: Vidéo Sextape à la stéphanoise : les acteurs de cette affaire digne d'un polar s'expriment dans "Envoyé spécial"

Au cœur de cette affaire, un duo politique ayant pour origine une alliance tactique : si Gaël Perdriau (Les Républicains) a pu se faire élire à la mairie de Saint-Etienne, c'est grâce aux électeurs du centriste Gilles Artigues. Cette figure incontournable de la ville est alors devenue son premier adjoint. Filmé à son insu dans une chambre d’hôtel avec un escort boy, il a été victime d’un piège à la vidéo intime. Un piège tendu par un autre couple d'ambitieux : Samy Kéfi-Jérôme, adjoint au maire, et Gilles Rossary Lenglet, son conjoint.

Le "cerveau" du piège, à l'origine de la vidéo

Mis en examen pour chantage, Gilles Rossary Lenglet se présente ouvertement comme le "cerveau" du piège. C'est lui qui aurait eu l'idée d'un "kompromat" (une vidéo compromettante), revendique-t-il dans "Envoyé spécial" pour piéger le premier adjoint. Mais ce serait sur commande de la mairie – ce que dément Gaël Perdriau – qu'il aurait imaginé ce " moyen de 'tenir' Gilles Artigues", cette " laisse". La vidéo aurait ensuite été transmise au maire et à son bras droit, Pierre Gauttieri. L'objectif : neutraliser un concurrent politique.

Le chantage proprement dit aurait débuté vingt mois plus tard. En septembre 2016, Samy Kéfi-Jérôme fixe un rendez-vous à Gilles Artigues, à qui il a "un petit truc à montrer". Le marché : son soutien au camp LR pour les législatives... ou la diffusion de la fameuse vidéo. Le premier adjoint ne le sait pas, mais il est à l'aube de six années de cauchemar. Appelé à l'aide, le maire va, selon lui, se révéler prêt à utiliser ces images pour le "museler", avec la complicité de son directeur de cabinet, Pierre Gauttieri.

Chantage et menaces du maire et de son directeur de cabinet

Alors que la menace de la diffusion des images se précise, la victime du complot va enregistrer en cachette dans le bureau du maire des propos dignes d'une série noire. "Je pense que vos enfants ne s'en remettront pas", profère par exemple Pierre Gauttieri. Ce chantage se serait poursuivi pendant encore des années. Gilles Artigues s'enferme alors dans le silence ; ses proches ne sont au courant de rien mais sentent bien que le père de famille porte un lourd secret...

A partir de mai 2022, Gilles Artigues est relégué au rang de troisième adjoint. Il ne pourra donc plus, le cas échéant, remplacer Gaël Perdriau à la mairie. C'est alors que la bombe éclate : Mediapart publie les premières révélations, les médias s'emparent du scandale et prennent d'assaut la mairie. Les quatre suspects sont placés en garde à vue. Pour la famille Artigues, tout s'éclaire enfin... 

"Je me suis pris un mur sur la figure", témoigne l'épouse de Gilles Artigues

 

"J'étais sidérée et en même temps, tout s'est éclairé. Je l'avais vu pendant toutes ces années dans un tel mal-être, il était dans une telle douleur que je ne pouvais pas ne pas lui accorder ma confiance", confie Mireille Artigues, l'épouse de l'ancien premier adjoint. Cette intimité mise à nu représente pour elle "une violence inouïe", dont témoigne aussi sa fille Claire-Marie. La famille de Gilles Artigues s'exprime pour la première fois à la télévision.

Fausses factures et détournement de fonds publics pour rémunérer l'auteur du "kompromat" ?

L'enquête judiciaire va maintenant s'orienter vers un possible détournement de fonds. Ce complot politique aurait-il été rémunéré par des fonds publics, des subventions et des fausses factures ? Y aurait-il eu détournement de fonds ? C'est ce qu'affirme Gilles Rossary Lenglet, qui a décidé de tout déballer...

Un conseil municipal houleux... avec un maire qui refuse de démissionner

Désormais soutenu par sa famille, Gilles Artigues, lui, poursuit sa quête de justice. Pierre Gauttieri a été licencié, Samy Kéfi-Jérôme a démissionné de son poste d'adjoint à l'éducation. Au conseil municipal le 30 mai 2023, ne restait que Gaël Perdriau... un maire de la 13e ville de France mis en examen pour chantage aggravé. "Une première dans l'histoire de la ville", relève l'opposition, qui dénonce un "système politique aux relents mafieux, fondé sur la menace et l'humiliation". C'est alors que le conseil est interrompu... par l'incursion de manifestants aux cris de "Perdriau, démission !". Mais pour ce dernier, qui ne craint pas de faire référence à l'affaire Dreyfus ("La vérité est en marche ; rien ne peut plus l'arrêter" déclare-t-il, citant Emile Zola), il n'en est pas question...

Extrait de "Sextape à la stéphanoise", un reportage à voir dans " Envoyé spécial" jeudi 15 juin 2023.

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