Dans le calme quartier de la Nacre, zone de sécurité prioritaire de l'Oise
Cela saute aux yeux quand on arrive. La commune de Méru est littéralement coupée en deux. D'un côté de la
voie ferrée, on trouve de petites rues,
des maisons en pierre, une jolie
église qui toutes les heures sonne comme dans
tous les villages traditionnels de France. De l'autre côté du chemin de fer et de la grand route, là on
aperçoit les immeubles "années
60 " du quartier de la Nacre. Certains ne font que 4 ou 5 étages, mais il y a aussi
de grandes tours comme celle qu'on trouve en banlieue parisienne. Dans ce
quartier, on compte une très grande majorité de logements sociaux. Sans trop s'avancer, on imagine que c'est sans
doute là que le ministère veut concentrer son action en matière de sécurité.
Le quartier de
la Nacre a connu plusieurs nuits d'émeutes au début des années 2000. Il y a même eu des rixes avec les pompiers et le
"Mille clubs ", sorte de maison des jeunes a entièrement brûlé en 2001. "Mais aujourd'hui tout ca c'est très loin, ça s'est plus que
calmé ", assure Yaya 24 ans.
"Nous classer aujourd'hui en zone de sécurité
prioritaire, ils ont abusé, les
politiques! C'est vraiment mal connaître Méru. La délinquance, la violence c'est
du passé".
"C'est plus du tout la réalité d'aujourd'hui ", ajoute le jeune homme qui a
grandi dans un appartement du quartier avec toute sa famille originaire du Mali.
Et c'est vrai que
cette cité semble plutôt apaisée. Il y a bien le bruit des mobylettes, mais tout
le monde se salue. Rares sont les murs taggués. Les boites à lettres sont
intactes. Les ascenseurs et les digicodes fonctionnent plutôt bien.
Certes,
on devine que pour les jeunes privés de vacances, l'été qui
s'achève a été ennuyeux, mais il n'a pas été remuant, pas agité. On est très loin des tensions de Marseille ou d'Amiens
nord.
Samir Bousnina dirige le centre social. Quand on se promène avec lui dans les avenues de La
Nacre, on comprend qu'il connait tout le monde dans le quartier. Il faut dire qu'il n' y a que 900 appartements, c'est
finalement assez peu. Samir connait
aussi très bien les différents plans de politique de la ville qui se sont
succédés -
pour ne pas dire empilés - au fil des années, au gré des
gouvernements. Alors, même si ca n'est pas
complètement justifié si Méru peut bénéficier des
avantages de ce nouveau classement en "zone de sécurité prioritaire ",
"c'est toujours bon à prendre ",
commente-t-il.
"Une fois le dispositif s'appelle ZUP ou ZEP, il change et se
transforme en ZAR ou en ZST. Nous, les travailleurs sociaux, tous ces sigles
nous amusent. L'essentiel c'est que derrière, cela signifie souvent plus de
moyens. Là si ce sont plus de moyens contre la délinquance tant mieux, à
condition qu' on n'oublie pas non plus la prévention, l'éducation, la
santé ", ajoute-t-il.
Grâce aux moyens de l'Etat, la rénovation
urbaine est également en route dans le quartier de la Nacre. Plusieurs
immeubles sont tombés. Des tours doivent encore être rasées. "Ca fait du bien ce changement, ca fait place
nette, les gens bougent, il y a plus dfe places pour les espaces verts destinés
aux enfants, et puis les bâtiments qui seront reconstruits ensuite ici seront
bien moins hauts : des bâtiments de 2 ou 3 étages, c'est bien plus vivable, bien
plus sympa" explique Hanan qui vend des sandwichs juste en face d'un des bâtiments à
démolir. "Ces nouveaux aménagements de la
cité, ce ne sont que de bonnes nouvelles, même si certaines personnes vivent par
exemple dans cette tour-là depuis 40 ans et vont devoir la quitter " dit la
jeune femme.
Finalement étant donnée la bonne dynamique
de ce quartier, la présidente de
l'association de quartier Brigitte Morin s'interroge sur le bien fondé de son
classement en zone de sécurité prioritaire.
"La vie n'est pas parfaite ici. Ca n'est pas le paradis complet mais
elle est devenue agréable ces dernières années ici. Les habitants sont capables
de s'entraider, d'improviser même des moments de fêtes entre eux comme cet été
pendant le ramadan" raconte la quadragénaire installée là depuis 15 ans.
"Du coup, je me demande si nous coller cette nouvelle étiquette de zone de
sécurité prioritaire, ça ne risque pas de de nouveau nous pointer du doigt, nous
stigmatiser. Ca c'est un effet pervers quand on sait qu'avec la crise, même si
tout est calme aujourd'hui, il ne faudrait pas grand chose pour rallumer la
mèche et faire naître une explosion de colère ", s'inquiète-t-elle.
La
mauvaise publicité du classement en zone prioritaire risque aussi - c'est un autre des effets pervers - de
faire plonger les prix de l'immobilier dans les
environs. Cela inquiète les
professionnels du secteur. Mais ce qui préoccupe le plus la population dans
l'ensemble, c'est davantage la question
de l'emploi. Dans le quartier de la Nacre,
45 % des moins de 25 ans sont au chômage.
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