Bayrou, Cheminade, Sarkozy, Arthaud et Mélenchon sur France 2 : ce qu’il faut en retenir
Pour sa deuxième édition spéciale, l'émission "Des paroles et des actes" recevait les cinq candidats pour près de 17 minutes d'interview par quatre journalistes. Retrouvez l'essentiel de leurs prestations.
Après la première édition avec François Hollande, Marine Le Pen, Eva Joly, Nicolas Dupont-Aignan et Philippe Poutou mercredi, François Bayrou, Jacques Cheminade, Nicolas Sarkozy, Nathalie Arthaud et Jean-Luc Mélenchon étaient invités de l’émission "Des paroles et des actes", jeudi 12 avril. Par ordre tiré au sort, ils se sont confrontés, les uns après les autres, aux quatre mêmes journalistes durant 16 minutes et 30 secondes, CSA oblige. Enjeux et résumé pour chacun.
• François Bayrou
L’enjeu Enrayer la chute. L’ex-"troisième homme" de 2007 n’a plus la cote, il est même tout récemment tombé sous la barre des 10% dans les sondages, derrière Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Le centriste, qui n’a pas lâché son discours sur le désendettement du pays depuis cinq ans, doit donc renverser la vapeur.
La phrase "On considère comme normal que l'Etat, qui devrait montrer l'exemple, entasse la dette sur le dos des enfants."
L’attitude Sérieux et pédago. Fidèle à lui-même, le candidat du MoDem a défendu son programme, notamment son volet économique. Son diagnostic ? "Le modèle social français est gravement menacé (...) parce que c'est le modèle le plus exigeant et le plus cher des pays qui nous ressemblent."
François Bayrou a également dénoncé "le gaspillage encouragé" de l'Etat, promettant "qu'on ne dépensera[it] pas plus l'année prochaine et l'année suivante" que cette année s'il était élu. Enfin, il a maintenu ses propos sur le "climat" politique tenus le soir de la tuerie dans l'école juive de Toulouse, estimant : "Les guerres de religion ne sont jamais éteintes, elles menacent toujours de se rallumer."
La difficulté Interrogé sur les appels du pied de l'UMP et du PS en sa direction, François Bayrou s'est présenté comme "la seule majorité stable et crédible face à la crise", tout en refusant d'exclure l'idée d'être le Premier ministre de l'un ou l'autre des deux candidats.
• Jacques Cheminade
L’enjeu Gagner en crédibilité. Déjà candidat en 1995, le chef de file de Solidarité et Progrès, qui a décroché de justesse les 500 parrainages, est considéré comme l’ovni de cette élection. Avec ses propositions surprenantes et iconoclastes et une équipe de campagne restreinte, il profite de l’égalité du temps de parole pour sortir de l’anonymat.
La phrase "Je suis une Jeep tout terrain et ce qui m'intéresse, c'est de voir les choses en perspective."
L’attitude Dans l'espace. Contrant toutes les attaques en "bizarrerie" de son programme en invoquant "l'avenir, la vision à long terme", Jacques Cheminade a défendu tour à tour le développement du chant choral, les investissements pour "une fusée Ariane 5 ME" et perdu ses interlocuteurs avec des propos techniques.
Il a regretté "la mystique de l'équilibre budgétaire", expliqué "la différence entre la dette légitime et illégitime" et invoqué Maurice Allais, "notre seul prix Nobel d'Economie", qui prônait la séparation des banques de dépôt et d'investissement. Il partage d'ailleurs cette proposition avec François Hollande, pour qui il pourrait voter au second tour, "s'il maintient ses positions contre la finance".
La difficulté Interrogé sur les théories du complot largement relayées par son mentor américain Lyndon LaRouche, il a botté en touche : "Je considère qu'il y a deux types d'imbéciles, ceux qui disent 'il n'y a pas de complot, jamais', et ceux qui disent qu'il y a des complots tout le temps." Sur les attaques du 11 septembre 2001 à New York notamment, il s'est contenté d'affirmer : "Il y a des éléments troublants."
• Nicolas Sarkozy
L’enjeu Gratter des points. Le président candidat confiait dimanche 8 avril au JDD "sentir monter la vague" de la victoire. Mais, donné en recul dans les derniers sondages et toujours largement distancé par François Hollande au second tour, il cherche toujours un véritable élan.
La phrase "La France silencieuse a des choses importantes à dire, à vous, aux médias, à la pensée unique, attendons le choix des Français."
L’attitude Pragmatique et expérimenté. Comme au cours de ces derniers jours de campagne, Nicolas Sarkozy cherche à se repositionner comme le capitaine capable de tenir la barre : "J'ai l'expérience de la gestion des crises", "la crise, c'est pas une invention, c'est une réalité et il y a quelques jours encore, il a fallu sauver la Grèce", "la dette, le déficit, c'est pas du tout de la psychologie". Et de promettre : "Si les Français continuent à me faire confiance, on continuera à réduire les dépenses", pointant du doigt celles entraînées selon lui par le programme de François Hollande.
Le candidat UMP a de nouveau décliné certaines de ses annonces, comme l'indexation des retraites sur l'inflation, la fermeture de manière "unilatérale" des marchés publics français aux entreprises produisant hors d'Europe si l'Union n'obtient pas "la réciprocité [d'accès aux marchés] auprès des grands d'Asie". Sans oublier de tacler son adversaire socialiste.
La difficulté Interrogé sur les propos d'Eva Joly la veille, qui avait parlé d'"une présomption concordante et précise" quant au financement illégal de sa campagne en 2007 et de celle d'Edouard Balladur en 1995 dont il était porte-parole, Nicolas Sarkozy s'est agacé : "Je n'ai pas à répondre à madame Joly, madame Joly c'est qui ? C'est l'alliée de monsieur Hollande. (...) Quand on pense que cette dame qui viole tous les principes du droit (...) a été magistrate (...). Demandez-lui d'apporter des preuves, des faits et je lui répondrai, mais sur les ragots, sur la médisance, la méchanceté, permettez-moi de vous opposer le mépris le plus cinglant."
• Nathalie Arthaud
L’enjeu Prouver qu’elle est la vraie candidate "communiste révolutionnaire". Après le show de Philippe Poutou (NPA), le candidat le plus proche d’elle idéologiquement, celle qui a succédé à Arlette Laguiller fait face à un vrai défi. Créditée de moins de 1% dans les sondages, elle cherche à populariser et encourager la lutte internationale des classes, celle des ouvriers et salariés contre "le grand capital".
La phrase "Je ne connais que la force sociale, la force des travailleurs qui revendiquent leurs droits contre des groupes qui sont riches à milliards."
L’attitude Vent debout, révoltée. La candidate de Lutte ouvrière n'a eu de cesse de dénoncer "la dictature du grand capital que nous vivons aujourd'hui", "le diktat", "tout le mal qu'[elle] pense de l'économie capitaliste". Nathalie Arthaud a brandi "la loi et l'article L. 1146-1" du Code du travail pour justifier sa volonté d'emprisonner les "patrons voyous".
Elle a également défendu la suppression de la TVA, sauf "pour les produits de luxe, les sacs Vuitton, les yachts", sur lesquels elle envisage même de "doubler, tripler" cette taxe. La candidate trotskiste a réaffirmé la nécessité d'interdire les licenciements, "mesure d'urgence", et celle d'"un salaire jusqu'à la mort" financé avec "les profits qu'on pourrait enlever à ceux qui accaparent des milliards". Sur les sujets internationaux, Nathalie Arthaud a maintenu ses propos comparant Gaza à "un camp de concentration, une prison à ciel ouvert".
La difficulté Interrogée sur l'orientation politique de l'enseignement en économie qu'elle dispense au lycée, Nathalie Arthaud a joué la carte de la comparaison avec les journalistes : "Je vous rassure, quand je suis au travail, je travaille et quand je défends mes idées politiques, je défends mes idées politiques, je fais exactement comme vous, je reste neutre, objective." Précisant dans un sourire : "Nicolas Sarkozy, c'est pas l'alpha et l'oméga, et il n'est pas encore au programme."
• Jean-Luc Mélenchon
L’enjeu Arracher la troisième place. Après une forte progression dans les sondages, qui le placent au coude-à-coude avec Marine Le Pen autour de 13-14% d’intentions de vote, le candidat du Front de gauche rêve ouvertement de battre le Front national et cherche donc à maintenir le souffle de sa campagne.
La phrase "Je ne peux pas vous cacher que j'ai plaisir à voir que ce que nous avons entrepris rencontre une telle audience."
L’attitude Entre maîtrise et grandes tirades. Jean-Luc Mélenchon a alterné grandes envolées, coups à ses adversaires et piques contre les journalistes. Le leader du Front de gauche a d'abord balayé le culte de la personnalité dont il ferait l'objet : "Les gens qui viennent là ne viennent pas admirer un bonhomme, vous savez pourquoi ils s'évanouissent ? C'est parce qu'il fait une chaleur épouvantable et qu'ils sont serrés comme des rats." Il a ensuite prôné "une Assemblée nationale constituante" pour mettre en place "la VIe République", la sortie du traité de Lisbonne et de l'Otan.
Avant de se réjouir de la pression qu'il pourrait faire peser sur la gauche si son score dans les sondages se confirmait : "Ceux qui croyaient qu'on était la gauche folklorique, sans contenu, (...) que le rouge était à ranger au placard, tout ça c'est terminé, nous sommes là !" Enfin, reprenant une information de Mediapart, il s'emporte : "La finance internationale va attaquer la France le 16 avril prochain, (...) nous entrons dans la saison des tempêtes et on verra qui a une stratégie contre la finance."
La difficulté Interrogé sur sa position vis-à-vis de François Hollande, Jean-Luc Mélenchon a rétorqué : "Chaque fois qu'il prend une bonne idée dans mon programme, j'applaudis des deux mains et je lui dis 'je te donne tout le programme', il peut me passer devant s'il reprend mon programme."
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