Les députés ont voté après une séance houleuse la réforme portant l'âge de départ à la retraite à 62 ans
Le texte doit maintenant être discuté par le Sénat en octobre dans le cadre de l'urgence décrétée par le gouvernement sur ce texte (une seule lecture).
En début de séance, le président de l'Assemblée a justifié sa décision d'interrompre les explications individuelles de vote devant des élus de l'opposition portant leur écharpe tricolore.
La séance de vote
Après les explications de vote de chaque groupe parlementaire, à l'exception du PS qui a refusé de s'exprimer après l'incident de ce matin, les députés ont adopté la réforme des retraites en France, par 329 voix contre 233. Les groupes UMP, à l'exception des partisans de l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin qui se sont abstenus et ceux du Nouveau centre (NC) ont voté pour. Nicolas Dupont-Aignan, François Bayrou et Jean Lassale ont voté contre. Les groupes PS et de la gauche démocrate et républicaine (GDR, PC et Verts) ont voté contre ce projet de loi.
Avant le vote, le président de l'Assemblée Nationale a justifié devant les députés, dont ceux de l'opposition qui affichaient leur écharpe d'élus de la nation, sa décision de mettre un terme dans la matinée au débat. Un débat qui promettait de durer puisque chaque parlementaire pouvait s'exprimer cinq minutes.
Les responsables de groupe se sont ensuite exprimés tour à tour. Yves Cochet (verts) a affirmé: ""vous avez mis fin au débat ce matin dans des conditions anticonstitutionnelle". Il a été suivi de Jean-Marc Ayrault (PS) qui est intervenu en lançant : "Je monte à cette tribune que ce matin, Bernard Accoyer a interdit à 142 députés de la Nation. Aujourd'hui notre République est abîmée. Notre République perd ses repères lorsque des ministres confondent l'intérêt général et l'intérêt de l'UMP"". Les parlementaires s'exprimaient devant un hémicycle comble dans une atmosphère survoltée.
En réponse aux attaques de l'opposition, le patron des députés UMP s'est de nouveau "indigné" du fait que des eurodéputés français aient "voté une motion" qui condamne la France pour l'expulsion de Roms. Il a même évoqué l'affaire Bousquet.
Les députés PS avaient auparavant formellement demandé mercredi la démission du président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer, l'accusant de "forfaiture" après qu'il ait levé d'autorité la séance sur la réforme des retraites, empêchant les députés d'exprimer individuellement leurs explications de vote.
"Tout vient de l'Elysée. Bernard Accoyer s'est comporté comme un chef de clan", a accusé le patron du groupe Jean-Marc Ayrault.
Les débats de la nuit
Avant que Bernard Accoyer (UMP) ne suspende la séance, la tension était déjà montée d'un cran auparavant entre Eric Woerth et le groupe PS.
Après cet incident, Martine Aubry a demandé "aujourd'hui solennellement à M. Accoyer, président de l'Assemblée nationale, qui est là pour faire respecter les règles qui sont dans la Constitution, de revenir sur sa décision (de suspendre les débats). On s'assied sur tous les contre-pouvoirs, les médias, le Parlement, l'opposition. Ce n'est pas possible", a-t-elle dit, avant d'insister: "je lui demande de reprendre la séance".
Mercredi matin vers 6h20, la députée socialiste de la Vienne, Catherine Coutelle, s'en était pris au ministre du Travail sur la retraite des femmes: "Vous nous avez habitué à mentir. Chez vous cela semble une seconde nature".
Eric Woerth avait alors réagi vivement. Des députés PS ont accusé le ministre du Travail d'avoir traité leur collègue Mme Coutelle de "collabo".
"Après les mensonges on passe aux injures, où vous arrêterez-vous, M. le ministre?", a notamment lancé la députée socialiste Laurence Dumont, réclamant en vain des excuses à M. Woerth.
Manifestation à la Concorde
Quelques milliers de salariés et militants syndicaux étaient rassemblés mercredi à la mi-journée place de la Concorde face à l'Assemblée nationale, pour exhorter les députés à ne pas voter la réforme des retraites dont l'adoption était prévue dans la journée.
L'incident de séance qui a cloturé le débat sur les retraites fait suite à la réforme du travail législatif en 2009. Point clé de cette réforme, issue de la modification constitutionnelle de 2008, la limitation du temps des débats, appelée "temps législatif programmé". Alors que cette mesure est contestée par la gauche, qui dénonce un "bâillonnement" de l'opposition, la majorité en revanche y voit une rationalisation du travail parlementaire.
Cette discussion avait été riche en incidents. Les élus de l'opposition ainsi boycotté deux séances des questions au gouvernement, une première, tout comme le vote de la réforme, finalement adoptée avec les seules voix de la majorité.
Pour faire taire les voix discordantes au sein de la majorité, l'UMP avait alors accepté une seule concession -justement au coeur des débats de mercredi matin - à l'instigation du député UMP Thierry Mariani: le droit pour chaque député de s'exprimer durant 5 minutes une fois le débat terminé. C'est cette disposition qui a été brutalement interrompue mercredi matin.
Voir notre dossier sur les retraites
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.