Trois parlementaires UMP soupçonnés d'avoir caché des comptes en Suisse
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique a transmis les dossiers des députés Bernard Brochand et Lucien Degauchy, ainsi que du sénateur Bruno Sido après avoir émis des "doutes" sur leurs déclarations de patrimoine.
"Un doute sérieux quant à l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité" des déclarations de patrimoine des trois élus UMP. La Haute autorité pour la transparence de la vie publique(HATVP) annonce, jeudi 13 novembre, avoir transmis les dossiers des députés Bernard Brochand et Lucien Degauchy et du sénateur Bruno Sido au procureur de la République de Paris. Le parquet de Paris a décidé d'ouvrir des enquêtes préliminaires sur les déclarations de patrimoine de Lucien Degauchy et le Bruno Sido. Pour Bernard Brochand, le ministère public n'a, pour l'heure, pas pris de décision.
Leurs déclarations de patrimoine ont omis des "avoirs détenus à l'étranger", souligne l'institution. Il s'agit de faits "susceptibles de constituer des infractions pénales", précise-t-elle dans un communiqué de presse. Omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou en fournir une évaluation mensongère est passible de trois ans de prison et 45 000 euros d'amende. Les récalcitrants s'exposent aussi à l'interdiction d'exercer une fonction publique.
Voici, en détail, ce que reproche la Haute autorité aux trois élus UMP et leur réaction.
Lucien Degauchy plaide la bonne foi
A la fin octobre, dans les colonnes du Monde, Lucien Degauchy reconnaissait avoir eu un compte non déclaré en Suisse, affichant un solde de 100 000 euros. "C'était un héritage, je n'ai d'ailleurs jamais versé un centime dessus, expliquait l'élu de l'Oise au quotidien. En 1981, au moment où Mitterrand faisait peur à tous les commerçants, mon père, maraîcher, avait ouvert un compte à la Banque cantonale de Genève et l'a mis à mon nom."
L'argent devait servir à ses enfants, "en cas de besoin". En 2013, les serres et récoltes de son fils sont détruites par un orage de grêle. "J'ai pensé que les dernières volontés de mon père allaient pouvoir être exaucées, assure Lucien Degauchy. J'ai régularisé la situation, payé les droits et les pénalités – près de 30% – et j'ai fermé ce compte. Aujourd'hui, on me reproche de ne pas l'avoir déclaré plus tôt."
Mais pour Mediapart, le député "a quelque peu enjolivé l'histoire". Selon le site, le compte contenait 200 000 euros avant le rapatriement, une somme contestée par l'élu qui évoque maintenant "138 000 ou 148 000 euros". Mediapart précise aussi que Lucien Degauchy n'a jamais mentionné ses avoirs en Suisse depuis sa première élection en tant que conseiller général. Soit depuis 1985.
Bernard Brochand critique la publication du patrimoine
C'est le cas le plus lourd. L'ancien maire de Cannes, âgé de 76 ans, est soupçonné d'avoir dissimulé d'importants avoirs en Suisse à la banque UBS. Selon L'Express, le compte aurait été ouvert il y a plus de quarante ans et son solde dépasserait le million d'euros.
Dans une tribune rédigée peu après l'affaire Cahuzac, le député des Alpes-Maritimes assurait avoir "toujours déclaré, depuis 2001, mon patrimoine au cours de mes quatre mandats successifs". Il affirmait alors être contre la publication du patrimoine des élus. "Cela ne ferait que dresser les Français les uns contre les autres en rappelant des heures sombres de notre histoire", estimait-il.
Cette transmission judiciaire est une nouvelle épine dans le pied de l'élu, déjà inquiété dans le cadre d'une information judiciaire ouverte pour corruption. Un juge cannois a demandé la levée de son immunité parlementaire, en vain, rappelle Libération.
Bruno Sido évoque une question "familiale et privée"
Bruno Sido, par l'intermédiaire de son avocat, a indiqué avoir omis dans une déclaration de patrimoine remontant à 2011, l'existence d'un "compte à la banque cantonale vaudoise" dont il avait hérité de son père en partie. "C'est un héritage, je n'ai jamais alimenté moi-même ce compte dormant", précise-t-il à Mediapart, précisant que le compte contenait environ 150 000 euros.
Le sénateur UMP a procédé à une régularisation en juillet 2013, ce qui aurait débouché sur un rapatriement effectif des fonds "à la fin 2013". "De mémoire, j'ai payé 26 000 ou 28 000 euros de pénalités", assure-t-il. "Il ne s'agit en aucune façon d'argent public, ni d'un sujet lié à ses mandats électifs, mais, au contraire, d'une question d'ordre familial et privée", a précisé sa défense. Si l'élu a bien rempli sa déclaration de 2014, la Haute autorité lui reproche d'avoir caché sa situation auparavant.
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