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Remaniement : comment en est-on arrivé à la démission ?

Après les propos très critiques d’Arnaud Montebourg, Manuel Valls et François Hollande ont choisi avec l’implosion du gouvernement, rigueur et fermeté. Pourtant, l'opposition du ministre de l'Economie n'est pas nouvelle. Depuis le mois d’avril et la formation d’un nouveau gouvernement deux lignes économiques s’affrontent. Retour sur cinq mois de couacs.
Article rédigé par Justine Cohendet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
  (Arnaud Montebourg et Benoît Hamon lors de la traditionnelle fête de la Rose, le 24 août. © MaxPPP)

"La nouvelle équipe sera constituée en cohérence avec les orientations que le président a définies" . Dans un communiqué, l’Elysée a annoncé ce lundi matin la démission du gouvernement du Valls. Une décision qui vient sanctionner les propos critiques d’Arnaud Montebourg publiés samedi dans le journal Le Monde . Une décision qui vient également mettre un terme aux rumeurs de désaccord entre Matignon et l’Elysée. Alors que leur cote de popularité continue de baisser, François Hollande et Manuel Valls veulent afficher leur unité et leur fermeté. Le message est clair, il n’y aura pas de changement de cap et la majorité doit être unie, rassemblée.

Premier jour de l’ère Valls, premiers couacs

Car, malgré ses promesses, les couacs n’ont pas disparu sous l’ère Valls. Depuis sa nomination à Matignon en avril, le Premier ministre affronte une ferme opposition à sa politique.  Dans les rangs du PS, avec les frondeurs, mais également dans son propre gouvernement. 

 

Quelques heures seulement après l’annonce de la nouvelle composition du gouvernement en avril, un bras de fer entre Bercy et le Quai d’Orsay avait éclaté. Arnaud Montebourg et Laurent Fabius revendiquant tous deux le portefeuille du Commerce extérieur. Ce premier couac avait poussé le nouveau gouvernement à repousser sine die la passation de pouvoir avec l’ex-titulaire du portefeuille, Nicolas Bricq. Alors que le Commerce extérieur était rattaché à Bercy, Manuel Valls avait finalement tranché en faveur du ministre des Affaires étrangères. Une premier désaveu pour Arnaud Montebourg.

 

Dès sa nomination au ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, Ségolène Royal avait également laissé penser, via la porte-parole de la région Maryline Simoné, qu'elle ne quitterait pas son poste de présidente de la région Poitou-Charentes. Finalement, le lendemain la ministre avait annoncé qu'elle le laisserait, se consacrant pleinement à son ministère. 

"La cohabitation entre deux lignes politiques et économiques de plus en plus contradictoires était devenue insoutenable"

Mais le gouvernement Valls I a davantage été marqué par les divergences économiques entre les différents membres du gouvernement que les petits cafouillages. "La cohabitation entre deux lignes politiques et économiques de plus en plus contradictoires était devenue insoutenable", explique Pascal Perrineau, politologue et directeur du CEVIPOF. Pour lui, cette décision était irrémédiable. En effet, au sein du gouvernement coexistaient deux lignes économiques.

Pascal Perrineau, politologue et directeur du CEVIPOF, Centre de recherches politiques de Sciences Po Paris. Propos recueillis par Raphaëlle Duchemin

 

D’un côté, Manuel Valls et François Hollande défendent ce que l’on appelle une politique de l’offre. En clair, pour eux la relance économique passe par l’allègement des coûts pour les entreprises afin de le rendre plus compétitives. C’est le principe du pacte de responsabilité et des 40 milliards d’euros de baisse de charges.

Arnaud Montebourg et Benoît Hamon défendent une politique de relance

De l’autre côté, Benoît Hamon et Arnaud Montebourg, peu convaincus par cette politique, préconisent une relance de la demande afin d’enrayer le chômage. C’est dans ce contexte qu’Arnaud Montebourg samedi puis Benoît Hamon dimanche ont vivement critiqué la politique de rigueur du gouvernement. Des propos qui ne sont pas nouveaux chez Arnaud Montebourg, mais cette fois, la ligne rouge a été franchie pour le Premier ministre.

"Aujourd'hui, la réduction à marche forcée des déficits est une aberration économique car elle aggrave le chômage, une absurdité financière car elle rend impossible le rétablissement des comptes publics, et un sinistre politique car elle jette les Européens dans les bras des partis extrémistes qui veulent détruire l'Europe ", a affirmé Arnaud Montebourg dans les colonnes du  journal Le Monde .

 

Arnaud Montebourg et d’une manière plus incertaine Benoît Hamon pourraient venir grossir les rangs des frondeurs du PS qui s’opposent depuis plusieurs mois à la politique économique du gouvernement. Fin avril, 41 députés socialistes s’étaient abstenus lors du vote à l’Assemblée du programme de stabilité de la France pour 2014-2017.  

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