PS : en cas de motion de censure, que va-t-il advenir des frondeurs ?
Après un second recours au 49.3 par le gouvernement pour faire passer la loi Travail, les députés socialistes dissidents menacent de déposer une motion de censure, malgré la menace d'exclusion du Parti socialiste.
Après le nouveau recours à l’article 49.3 de la Constitution pour le projet de loi Travail, la colère gronde au sein de l'aile gauche du PS et la menace d’une motion de censure réunissant notamment des signatures de députés "frondeurs" pèse sur l’exécutif. Les députés ont jusqu'à 15 heures mercredi 6 juillet pour réunir le nombre de signatures nécessaires.
Une démarche qui serait lourde de conséquences. Car le vote d'une motion de censure pourrait entraîner "des sanctions" et d'éventuelles "exclusions", a averti Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti socialiste sur le plateau de France 3. Alors que les débats bouillonnent à l’Assemblée nationale, la question du maintien des députés frondeurs au sein du PS continue de se poser.
Sur quel fondement les frondeurs pourraient-ils être exclus ?
Au sein du Parti socialiste, un document en particulier fait office de corps juridique : les statuts du parti. S’il est accompagné de la Charte éthique et de la Charte des socialistes pour le progrès humain, ce sont avant tout les statuts qui régissent le fonctionnement du Parti socialiste, et notamment les droits et les devoirs de ses membres. Parmi les fondements, la loyauté au Parti, qui limite la liberté d’expression des adhérents. Et donc des députés.
En cas de litige, la Haute autorité éthique (HAE) peut être saisie et sera amenée à prononcer un avis en se fondant sur les statuts du parti. Elle peut renvoyer par la suite vers d’autres instances de règlement des différends. Concernant les frondeurs, cela pourrait être la Commission (fédérale ou nationale) des conflits, qui peut prononcer des sanctions "prononcées pour manquement aux principes et aux règlements du parti, pour violation certaine des engagements contractés dans le cadre d’un arbitrage ou pour actes ou conduites de nature à porter gravement préjudice au parti". Parmi les sanctions prévues par les textes : l’avertissement, le blâme, la suspension temporaire, l’exclusion temporaire ou définitive.
Est-ce que la menace est nouvelle ?
Non. Cela fait déjà un moment que la mise en garde plane sur les frondeurs. Le 11 mai dernier, le gouvernement échappe de peu à une motion de censure déposée par son propre camp. Il manquait alors deux signatures pour atteindre le nombre requis. Parmi les 56 signataires de la tentative de motion de censure "de gauche", après un premier recours au 49.3, 24 députés socialistes, dont deux anciens ministres, Benoît Hamon et Aurélie Filippetti, avaient voté le texte. Bruno Le Roux avait ainsi agité le risque de franchir "une ligne rouge", sans possibilité de retour.
La conséquence ne se fait pas attendre, et le jour suivant, Jean-Christophe Cambadélis saisit la Haute autorité éthique du parti afin de statuer sur ce cas de figure sans précédent. L’organe est invité à se pencher "sur le cas des 24 députés socialistes qui ont proposé de renverser leur gouvernement". Le 13 juin, la HAE du PS va dans le sens du premier secrétaire du parti et estime que les frondeurs auraient fait preuve d’un "acte politique contraire au principe de solidarité" édicté par les statuts du PS. Mais cette dernière n’ayant pas de pouvoir juridictionnel ou disciplinaire, elle a donc renvoyé le cas des frondeurs vers d’autres instances.
Mais pour Fabienne Cassereau, interrogée par francetv info, avocate et membre de la HAE, "en cas d'une nouvelle motion de censure, on sera très probablement saisi de nouveau".
Une exclusion du parti, cela arrive souvent ?
Au Parti socialiste, l'excommunication reste l'exception. Récemment, le sénateur Philippe Kaltenbach a ainsi été suspendu provisoirement. La décision, du 8 avril 2016, de la commission nationale des conflits (le tribunal du Parti socialiste) évoque la charte éthique du PS, qui énonce que "tout acte de corruption avéré d’un individu ou d’un groupe d’individus devra être sanctionné". L’an dernier, l'ancien maire de Clamart avait ainsi été condamné en première instance pour avoir accepté de l'argent en liquide de la part d'un de ses adjoints contre une promesse d'attribution de logement social.
Parmi les autres cas d'exclusion qui avaient fait grand bruit : celle d'Olivier Falorni, le député du Parti radical de gauche de la Charente-Maritime. En 2012, cet ancien patron de la fédération PS du département avait décidé de maintenir sa candidature face à la présidente de région Ségolène Royal pour les élections législatives de La Rochelle. Malgré l'ultimatum de la direction du parti, Olivier Falorni ne s'était pas retiré pas et il avait alors été renvoyé.
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