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C'est dans ma tête. Télétravail ? Pas si facile à vivre…

Le télétravail ne convient pas à tout le monde. Même si les technologies permettent de réaliser des prouesses en ces temps de crise sanitaire planétaire, ce mode de travail à domicile pose un certain nombre de problèmes.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Confinement, télétravail, reconfinement, à nouveau le télétravail. Les risques psychologiques liés à ce mode d'organisation du travail sont bien réels.  (PHOTOPQR / LE COURRIER PICARD / MAXPPP)

Le premier confinement a donné au télétravail une grande importance et, à la suite de cette expérience (qui se poursuit dans le second confinement), certains ont vu, dans ce mode d’organisation, une perspective possible, à long terme. Nous en parlons aujourd'hui avec la psychanalyste Claude Halmos. 

franceinfo : Que représente, sur le plan psychologique, le télétravail, et quels sont les problèmes qu’il pose ?

L’expérience du premier confinement a mis en lumière les avantages du télétravail, mais aussi les problèmes qu’il peut poser aux salariés ; qui sont d’autant plus importants qu’ils recouvrent des problèmes psychologiques dont on ne mesure pas toujours l’importance.

Télétravailler ne se résume pas en effet à déplacer son travail d’un lieu dans un autre, car nous sommes, sur le plan psychologique, deux personnes à la fois : l’une dans notre vie privée, et l’autre dans notre vie professionnelle. Deux personnes avec, chacune, une image d’elle-même, un rapport aux autres, etc…qui peuvent être très différents. Et nous avons besoin que ces deux personnes existent.

Or les rassembler, par le télétravail, dans un seul lieu comporte le risque, si l’opération est définitive, que l’une des deux ne trouve plus sa place, voire même disparaisse. Et cela explique l’importance (même en cas de télétravail temporaire), des problèmes d’organisation du temps, et de l’espace, dont l’enjeu est, en dernière analyse, que ces deux personnes aient chacune une place ; et une place suffisamment distincte de celle de l’autre, pour que leur coexistence soit possible. Ce qui n’est pas évident.

Pourquoi ?

L’existence de la "personne professionnelle" est menacée parce qu’elle a, sur son lieu de travail, des points d’appui qui la font exister. Ces points d’appui (dont on sait par ailleurs combien la disparition, en cas de chômage, est difficile) ce sont, au-delà des tâches à accomplir, les rapports avec la hiérarchie et les collègues, des repères en termes de lieux, et d’horaires, mais aussi le sentiment d’appartenance à la communauté que représente l’entreprise.

Le télétravail la prive de ces points d’appui. Elle doit donc les réinventer, seule, pour ne pas perdre de vue le sens de son travail, mais aussi ne pas s’imaginer, en cas de problèmes dans l’entreprise, isolée et sans protection. Et il faut que, de son côté, l’entreprise maintienne, pour soutenir les motivations de ses salariés, le lien à sa structure. Mais la "personne privée" est, elle aussi, menacée par le télétravail.

De quelle façon ?

Le télétravail présente un risque d’envahissement, par le travail, de la vie privée. D’envahissement de l’espace (la maison n’est plus le lieu, protecteur et protégé, du couple, de la famille, de l’intimité). Et du temps : la "personne professionnelle" n’a plus le temps du trajet travail-domicile, pour mettre à distance ses problèmes de travail, et passer le relais à la personne de la vie privée. Elle ne peut plus "fermer la porte".

Et elle peut d’autre part, avoir du mal à mettre des limites à ses activités professionnelles, et à rester disponible pour son couple, pour ses enfants et pour elle-même. Le passage définitif au télétravail mérite donc, dans chaque cas, une évaluation préalable de ce que l’on à y gagner, et à y perdre.

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