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La stratégie numérique d'Arnaud Montebourg

Les réponses du député de Saône-et-Loire et candidat à la primaire socialiste à notre questionnaire sur sa vision d'Internet et des réseaux sociaux dans la campagne présidentielle.
Article rédigé par Francetv 2012
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Arnaud Montebourg, député de Saône-et-Loire et candidat à la primaire socialiste. (AFP - Jean-Pierre Muller)

Les réponses du député de Saône-et-Loire et candidat à la primaire socialiste à notre questionnaire sur sa vision d'Internet et des réseaux sociaux dans la campagne présidentielle.

Quelle sera votre présence sur le numérique et en particulier sur les réseaux sociaux pour votre campagne électorale ? Utilisez-vous déjà Twitter et/ou Facebook ?

J'ai souhaité investir dans cette campagne des primaires ouvertes à tous les citoyens, le débat public qui se noue sur Internet au contact de ceux-ci.
En plus de mon blog personnel que je tiens depuis 2008, mon équipe web et moi-même multiplions les occasions d'expression et d'échanges entre les internautes et avec eux. Nous avons lancé le 20 novembre à l'occasion de ma déclaration de candidature et en appui de la sortie du livre «Des Idées et des Rêves – Comment bâtir la nouvelle France » le site www.desideesetdesreves.fr.

Nous avons fait de même pour le dernier ouvrage « Votez pour la démondialisation » avec le site www.demondialisation.eu.Un nouveau site de campagne sera lancé à l'occasion de la fête de la rose de Frangy-en-Bresse le 21 août qui deviendra le vaisseau amiral pour la dernière ligne droite, la principale, de ces primaires citoyennes.
Par ailleurs, l'équipe de campagne et les volontaires sont également présents par le biais de nombreux blogs collectifs ou personnels et même d'une édition participative sur Médiapart intitulée « NOS idées et NOS rêves ». Je prévois d'y ouvrir un blog spécifique très prochainement.
La vidéo est un outil très précieux sur Internet. Je dispose donc d'un espace sur où plus de 80 vidéos ont déjà été publiées depuis novembre 2010 dont certaines vues par plus de 25 000 personnes.

Je suis sur depuis la fin de l'année 2007 au début, comme tout le monde, par un profil personnel et, depuis 2009, en raison du trop grand nombre d'amis et de sollicitations, par une page officielle de soutien. J'y publie presque quotidiennement des informations ou mes réactions à l'actualité. Je consulte régulièrement et personnellement les commentaires et publications des internautes.
Les équipes de volontaires ont lancé sur Facebook de nombreux groupes collaboratifs (dans chaque département) et plusieurs pages de soutien notamment sous l'intitulé « des idées et des rêves ».
Je suis sur Twitter depuis août 2009 sous le pseudo que j'administre et pour lequel je tweete personnellement.Je suis également sur lacoopol, le réseau social du PS. Le mouvement des volontaires s'y est également structuré et organisé.
Dans un campagne électorale moderne, qui plus est à l'occasion de primaires ouvertes à tous les citoyens non adhérents aux partis politiques, Internet n'est pas seulement un média. Il est un outil de recrutement, de mobilisation et de coordination des volontaires et des équipes qui font campagne sur le terrain.

Pensez-vous que l'élection présidentielle puisse se jouer sur internet ? A vos yeux, le débat démocratique dans le monde virtuel est-il au moins aussi important que dans le monde réel ?
Internet jouera, plus que jamais, un rôle très important dans la campagne. Les médias traditionnels et plus généralement les citoyens ont transformé leurs usages et leurs pratiques ces dernières années sous l'influence d'internet.
Il n'est plus possible de considérer Internet comme étant un média ou un espace à part. Médias traditionnels, internet, discussions privées, réunions publiques, actions locales de campagne... interagissent entre eux et sont désormais imbriqués.

Les réseaux sociaux en particulier joueront un rôle central dans l'information des citoyens, la diffusion d'idées nouvelles et de propositions qui font évoluer l'esprit public et surtout dans la constitution des opinions de chaque citoyen notamment en décuplant et, pourrait-on dire, en numérisant le bouche à oreille.

Aux Etats Unis, quand tout l'establishment médiatique Washingtonien ignorait Obama, internet portait ses idées. Quand dans la bataille pour la reconquête par la gauche italienne de Milan, tous les medias étaient contrôlés de près ou de loin par Berlusconi, la victoire a été construite et acquise sur internet, car les citoyens n'ont plus confiance dans les medias actuels. Il en est de même en France. La bataille réelle et profonde des présidentielles se déroulera sur internet...

Par ailleurs, ces nouveaux usages et ces nouvelles possibilités d'échange créent et nourrissent, un nouveau rapport avec la politique, le débat d'idées, l'espace public et les responsables politiques. C'est également une transformation démocratique profonde qui est à l'œuvre et dont les responsables politiques doivent désormais tenir compte dans l'approche de tous les sujets de fond.

C'est la raison pour laquelle j'ai proposé dans le projet de VIe République la libération générale des données publiques, souvent appelée Open Data, (du nom du programme de l'administration Obama) afin que la transparence devienne la règle et le secret l'exception. La libération des données publiques est un énorme progrès démocratique car permet le contrôle par les citoyens sur l'action publique, et améliore la performance dans l'usage de l'argent public et dans la décision publique. Il est aussi une source importante de développement économique car le numérique est un vivier considérable d'emplois, de services, de technologie, de recherche et d'activité. J'ai ainsi mis en oeuvre ce chantier ambitieux dans mon Département de Saône-et-Loire que je préside depuis 2008 et qui concrétisera sa libération générale de ses données publiques « open data 71 » au début du mois d'octobre prochain.

Que pensez-vous des considérations qui veulent qu'internet soit une poubelle à rumeurs, une caisse de résonnance pour tout et n'importe quoi, ou bien un réseau d'intelligence sociale ?
Méfions nous des réflexes conservateurs dogmatiques de diabolisation. Il ne faut pas pour autant verser dans l'angélisme ou l'idéalisation d'une technologie quelle qu'elle soit. Il faut simplement comprendre que la numérisation, la démocratisation de l'accès à l'information et de sa production, l'accélération des temps médiatiques transforment notre rapport aux autres et donc à la démocratie. Associer ce mouvement de fond au bien ou au mal empêche de comprendre cette révolution.

Il faut plutôt y voir un défi lancé aux citoyens, et parmi eux aux responsables publics, qui devront faire preuve de maturité, de créativité et d'intelligence. Par nature, Internet permet, voire impose, la notion de contre-pouvoir et donc de responsabilité. Et internet n'est pas au dessus des lois de la presse qui, même si celles-ci datent de 1881, ont été adaptées par la justice actuelle. Quiconque s'exprime sur internet se place sous la menace d'être contredit et critiqué à son tour. C'est finalement une formidable expérimentation de la discussion démocratique, dont notre pays a grandement besoin pour créer, inventer et prendre des décisions pertinentes et solidement établies, car discutées. Internet est donc non seulement un véhicule mais aussi un carburant pour la discussion démocratique.

Êtes-vous pour ou contre une régularisation du web ? Êtes-vous pour ou contre un amendement ou un prolongement de la loi Hadopi ?
Parler de « régularisation » est hors sujet. Internet dispose actuellement de règles propres, qu'elles soient de l'ordre de la Loi, de la technologie ou des usages. Internet est aussi et surtout sujet à la règle de droit générale. Internet n'est donc pas l'anarchie que les conservateurs, souvent soit ignorants soit mal intentionnés, veulent y voir. Les droites mondiales et les intérêts financiers qui les accompagnent ont pris le contrôle des medias audiovisuels, la stratégie Foxnews, de diffusion des thèmes idéologiques des droites, ayant été répétée dans de nombreux pays, même si l'affaire des écoutes en Grande Bretagne l'a durablement affaiblie. Les mêmes qui ont pris le contrôle des medias voudraient contrôler internet.

La tentation du tout sécuritaire en vue de brider cet espace de liberté est non seulement condamnable mais aussi vouée à l'échec. C'est d'ailleurs précisément la raison pour laquelle je me suis abstenu d'approuver la loi dite HADOPI. Cet aspect de la loi suffit à lui seul pour envisager une abrogation.

Mais cela ne répondra en rien aux nouveaux enjeux économiques et sociaux que pose le numérique à la création et à la culture en France. Le statut quo ou le simple retour en arrière (à avant HADOPI) ne résoudront rien ni du côté de la création, ni du côté de la « consommation » culturelle, sur internet notamment.

Il nous faudra donc inventer un nouveau système permettant à la création d'être justement rémunérée, car celle-ci rappelons-le n'est pas gratuite, pour vivre voire se développer et garantissant l'accès à la culture pour le plus grand nombre et le respect des libertés publiques. A ce jour, il y a beaucoup d'intérêts divergents mais aucune recette miracle. Nous devrons y travailler. En ce qui concerne la culture, j'ai fait des propositions précises pour permettre le financement de la création. Je propose notamment une taxation culturelle sur les industries de la culture, par des centimes prélevés sur les bénéfices publicitaires des télévisions privées, les profits gigantesques des fournisseurs d'accès à Internet et les produits industriels diffuseurs de culture comme ceux d'Apple.

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