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Au Maroc, à Jerada, un mouvement social tient malgré la répression

À Jerada, au nord-est du Maroc, des manifestations se tiennent quotidiennement. Cette ancienne ville minière se sent abandonnée par le pouvoir. Fin décembre, deux frères sont décédés dans une galerie clandestine, depuis les habitants ne décolèrent pas.

Article rédigé par franceinfo - Stéphanie Wenger
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Une manifestation d'habitants de Jerada au Maroc demandant l'application des promesses du gouvernement pour développer la région. (JALAL MORCHIDI / ANADOLU AGENCY)

La mine de Jerada dans le nord-est du Maroc a officiellement fermé, il y a près de 20 ans. Depuis, la région est paralysée et aucune activité n'est venue remplacer le charbon. Le taux de chômage est un des plus hauts du royaume. Il s’élève à 32%.  Le taux de pauvreté grimpe à 11% contre 5% dans le reste du pays. Pour s’en sortir, les hommes continuent de descendre de façon très précaire dans des puits clandestins pour extraire le minerai. Un autre décès dans l’éboulement d’un puits en février, a nourri la colère des habitants.    

Des manifestations sévèrement réprimées

La semaine dernière, la situation a dégénéré à Jerada. Mercredi dernier, un rassemblement a été dispersé, suivi d’affrontements entre manifestants et forces de l'ordre. Il y a eu des blessés des deux côtés. Le ministère de l’Intérieur a annoncé  9 arrestations, mais des sources sur place évoquent une vingtaine d’interpellations.  Jusqu’à présent pourtant les autorités avaient laissé faire les rassemblements qui se passaient tous dans le calme.

Mais, depuis une dizaine de jours, l’approche des autorités, qui disait miser sur le dialogue, s’est durcie. Le pouvoir semble désormais décidé à réprimer la contestation, accusant au passage des groupuscules politiques d’être derrière les manifestants. Les revendications restent pourtant toutes économiques et sociales, mais la libération des personnes arrêtées s’ajoute désormais aux demandes du mouvement.

Quelle réponse économique du gouvernement ?

Plusieurs ministres sont venus à Jerada. Un plan d’urgence de 2 millions d’euros a été lancé. Certains chantiers sont d’ailleurs déjà en cours de réalisation, assurent les autorités locales : l’extension de la zone industrielle, par exemple, des projets agricoles ou des coopératives de mineurs.

Pour autant, sur place, beaucoup ne sont pas convaincus. Ce sont des petits projets, disent-ils, pas la véritable alternative économique qu’attend cette région depuis 20 ans.

Des mouvements dans d'autres régions 

Plus au nord, le Rif connaît aussi des troubles depuis fin 2016. L’étincelle a été la même : une mort tragique, révélatrice des difficultés d’un territoire. Là-bas, un vendeur de poissons a été broyé par un camion à ordures alors qu’il tentait de sauver sa marchandise illégale saisie par la police. 

Dans le Rif, le mouvement du "hirak" porte le même genre de revendications : économiques et sociales pour sauver une région enclavée. Là-bas aussi des violences ont éclaté. Aujourd’hui, alors que des centaines de personnes sont emprisonnées en lien avec ces événements du Rif, beaucoup d’observateurs craignent que ce scénario, dont on peine à voir l’issue, se reproduise à Jerada.

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