Pourquoi Hollande risque de renoncer à la proportionnelle
Selon le "Canard enchaîné", le chef de l'Etat a expliqué à des proches qu'il ne souhaitait plus introduire une dose de proportionnelle à l'Assemblée. Francetv info revient sur les trois raisons qui l'ont poussé à changer d'avis.
"J'avais indiqué pendant la campagne [présidentielle] que j'étais favorable à l'introduction d'une part de proportionnelle. J'y suis prêt, si une majorité peut s'accorder sur cette orientation." Cette phrase, François Hollande l'a prononcée dans un entretien accordé au journal Le Monde, pas plus tard que le 20 août. Quatre mois plus tard, le chef de l'Etat a visiblement changé d'avis. Selon les informations du Canard enchaîné, mardi 30 décembre, le président de la République "s'est montré catégorique" ces derniers jours auprès de plusieurs proches : plus question de toucher au mode de scrutin législatif d'ici à la fin du quinquennat. Essentiellement pour trois raisons.
Parce que cela ferait triompher le FN
D'abord, l'introduction d'une dose de proportionnelle aux élections législatives constituerait une vraie aubaine pour le Front national. Au vu de la popularité du parti d'extrême-droite dans les sondages, on peut légitimement penser qu'il serait largement en mesure de constituer un groupe politique autonome, alors qu'il ne compte aujourd'hui qu'un seul député (Marion Maréchal-Le Pen) et un apparenté (Gilbert Collard). En 2012 déjà, si une dose de 15% avait été introduite, francetv info avait calculé que le FN aurait été capable d'avoir 17 élus à l'Assemblée.
Même sans parler d'un retour à la proportionnelle intégrale, comme en 1986 sous François Mitterrand, François Hollande aurait donc assuré à des proches qu'il ne prendrait pas la "lourde responsabilité" de permettre l'arrivée massive de députés frontistes à l'Assemblée.
Parce que cela favoriserait les Verts
Ensuite – "et c'est le motif qui pèse le plus lourd", assure le Canard enchaîné –, François Hollande rappelle que la mise en place d'une dose de proportionnelle permettrait aux Verts de tirer leur épingle du jeu aux prochaines législatives, en remportant plusieurs sièges. Un paramètre qui les pousserait à s'émanciper du PS en 2017, plutôt qu'à jouer collectif.
Or, pour rassembler un maximum de voix dès le premier tour et éviter un duel UMP-FN, les socialistes espèrent convaincre les écologistes de présenter une candidature commune. "Les Verts ont intérêt à appartenir à la maison commune dès le premier tour de la présidentielle, en échange d'un accord aux législatives qui leur assurerait un certain nombre de circonscriptions, aurait expliqué le Premier ministre, Manuel Valls, à plusieurs responsables socialistes. A moins, bien entendu, qu'ils soient prêts à sacrifier tous les députés sortants."
Parce que cela handicaperait le PS
Troisième et dernière raison : le changement du mode de scrutin handicaperait le Parti socialiste lui-même. Le scrutin majoritaire actuel (uninominal à deux tours) favorise traditionnellement les grands partis, solidement implantés à l'échelon local. Les autres réussissent à se faire élire uniquement en faisant des alliances, ce que le Front national, par exemple, ne parvient pas encore à réaliser.
A l'inverse, le scrutin proportionnel, s'il a le mérite de représenter plus justement les différents partis, ferait mécaniquement baisser la représentation du PS (et de l'UMP). Et vu l'impopularité actuelle de la majorité, la défaite n'en serait que plus grande.
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