Président ou candidat, les changements de costumes de Sarkozy
De cérémonie de vœux en cérémonie de vœux, Nicolas Sarkozy a joué sur l'ambiguïté durant tout le mois de janvier. Avec, en filigrane, une entrée en campagne qui ne dit pas encore son nom.
Bilan de son propre quinquennat, propositions mais aussi attaques à peine voilées contre ses adversaires pour la présidentielle, Nicolas Sarkozy a profité de son marathon des vœux, passage obligé du président de la République, pour endosser le rôle du candidat. A chacune de ses interventions, une promesse ou un tacle, parfois les deux. Retour sur un mois d’entrée en campagne pour le chef de la majorité.
• Un président qui défend son bilan...
La réforme des retraites C’est sa réforme et Nicolas Sarkozy la défend à chaque occasion. Il le fait devant les Français en général, lors de ses vœux télévisés du 31 décembre 2011 : "Je pense notamment à la réforme des retraites et à toutes les mesures visant à diminuer nos dépenses publiques, qui ont permis à la France de garder la confiance de ceux qui lui prêtent leur épargne pour financer son économie." Ou devant les parlementaires, à Paris, le 11 janvier, dont il salue "le sens des responsabilités" dont ils ont fait preuve en la votant.
L’action à l’étranger Particulièrement mise en valeur lors de ses vœux aux forces armées à Lanvéoc-Poulmic (Finistère) le 3 janvier, l’action extérieure de la France permet à Nicolas Sarkozy de faire un petit clin d’œil rassurant aux gaullistes. Il y souligne "cette capacité à hausser le ton sur la scène internationale quand les événements l'exigent" qu’il souhaite incarner. Ses vœux au corps diplomatique, le 20 janvier, ont la même tonalité.
La réduction du nombre de fonctionnaires Au cœur de ses vœux aux premiers concernés, à Lille le 12 janvier, Nicolas Sarkozy vante son action quant à la fusion des impôts et du Trésor public, ainsi que celle de l'ANPE et des Assedic en Pôle emploi. Mais il se félicite aussi des augmentations de salaires dont auraient bénéficié 2 millions d’agents de la fonction publique, grâce aux "160 000 postes supprimés depuis 2007" : 10 % d’augmentation du pouvoir d’achat, "on n’avait jamais vu ça".
• ... et qui esquisse un programme
La TVA sociale Nicolas Sarkozy réactive le débat dès ses tout premiers vœux, ceux télévisés aux Français du 31 décembre, au cours desquels il parle "du financement de notre protection sociale qui ne peut plus reposer principalement sur le travail".
Le chantier de l’emploi Ce qui devait être la journée de vœux aux partenaires sociaux s’est progressivement transformé en sommet pour l’emploi, puis en sommet de crise. Et est devenu le point d’orgue du mélange des genres entre président et candidat. Nicolas Sarkozy annonce le redéploiement de 430 millions d'euros pour des mesures d'urgence contre le chômage. Et ce alors que l’emploi caracole en tête des préoccupations des Français dans les sondages.
Des promesses ponctuelles Devant les personnels judiciaires, il glisse quelques propositions, dont un projet de loi sur l'exécution des peines, ou encore la "déjudiciarisation" des contentieux les plus simples "afin que les magistrats puissent se concentrer sur l'essentiel et que le juge retrouve tout son prestige dans l'esprit des Français". Devant les fonctionnaires, à Lille le 12 janvier, il s’engage à ce que "tout agent en CDD occupant depuis six ans un emploi répondant à un besoin permanent de son service se verra dorénavant systématiquement proposer un CDI".
• Un candidat qui attaque ses rivaux…
Il lance une pique à Eva Joly lors de ses vœux aux armées. Alors que la candidate écologiste avait créé la polémique autour de sa proposition de remplacer le 14 Juillet par un défilé citoyen, il lance : "Jamais, jamais, je ne pourrai accepter la remise en cause de ce défilé que tant de pays envient à la France, et qui fait la fierté de nos compatriotes."
Mais la cible favorite de Nicolas Sarkozy, c’est François Hollande, son rival socialiste dans la course à l’Elysée. A chaque vœu son attaque :
Sur l’éducation A Chasseneuil-du-Poitou (Vienne), le 5 janvier : alors que François Hollande a promis de créer 60 000 postes supplémentaires sur cinq dans l’Education nationale, Nicolas Sarkozy déclare : "Imaginer la création de postes dans l'Education nationale c'est irresponsable compte tenu de la situation financière de notre pays."
Sur la règle d’or A Paris, le 11 janvier : après avoir souligné que plusieurs gouvernements de gauche en Europe l’avaient adoptée alors que les socialistes français la refusent, le président fait mine de s’interroger : "Quels responsables politiques pourraient faire croire que cette règle d’or n’est pas nécessaire ?"
Autour de la perte du triple A Lors des vœux aux forces économiques et aux acteurs de l’emploi, à Lyon le 19 janvier : il dénonce "un spectacle parfois indécent" de l’opposition, qu’il accuse de se "réjouir" de cette dégradation. Autre attaque à peine voilée à destination de François Hollande : "Qui peut dire aux fonctionnaires : 'on va continuer à vous embaucher plus nombreux et en même temps on vous paiera mieux' ? Mensonges, mensonges toujours et encore."
Sur les 35 heures S’adressant aux Français de l’étranger à Madrid le 16 janvier, il s’amuse : "Lequel d'entre vous, à l'étranger, a constaté - quel que soit le continent que vous ayez choisi - qu'un autre pays s'était doté de cette règle administrative, absurde, des 35 heures obligatoires ?"
Sur l’Hadopi Alors que François Hollande a eu quelques peines à clarifier sa position sur le sujet la semaine précédentes, Nicolas Sarkozy défend coûte que coûte sa loi, à Marseille, le 24 janvier lors de ses vœux au monde de la culture : "Depuis le lancement de la 'réponse graduée', voici un an, un cycle vertueux s'est enclenché." Et de se dire "sidéré" d’entendre que "certains" proposent son abrogation, "de peur de déplaire à la jeunesse".
Sur la laïcité Lors de ses vœux aux autorités religieuses le 25 janvier. A François Hollande, qui s’est engagé à inscrire la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution s’il était élu, il rétorque : "Certains seraient bien inspirés de relire de temps en temps le texte de notre loi fondamentale, cela leur éviterait de se donner la peine de chercher à y faire inscrire ce qu'elle contient déjà !"
• ... et entame sa campagne
Ses vœux télévisés aux Français ? Nicolas Sarkozy les termine en ces termes : "J'ai confiance dans les forces de la France." Une formule très proche de "toutes les forces de la France", slogan dont on apprend quelques jours plus tard qu’il est testé par ses équipes en vue de la campagne.
Lors de ses vœux aux armées, il cite Hélie Denoix de Saint Marc, officier parachutiste de la Légion étrangère et ancien résistant français : "De toutes les vertus, la plus importante me paraît être le courage." Valeur sur laquelle il mise tout pour attirer la confiance des électeurs. Quinze jours plus tard, il insiste lors de ses vœux aux forces économiques : "Mes chers compatriotes, dans ces circonstances-là, la seule solution c'est le sang-froid, la distance, le courage, le courage de prendre les décisions."
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