BD, bande dessinée. Un fado tout sauf fade
C'est une histoire portugaise que nous invite à découvrir Nicolas Barral. Elle a pour titre : "Sur un air de Fado". Elle nous emmène à Lisbonne, quand le pays vivait encore en dictature.
Fini de rire ! Barral abandonne le second degré et la caricature pour livrer une histoire qui lui tient à coeur, et pour laquelle il signe son premier scénario. Comme son titre le laisse entendre, Sur un air de Fado est une fresque historique douce-amère.
Dans les pas de Tabucchi
Quand il s’est marié, Nicolas Barral a trouvé dans le trousseau de son épouse quelques auteurs à lire qui témoignaient de l’origine portugaise de sa promise. Parmi eux, Antonio Tabucchi, qui n’est pas portugais, mais lusophone, à qui on doit le roman Pereira prétend, dont l’histoire se situe pendant la dictature de Salazar.
Très impressionné par le choix que le romancier a fait d’un personnage principal un peu falot, installé dans une sorte de neutralité confortable, Barral prend le parti, quand l’heure est venue de raconter à son tour le Portugal, de mettre en scène un homme, sans doute bon et sympathique, mais qui s’accommode de la situation.
Que ferais-je si j’habitais dans un pays soumis à la dictature. Je décris ce Portugal à hauteur d’homme pour donner envie aux lecteurs de ne surtout pas faire cette expérience.
Barral
Quand la jeunesse et l'amour donnent l'exemple
Barral raconte Sur un air de Fado en deux temps : nous sommes en 1968, lorsque le personnage devenu médecin exerce et, en flash-backs, 10 ans auparavant, pendant ses études. La prise de conscience politique du héros passera par la fréquentation, ici et là, des femmes dont il tombe amoureux. Et par la rencontre avec un jeune garçon, un gamin insolent, plus courageux que bien des adultes.
Entrer en résistance, je pense que ce n’est pas donné à tout le monde. Ça a probablement à voir avec la jeunesse. Mais quand on voit ce petit garçon avoir tout ce courage, on ne peut pas rester indifférent et immobile.
Barral
La Révolution des œillets surviendra en 1974. Libéré de la dictature, le Portugal pourra enfin profiter de la lumière qui baigne les pages de cette bande dessinée où tous les personnages jouent juste pour porter des sentiments en demi-teinte.
Sur un air de Fado, Barral, aux éditions Dargaud.
Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Lætitia de Germon de la rédaction de franceinfo.fr. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Lætitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.
My broken Mariko, de Waka Hirako, chez Ki-oon
Pour sa première œuvre, la mangaka Waka Hirako livre un récit poignant. Elle aborde le suicide en s'inspirant d'une histoire vécue par sa mère.
Quand Tomoyo apprend aux informations la mort de son amie Mariko, elle n'arrive pas à y croire. Elles s’étaient pourtant vues la semaine précédente, sans que rien ne laisse présager un tel drame. Mariko, à la jeunesse brisée, qui lui vouait une admiration sans bornes et qui s’est vraisemblablement suicidée… Tomoyo ne contient pas sa rage : elle doit trouver un moyen de rendre un dernier hommage digne de ce nom à sa seule confidente.
Ce drame social, intime, ne ménage pas le lecteur qui est amené à ressentir la colère, la tristesse et parfois les moments plus légers, drôles, vécus par Tomoyo. Les dessins font corps avec le récit. Très expressifs, ils sont parfois presque déformés par l'émotion. La mangaka dépeint avec justesse les états d’âme de ses deux personnages. Il n'est pas toujours facile d'accepter un tel choix de la part d'un proche.
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