Cet article date de plus d'onze ans.

Pour ou contre "Django Unchained", le nouveau film de Quentin Tarantino ?

Il est annoncé comme le meilleur film de ce début d'année. Mais le nouveau Tarantino est-il un vrai bon western ou un nanar surévalué ?

Article rédigé par Léo Pajon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Jamie Foxx dans le film "Django Unchained" de Quentin Tarantino. (ANDREW COOPER, SMPSP / COLUMBIA PICTURES INDUSTRIES)

Chaînes aux pieds, guenilles sur les épaules, un petit groupe d'hommes noirs encadré par deux cow-boys progresse difficilement dans une forêt du sud des Etats-Unis. Nous sommes en 1858, trois ans avant la guerre de Sécession qui mettra fin à l'esclavage. Surgit alors le Dr King Schultz (Christoph Waltz), un dangereux chasseur de primes qui libère l'esclave Django (Jamie Foxx).

Les deux hommes entament une traque sanglante, à la recherche de dangereux criminels. Mais Django n'en oublie pas pour autant son unique but : retrouver Broomhilda (Kerry Washington), sa femme, détenue par un puissant patron de plantation (Leonardo DiCaprio). Dans Django Unchained, son huitième long-métrage qui sort mercredi 16 janvier, le flingueur Tarantino vise-t-il toujours juste ?

Pour : un scénario jouissif servi par un casting aux petits oignons

A aucun moment durant ce très copieux western (2h44) on ne trouve le temps long. La réalisation, de gros plans sur les colts en travelling sur les cavaliers galopant dans une nuit embrasée par des incendies, sait ressusciter la magie brutale des westerns à l'ancienne. Avec une bande originale qui réussit à conjuguer extraits de grandes musiques classiques (les Carmina Burana), blues qui tache (Johnny Cash) et rap qui cogne (Rick Ross).

Le film, qui a un très lointain cousin italien, est un hommage aux westerns spaghettis. On y retrouve des personnages cyniques, souvent uniquement motivés par l'appât du gain ou la vengeance, comme chez Sergio Leone. Et, entre deux tueries, des pitreries qui rappellent le duo Terence Hill / Bud Spencer. Moins classique, Tarantino ne s'attaque pas à l'Ouest américain, mais au Sud, dont il sait rendre toute la beauté vénéneuse. Les superbes plantations, les arbres majestueux aux branches tentaculaires, évoquent le calvaire des esclaves et les pendaisons des fugitifs.

Pour cette histoire de vengeance sanglante mais pleine de malice, il fallait un casting capable d'ambivalence. De ce côté-là aussi, il n'y a rien à dire. Christoph Waltz, chasseur de prime vicelard teinté d'humanisme, surprend après son interprétation mémorable d'un colonel nazi sadique dans le précédent Tarantino, Inglourious Basterds. Leonardo DiCaprio, en esclavagiste, est délicieusement ignoble. Même Samuel L. Jackson, méconnaissable, réussit une belle performance en vieux valet bouffon et cruel.

Django Unchained, plaidoyer féroce contre l'esclavage, est surtout porté par son propos. Après avoir défendu la cause des femmes (Boulevard de la mort) et celle des juifs pendant la seconde guerre mondiale (Inglourious Basterds), Tarantino se place du côté des Noirs. Dans ses films cathartiques, le réalisateur utilise toujours la même ficelle : brosser le portrait de vrais grands méchants qu'il prend un malin plaisir à détruire. Et il faut bien reconnaître que cela soulage toujours autant !

Contre : une débauche d'hémoglobine et d'insultes racistes ?

Il n'y a pas grand-chose à dire contre le film. Aux Etats-Unis, une polémique a enflé sur l'utilisation du terme "nigga" ("nègre"). La même controverse était apparue lors de la sortie de son film Jackie Brown, comme on peut le voir avec cet article de la BBC (en anglais). Surtout, on voit mal comment décrire la violence esclavagiste en poliçant les discours. Le Mississippi de l'époque n'était pas vraiment politiquement correct.

On pourrait en revanche reprocher à Tarantino de desservir son propos à force d'outrance. Combats à mort entre Noirs, esclave déchiqueté par les chiens, les scènes gores se suivent et se ressemblent un peu. Tant et si bien qu'on a du mal à croire à la vraisemblance de ce qu'on a sous les yeux. Mais la caricature est la signature de Tarantino...

Enfin, le personnage de Django est un peu terne par rapport à son comparse chasseur de primes. Dans un film qui prend le contrepied du western traditionnel (où l'on célèbre habituellement la conquête de l’Ouest par les colons blancs) en se focalisant sur l'émancipation des Noirs, il est dommage que le héros de l'histoire n'ait pas un peu plus d'épaisseur.

Faut-il y aller ?

Oui ! A moins d'être profondément allergique aux extravagances de Tarantino, sortez les colts pour ce western qui s'annonce bien comme l'un des meilleurs films de 2013. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.