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Réforme des retraites : "Ce n'est pas le moment de remettre un sujet aussi conflictuel sur la table", estime Philippe Martinez

Le secrétaire général de la CGT estime qu'il "faut réformer une partie de notre système de retraites, mais pas le système".

Article rédigé par Jean-François Achilli, franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7 min
Philippe Martinez à franceinfo, en octobre 2017. (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

"Ce n'est pas le moment de remettre un sujet aussi conflictuel sur la table", dit ce mardi 8 juin sur franceinfo le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez. Il était interrogé sur la réforme des retraites. "S'il faut discuter des retraites, nous l'avons toujours dit nous sommes prêts, mais pas pour changer le système", rappelle Philippe Martinez, qui parle d'un possible "conflit important" sur la question des retaites.

Le leader de la CGT réagit également sur franceinfo à la gifle reçue par Emmanuel Macron ce mardi dans la Drôme, parlant d'un "geste inadmissible (...) Je crois qu'il faut retrouver la notion de débat avec une autre qualité d'écoute, notamment du gouvernement."

franceinfo : Quel est votre sentiment sur le climat politique après cette gifle assénée au chef de l'Etat lors de son déplacement dans la Drôme ?

Philippe Martinez : Ce geste est inadmissible. Mais plus globalement on ne règle pas les questions démocratiques à coups de gifles dans la figure. Peu importe à qui ça s'adresse d'ailleurs. Ca n'est pas notre conception de la démocratie à la CGT.

Que diriez-vous de ce climat, non seulement politique mais social, y a-t-il une forme de virage, plus marqué par la violence ?

Ces phénomènes de violence on les retrouve parfois, comme ce qu'a connu le cortège social le 1er mai. Cela fait partie des questions qui sont posées à l'ensemble du pays. Je crois qu'il faut retrouver la notion de débat avec une autre qualité d'écoute, notamment du gouvernement. Si ces gestes sont condamnables, évidemment nous les condamnons, il y a un problème démocratique dans ce pays, une qualité d'écoute qui n'est pas à la hauteur des problèmes sociaux et économiques qui sont posés.

13 milliards de déficit global du système de retraite en 2020, c'est moins que ce qui était prévu par le conseil d'orientation des retraites (COR). Vous diriez que ce trou n'est finalement pas si important ? Est-ce qu'il faut tout de même réformer à terme ?

On a voulu nous imposer un scénario catastrophe et heureusement le rapport du COR a corrigé ce scénario. On ne règle pas les problèmes en noircissant le tableau. Oui, il faut réformer une partie de notre système de retraites, mais pas le système. Il faut un système qui soit amélioré, plus égalitaire, notamment pour la jeunesse, pour les femmes. Donc la question qui est posée c'est quelle recette pour la sécurité sociale et donc pour les retraites. Ce n'est pas en exonérant notamment les grandes entreprises de cotisations sociales qu'on va régler le problème des retraites et plus globalement de la sécurité sociale.

Questionné sur cette réforme, le chef de l'Etat a glissé "ce n'est pas moins pire que prévu, il y a encore des déficits", après avoir dit la semaine dernière que la réforme ne pourrait pas être conduite en l'état. Que comprenez-vous des propos d'Emmanuel Macron ?

Moi, j'ai compris que c'est d'abord un message politique en vue des prochaines élections présidentielles. Il veut conforter un électorat potentiellement acquis à sa cause, plutôt un électorat de droite. Il reprend le discours du Medef. On ne réglera pas le problème des retraites en allongeant l'âge de départ ou en augmentant le nombre de trimestres, il faut être réaliste. Est-ce qu'on va faire travailler une infirmière jusqu'à 70 ans ? Ou les fameuses "deuxième ligne" jusqu'à 70 ans ? Et est-ce que c'est en faisant travailler plus longtemps ceux qui ont du boulot qu'on va en donner à ceux qui n'en ont pas ? Et puis aujourd'hui, il y a des questions urgentes à régler : les salaires, l'emploi, les conditions de travail et la question de la jeunesse. Soit on a des priorités politiciennes, soit on a des priorités pour le pays. Il faut que le président de la République explique ses choix.

Que dites-vous ce soir ? On ne réforme pas avant la campagne présidentielle ?

On dit que si on veut qu'il y ait de nouveau un conflit important dans ce pays, on continue, comme fait le président de la République, à ne pas écouter le monde du travail. Et puis, s'il faut discuter des retraites, nous l'avons toujours dit, nous sommes prêts mais pas pour changer le système. Il y a d'autres solutions pour améliorer la situation de ceux qui veulent partir en retraite. Repartons d'une feuille blanche, discutons sérieusement, mais ce n'est pas le moment de remettre un sujet aussi conflictuel sur la table.

Sur le retour demain dans les bureaux, dans les cantines d'entreprise, que faut-il selon vous ? Pas forcément ce retour complet à la normale ?

Il faut écouter les salariés. Certains qui sont en télétravail depuis très longtemps veulent retourner au bureau. Il faut leur assurer des conditions sanitaires correctes, et en même temps laisser le choix aux salariés avec des accords sur le télétravail qui soient beaucoup mieux que ce que l'on connaît actuellement.

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