Mort de Philippine : "Prendre des mesures pour qu'un tel fait ne se reproduise pas", lance un ancien garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas

L'ancien garde des Sceaux a plaidé pour des réformes suite au meurtre de Philippine, jeune étudiante tuée dont le suspect est un Marocain qui était sous OQTF.
Article rédigé par franceinfo
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Jean-Jacques Urvoas, le 17 mai 2017, alors qu'il était ministre de la Justice. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

"La justice est rendue au nom du peuple français. Si effectivement, il y a des fautes, et à l'évidence il y en a, la justice et l'État aussi se doivent de prendre des mesures pour qu'un tel fait ne se reproduise pas", explique vendredi 27 septembre sur franceinfo Jean-Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux, professeur de droit public à l'université de Bretagne-Occidentale, après la mort de la jeune Philippine dont le corps a été retrouvé dans le bois de Boulogne. Dans cette affaire, le suspect, déjà condamné pour viol, était sous le coup d'une OQTF (obligation de quitter le territoire français).

Selon Jean-Jacques Urvoas, "tout le monde est responsable, il ne s'agit pas d'incriminer telle ou telle responsabilité individuelle. La justice ce n'est pas une affaire d'individus, nuance-t-il. Il y a des systèmes de responsabilités au sein de la magistrature. Il faut articuler une réponse entre l'indépendance de la justice et la responsabilité de ces acteurs".

Différentes interprétations possibles

Condamné en 2021 pour un viol commis en 2019, le suspect avait été libéré, "en fin de peine", en juin, selon le parquet de Paris. À sa sortie de prison, l'homme de 22 ans avait été placé en centre de rétention administrative (CRA) à Metz. Son placement a été prolongé à trois reprises, avant qu'un juge des libertés et de la détention (JLD) ne valide sa sortie du CRA. Il a été maintenu 75 jours. 

Le JLD aurait pu interpréter la règle autrement et maintenir le suspect en détention semble soutenir l'ex-ministre de la Justice : "J'ai appelé plusieurs JLD que je connais et ils m'ont dit que, 'nous quand on a des profils difficiles comme cela, on préfère prendre le risque de la cassation plutôt que d'un crime ou d'un attentat.' Il y a différentes interprétations possibles", appuie-t-il.

"C'est une question de moyens"

"Un fait tel que celui-là, il a malheureusement un seul avantage, c'est le fait de nous interroger sur la pertinence de nos processus sur les défaillances et essayer de remplir les carences". Parce que, "ce n'est pas qu'un problème de droit. La justice, c'est une question de moyens."

Jean-Jacques Urvoas estime que rien ne changera vraiment "quand on aura toujours aussi peu de juges dans les conditions dans lesquelles ils travaillent. Nous avons 11 juges pour 100 000 habitants en France, la moyenne européenne est à 17 juges pour 100 000, vous ne pouvez pas demander la perfection quand les moyens que l'État met à la disposition de ces juges sont insatisfaisants". 

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