Que pensent Marine Le Pen et François Bayrou l'un de l'autre ?
Jeudi 19 janvier, François Bayrou tient le premier meeting de sa campagne à Dunkerque dans le Nord-Pas de Calais, région dont Marine Le Pen est l'élue. Les deux candidats sont rivaux pour la troisième place de l'élection. Comment se jugent-ils ?
C'est la dernière idée à la mode qui agite les rédactions. Un duel Bayrou-Le Pen au second tour de l'élection présidentielle. "L' Express" de cette semaine en fait sa une. Le radical Dominique Paillé y consacre la trame d'un roman publié ces jours-ci "Panique à l'Elysée".
Fanstasme
Cette hypothèse serait séduisante pour les observateurs politiques parce qu'inédite. Mais pour l'heure, elle relève du fantasme. Elle est contredite par toutes les enquêtes d'opinion, comme l'explique Jérome Fourquet au cours d'un chat sur FTV 2012.
" Il n'est pas impossible que Marine Le Pen ou François Bayrou puisse se qualifier au second tour. Toutefois, dans ce cas, nous pensons que seul l'un de ces deux "challengers" pourrait se qualifier en éliminant l'un des deux principaux candidats. Et la configuration d'un duel Le Pen-Bayrou nous paraît actuellement assez peu probable", déclare aux internautes ce directeur à l'Ifop.
Mais que pensent les deux protaganistes de ce scénario ? Comment se jugent-ils l'un et l'autre ?
Le Pen juge Bayrou
"Je serai au second tour. Mais pas face à François Bayrou. Ce n'est pas crédible", martèle Marine Le Pen lors de ses voeux à la presse début janvier.
Et au vu des fameux sondages post-réveillon, Bruno Bilde, son directeur de campagne, se disait rassuré estimant "qu'il n'était pas prêt de nous rattrapper". "Bayrou n'est pas notre préoccupation première", surenchérissait Marie-Christine Arnautu, la patronne du FN en Ile-de-France.
Mais l'entourage de la candidate reconnait "avoir négligé Bayrou en 2007". "Nous avions cru à une bulle sondagière", explique Mme Arnautu. Au FN, on est décidé à ne pas reproduire la même erreur cette année.
Et de fait depuis la rentrée, la présidente du Front national a durci le ton envers le candidat du MoDem qu'elle ménageait auparavant.
#UMPSENTRE
Sur twitter, le président des jeunes FN, J, tente de lancer un hashtag (mot-clé pour le référencement dans le langage des twittos) à l'orthographe peu orthodoxe : #UMPSENTRE. Si maître Capello se retourne dans sa tombe, la stratégie, elle, est claire : mettre tout le monde dans le même bain réprobateur.
"Mon message prend tout son sens quand on lit avec attention les propos des candidats de l'UMPS et du centre", déclare Mme Le Pen à Rouen, dimanche, prenant soin d'accoler plusieurs fois le MoDem à son célèbre acronyme UMPS. "Je serai la seule candidate du protectionnisme et de la réindustrialisation", répète t-elle à de multiples reprises pour se différencier du produire français du Béarnais.
Bayrou juge Le Pen
De son côté, François Bayrou n'est pas très emballé quand les journalistes lui demandent de commenter le programme et le parcours de la candidate du FN. Il dénonce "les manœuvres médiatiques qui visent à présenter le Front national comme quelque chose qui progresserait fantastiquement".
Néanmoins son entourage concède que Mme Le Pen a "des thèmes électoralement porteurs" et qu'ils peuvent partager un même électorat. " Ce sont des gens qui vont écouter", explique M. Bayrou.
Et pour lui, la présidentielle se joue avant tout sur une question : "êtes-vous prêt à me faire confiance ?". Dans ce domaine il estime avoir de l'avance sur la candidate du FN. Par ailleurs, il n'est pas favorable à l'anonymat des parrainages pour la présidentielle et considère que l'application "des idées du FN serait pour la France un drame absolu". Lui, non plus ne croît guère à un duel avec Mme Le Pen au second tour.
Une sociologie électorale différente
M. Bayrou et Mme Le Pen partagent un même positionnement politique : ni gauche, ni droite. A l'UMPS du FN, le MoDem répond désormais par l'acronyme PPP (partis provisoirement principaux). Ils ont également un thème de campagne commun (avec d'autres candidats), la réindustrialisation. Et leurs adversaires leur reprochent d'avoir les mêmes accents populistes.
Mais leurs sociologies électorales restent différentes. Pour résumer de façon grossière, M. Bayrou séduit plus dans les catégories supérieures et Mme Le Pen a une avance dans les classes populaires.
S'ils veulent accéder au second tour, chacun doit donc aller puiser des voix dans une partie de l'électorat de l'autre et pas seulement chez ceux de Nicolas Sarkozy et de François Hollande. Ce qui rend impossible leur duel au second tour. Ils sont donc bien adversaires directs mais avant le 22 avril, date du premier tour
"Les Français ont le choix entre deux votes protestataires", résume Arnaud Dassier, ancien soutien de Sarkozy rallié à Bayrou, sur son compte twitter. "Avec Bayrou, ils disent zut, et avec Le Pen ils disent merde".
Les deux candidats sont au moins d'accord sur ce point. Ils souhaitent que leurs différences soient perçues autrement que dans un registre purement lexical.
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