États-Unis : une intelligence artificielle appelle des milliers d'électeurs au téléphone pour promouvoir un candidat en campagne
Pendant les campagnes électorales, les volontaires sont essentiels pour aller chercher des voix. Ils font un travail parfois ingrat, celui de contacter des électeurs pas forcément intéressés, en vue de les influencer, et ils essuient beaucoup de refus. Une start-up, basée à San Francisco et à Londres, a donc créé Ashley, une entité capable d'assurer ce travail difficile. Les créateurs sont un binôme, un spécialiste de la tech financière et un ingénieur qui a déjà développé une voiture autonome.
L'entreprise, Civox, a proposé ses services pour la première fois à Shamaine Daniels, une candidate démocrate à la Chambre des représentants, l’équivalent de notre Assemblée nationale. Elle est opposée à Scott Perry, un républicain qui fait l'objet d’une enquête concernant son rôle dans l’insurrection du 6 janvier 2021. Elle avait perdu de 8 points, lors de la précédente élection en 2022, dans une circonscription de Pennsylvanie, près de New York. Or, cette circonscription est importante car elle n’est pas fondamentalement rouge ou bleue, donc la gagner aiderait les démocrates à reconquérir la majorité à la Chambre. Daniels a trouvé séduisante la proposition d'avoir recours à Ashley, d'autant plus qu’elle n’a pas les moyens financiers de son adversaire.
Une connaissance approfondie des dossiers
Ashley appelle donc les électeurs, un par un, pour leur parler du programme de Shamaine Daniels, pour les convaincre de participer financièrement à sa campagne et pour les inciter à voter pour elle. Elle se présente au téléphone comme une intelligence artificielle qui se dévoue pour la campagne de Daniels. Sa voix a volontairement gardé un aspect robotique, pour qu'elle ne soit pas confondue avec un humain. Contrairement à un appel automatisé, dont les réponses sont enregistrées, elle est capable de réagir aux questions qu’on lui pose et d’interagir avec la personne au téléphone. De plus, à la différence d'un volontaire humain qui ne connaît pas forcément tout le programme de la candidate, Ashley a une connaissance approfondie des dossiers. C'est un avantage majeur, de même que sa capacité à communiquer dans 20 langues.
Mais si on la programmait en ce sens, Ashley serait également capable de mentir sur l’adversaire de la candidate. Seule, la bonne foi de ses créateurs et de l’équipe de la candidate l'en empêche pour l'instant. Légalement, il n’y a - en Pennsylvanie du moins - rien de prévu pour une nouvelle technologie comme celle-là.
En attendant une loi pour éviter les abus
Les créateurs de Civox, qui ne veulent travailler qu’avec des démocrates ou des républicains modérés, appellent de leurs vœux une régulation pour éviter les abus et la désinformation. Récemment, un groupe soutenant le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, candidat à la primaire républicaine, a falsifié la voix de Donald Trump dans un spot publicitaire. Mais une loi n'aura probablement pas le temps d'être écrite et votée d’ici les élections de novembre 2024.
Civox assure à l’agence Reuters qu’Ashley a de toute façon été formée à s’en tenir aux faits. Le site Politico a pu tester l’IA. Celle-ci a botté en touche, ou basculé l'appel vers un volontaire humain, quand les questions l’invitaient à donner son avis.
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