter. Donc l'offre électorale n'est pas cristallisée et c'est ça la seule chance de François Fillon. Maintenant, dépendre des autres pour conduire sa campagne, ce n'est pas un signe de force.

Le noyau dur de la droite va-t-il quand même voter pour lui ?

Sur les 4,6 millions d'électeurs qui le soutiennent depuis la primaire, on le sait, un tiers s'interroge aujourd'hui. Et le défi pour François Fillon, c'est de passer à 8 ou 9 millions d'électeurs. Il lui faut conquérir un autre public, sociologiquement différent, avec des opinions qui ne sont pas les mêmes, et c'est là que le bât blesse. Pour conquérir cet électorat plus centriste, il faut donner des gages, en particulier en terme d'exemplarité et c'est ce qu'il ne parvient pas à faire.

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