Pourquoi le Louvre-Lens s'annonce comme un succès
Il ne se contente pas d'être un mini-Louvre. Sa conception dépoussière l'image du musée français classique.
LOUVRE-LENS - Il a fallu huit ans au projet pour sortir de la terre houilleuse du Pas-de-Calais. François Hollande a inauguré, mardi 4 décembre, le Louvre-Lens, petit frère du plus grand musée de France. Planté sur un terril de l'ancien bassin minier, comme l'explique France 3 Nord-Pas-de-Calais, ce Louvre délocalisé, qui ouvre ses galeries au public le 12 décembre, va probablement cartonner.
Le Louvre est le musée le plus visité du monde, mais…
Le Louvre est un musée depuis plus de deux cents ans, mais les amateurs d'art ne se lassent pas de ses trésors. En 2011, ses chefs-d'œuvre ont attiré plus de 8,8 millions de visiteurs, ce qui le place loin devant le British Museum de Londres (Royaume-Uni) et le Metropolitan Museum of Art à New York (Etats-Unis). Mais le public ne peut voir que 10% des 350 000 œuvres qu'il abrite : le reste se cache dans les réserves, parfois en attente de restauration. Sauf que c'est déjà trop pour une seule journée. Attirés par le sourire de la photogénique Joconde, les visiteurs traversent parfois les longues galeries parquetées du Louvre sans prêter attention à ses œuvres.
Le Louvre-Lens, avec ses 900 œuvres exposées, est plus petit, mais tout aussi ambitieux. Il se sert dans huit départements de son grand frère (Antiquités orientales, antiquités égyptiennes, antiquités grecques, étrusques et romaines, arts de l'Islam, objets d'art, arts graphiques, sculptures et peintures), et dans toutes les techniques et toutes les périodes couvertes par le musée parisien. Dès l'ouverture, il offre ainsi aux yeux de son public la célèbre Liberté guidant le peuple (1830) d'Eugène Delacroix, la Sainte-Anne (vers 1510) de Leonard de Vinci et d'autres grands chefs-d'œuvre du musée du Louvre. L'établissement lensois espère ainsi attirer 700 000 visiteurs la première année, puis 500 000 par an.
Le Louvre-Lens renouvelle le Louvre
Le "Louvre 2" ne se contente pas du statut de mini-Louvre. L'agence japonaise Sanaa, qui a conçu le site, a choisi de casser les codes des musées français, en créant une notamment une Galerie du temps. Dans un espace décloisonné de 3 000 m2, 205 œuvres retracent l'histoire de l'art, de l'Antiquité à 1830. Là, aucun tableau aux murs. Ces derniers, recouverts d'inox, "reflètent les fantômes des œuvres", explique Adrien Gardère, scénographe du Louvre-Lens, à Libération. Plus loin, le Pavillon de verre accueille, ente ses fines colonnes, les expositions temporaires. La première sera consacrée à la Renaissance, un choix symbolique pour ce musée implanté dans une région qui en attend les retombées économiques.
Le Louvre-Lens prévoit aussi l'ouverture de ses réserves, où travaillent les restaurateurs. Rares sont les musées qui donnent cette possibilité, sauf pour de brèves expositions. Les visiteurs raffolent pourtant de tout ce qui se trame en coulisses. A Lens, les plus curieux pourront donc descendre au deuxième sous-sol, ouvrir des tiroirs à dessins, et même parler aux restaurateurs en train de travailler. Lesquels ne semblent pas franchement enthousiastes, comme ils l'expliquent à nos confrères de France 3 Nord-Pas-de-Calais.
Entre Paris, Londres et Bruxelles
Le Louvre-Lens peut se vanter de sa situation géographique idéale. La ville de 36 000 habitants se trouve à deux heures de route de Paris, une heure trente de Bruxelles, une heure de Calais et trente minutes de Lille. Le Louvre arrive ainsi dans la "zone des visites de week-end des Britanniques", non loin des champs de bataille de la première guerre mondiale, souligne The Independent (lien en anglais). Les Pays-Bas et l'Allemagne ne sont pas beaucoup plus loin.
Par ailleurs, la ville et la région se réorganisent autour du nouveau musée, en installant un parking gratuit et une navette depuis la gare. Et la SNCF tente de tirer son épingle du jeu en offrant (temporairement) le billet de train retour aux habitants du Nord-Pas-de-Calais qui se rendraient à Lens, détaille La Voix du Nord.
L'exemple du centre Pompidou de Metz
Les délocalisations de musées, toujours décriées, commencent pourtant à faire leurs preuves. C'est le cas du musée Guggenheim de Bilbao (Espagne). L'arrivée, en 1997, de l'annexe d'un des temples new-yorkais de l'art moderne a redoré le blason d'une ancienne ville sidérurgique meurtrie. En France, le Centre Pompidou Metz, ouvert il y a deux ans et demi, a passé en septembre le cap des 1,5 million de visiteurs, selon évène.fr. Ce qui en fait "le lieu d'exposition le plus fréquenté" en France, hors Ile-de-France, d’après le site d'information culturelle.
Même si les deux musées sont très différents, le Louvre-Lens présente les mêmes atouts que son cousin lorrain pour son lancement : une bonne situation géographique, une architecture contemporaine et une exposition inaugurale de qualité. Pour la suite, la direction du musée mise non pas sur une collection permanente mais sur le renouvellement des œuvres. Elle prévoit, pour perpétuer son attractivité, deux expos temporaires par an et le renouvellement, tous les cinq ans, d'une bonne part des œuvres exposées dans la grande galerie.
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