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Sénat à gauche: quels changements législatifs ?

"Concrètement", le changement de majorité au Sénat "ne va pas changer grand chose puisque le dernier mot revient à l'Assemblée", pense un ministre cité par l'AFP. "Mais c'est vrai, cette défaite envoie un mauvais signal pour 2012", ajoute-t-il.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le président du groupe PS au Sénat, Jean-Pierre Bel: "Nous n'avons aucune volonté d'obstruction" (AFP - JACQUES DEMARTHON)

"Concrètement", le changement de majorité au Sénat "ne va pas changer grand chose puisque le dernier mot revient à l'Assemblée", pense un ministre cité par l'AFP. "Mais c'est vrai, cette défaite envoie un mauvais signal pour 2012", ajoute-t-il.

Au-delà du message politique envoyé par les grands électeurs, rien ne devrait donc changer ? Ce n'est sans doute pas si simple... Car même si constitutionnellement, l'Assemblée a, au final, le dernier mot sur le Sénat, on peut penser que la nouvelle majorité de la Haute assemblée ne perdra pas une occasion de se mettre en travers de la route du pouvoir exécutif...

Voir l'édito de Fabien Namias au 13H de France 2 le 26 septembre 2011

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Première exemple: la fameuse "règle d'or" de retour à l'équilibre budgétaire que Nicolas Sarkozy voulait faire inscrire dans la Constitution. "Par rapport à la pseudo règle d'or, je pense qu'aujourd'hui Nicolas Sarkozy sait que c'est fini", a déclaré dès dimanche soir le candidat à la primaire socialiste François Hollande. "Il y a une victime ce soir, c'est la règle d'or", a ajouté le nouveau sénateur de l'Essonne Jean-Vincent Placé, évoquant le "rejet d'une politique accrue d'austérité". "C'est mort", concède un cadre de la droite. Avec le basculement du Sénat, le gouvernement a perdu toute chance de réunir une majorité des 3/5èmes des députés et sénateurs réunis en Congrès à Versailles.

"Sans doute, le nouveau Sénat aura des exigences sur certains textes, en matière de fiscalité ou de République exemplaire", anticipe un responsable de la majorité présidentielle. Il pourrait aussi adopter des textes qui, comme ils seront refusés par l'Assemblée et le gouvernement, pourraient faire passer Nicolas Sarkozy pour un président qui bloque. Cette victoire est un vrai beau levier pour le PS", poursuit-ici.

La majorité sénatoriale de gauche pourrait aussi décider d'instaurer des commissions d'enquête sur les affaires en cours qui touchent l'exécutif, par exemple celle de Karachi.

D'une manière générale, "sur le plan législatif, la gauche aura les moyens de retarder l'adoption des textes, de faire savoir haut et fort son opposition", analyse le politologue Olivier Rouquan (Sciences Po). L'examen cet automne du budget 2012 pourrait en être une illustration.

"La gauche va découvrir à la seconde Chambre des vertus insoupçonnées…", estime dans une interview au Guy Carcassonne, professeur de droit constitutionnel à Paris X. "La gauche n'a jamais été empêchée de gouverner par le Sénat de droite ; la droite ne le sera pas davantage par un Sénat de gauche. Tout au plus l'adoption des projets de loi prendra-t-elle un peu plus de temps ce qui, d'ailleurs, n'est pas mauvais", ajoute-t-il.

"En passant à gauche, le nouveau Sénat pourrait (...) bloquer la politique de Nicolas Sarkozy jusqu'à la présidentielle. C'est en quelque sorte une nouvelle forme de cohabitation jusqu'à la fin du quinquennat", a estimé le candidat du Parti de gauche (et ancien sénateur), Jean-Luc Mélenchon.

"Nous n'avons aucune volonté d 'obstruction ", a d'ores et déjà promis le chef de file des sénateurs socialistes, Jean-Pierre Bel. Même si l'on n'est pas obligé de le croire sur parole... "Nous entendons rendre au Sénat tout son rôle politique" alors que son président sortant, Gérard Larcher, "s'est aligné sur le gouvernement en ce qui concerne par exemple la réforme territoriale ou celle des retraites", a-t-il annoncé. "Une de nos obligations sera de rénover le lien avec les élus locaux et pour cela nous allons organiser très rapidement des états généraux pour préparer un 'Acte 3' de la décentralisation", a annoncé Jean-Pierre Bel.

Par ailleurs, un président de gauche du Sénat, constitutionnellement le second personnage de l'Etat (car assurant l'intérim du président de la République en cas d'incapacité ou de décès), présent au côté de Nicolas Sarkozy dans les grandes manifestations républicaines, aura une portée symbolique et politique forte. Sans compter les pouvoirs de nomination qu'il possèdera notamment au Conseil constitutionnel ou au Conseil supérieur de la magistrature (CSM).

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