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Chef d'entreprise en banlieue : dur

Les entrepreneurs des quartiers veulent se développer. Un parcours, souvent parsemé d’obstacles. Pour les aider, des speed meetings étaient organisés, ce lundi, à Paris. Dur.
Article rédigé par Nathalie Bourrus
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Un entretien d'embauche  © Getty images)

Remontés comme des pendules, des chefs de TPE (Toute Petites Entreprises), ont tenté leur chance. Une minute 30, pour convaincre LA grosse boite.  Ils sont assis, face à face, dans une salle surchauffée, et pleine à craquer. Ils sont face à La Sncf, la Banque postale, Euro Disney. Autant dire des monstres sacrés. 

Je les regarde, ça fait presque de la peine, de voir, un homme, un adulte, venu de son quartier, "faire l’article" sur son produit ou son service. On voit ceux qui sont aux abois et qui se démènent, corps et âme. *"Ça va ? Ça a marché ?"

"Bof, j’ai vu quelqu’un mais, la boite que je voulais voir, n’est pas présente." *

Banques pas sympas

Moi : "Ah zut, c’est dommage"

Lui : "De toute façon, c’était une banque. Et les banques, vous savez…"

Moi : "Quoi, les banques ?"

Lui : "Disons que les taux sont bas, certes, mais les prêts sont accordés, à qui, à votre avis ? Pour nous, venant des quartiers, c’est très très difficile…"

Et ce n’est pas Hélène Geoffroy, la non-médiatique ministre de la Ville, qui va démentir cette idée. 

"Ils ont une capacité très grande, à convaincre, me dit-elle. C’est ça qu’ils doivent développer dans les quartiers, le potentiel est là"

Moi : "Oui. On nous dit ça, depuis des lustres j’ai l’impression mais ils ont besoin de coup de pouce. Réels." 

Elle : "Oui, et surtout il faut arrêter avec le système compassionnel. Ce n’est pas de charité, dont ces entrepreneurs ont besoin"

À côté de nous, un petit entrepreneur de Seine-Saint-Denis, écoute. C’est un homme, très très énervé. Mais, attention, Emmanuel Macron arrive. 

Un homme énervé

Exit, l’homme énervé. Tout le monde se rue sur le ministre. "Bonjour ! " lance-t-il, tout sourire.  On lui présente une borne à CV. Il s’agit de se présenter, et hop c’est enregistré dans la boite

"Allez, on essaie" , dit Emmanuel Macron. Et le voilà parti, face à l’écran : "Nous cherchons 10 000 contrats d’acheteurs, très vite. Vous n’avez plus le choix ! Il faut 10 000 contrats !"

Fastoche !

Il serre toutes les mains, glisse des clins d’œil par ci par là. Un marseillais le poursuit, pour lui donner son dossier. Les cartes de visite, atterrissent, comme par miracle, dans sa poche. 

Le patron, très très énervé, de tout à l’heure, est toujours, derrière nous. Macron prend la parole. 

Hypocrisie

Il parle de tous ces jeunes, qui veulent devenir entrepreneurs. Mais, dit-il… "C’est très difficile pour eux, dans les quartiers. Il faut repenser les politiques d’accès"

L’homme en colère, est toujours. "Vous en pensez quoi ?"Attention : déversement à venir. "  Ben, il faut savoir que les plus mauvais payeurs, ceux qui nous mettent dans le Rouge. Nous, les tout petits des banlieues : ce sont les très grosses boites, par exemple : celles qui sont là aujourd’hui"

"Vous êtes sévères tout de même. C’est toujours bien d’organiser ce genre d’évènement". 

"Mais oui, je suis pour ! C’est super ! Mais bon, moi, je souffre…Et il y a une chose que je trouve insupportable : c’est l’hypocrisie… et là, aujourd’hui, avec ces grosses boites, on est en plein dedans." 

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