Sa vie vaut bien un musée au Brésil
La
clairière se distingue à peine depuis le fleuve Mamoré, et pourtant elle mérite
le détour. C'est ici, à Guajarà-Mirim, tout à l'ouest du Brésil, dans l'Etat du
Rondonia, que vit Claude Furlanetto. Le Français sert de guide à la poignée de
curieux qui visite, chaque jour, ébahis, ce drôle de musée installé au beau
milieu de l'Amazonie, sur les deux étages de l'ancienne gare de Guajarà, que la
mairie lui a confiée. "C'est un morceau de ma vie que j'ai mis là-dedans,
et il fonctionne ! explique Claude, grand gaillard à la voix fluette. J'ai reçu
des présidents de République, des ambassadeurs, des ministres d'Etat, des
consuls. Ca m'a fait du bien, ça m'a donné beaucoup de courage. "
Au
pays des "seringueros"
Ici,
Claude, naturaliste passionné, a entassé tous ses souvenirs d'Amazonie.
D'incroyables collections de papillons et d'insectes voisinent avec des
vestiges indiens glanés ça et là à sillonner les rives du fleuve. Sans parler
de cet anaconda de 4 mètres de long qui trône dans
un bocal de formol. La vieille gare est aussi le témoin d'une époque révolue. "Le
train servait pour retirer le caoutchouc, qui venait de Bolivie et du Brésil,
du Haut-Guaporé, détaille Claude Furlanetto. Beaucoup de gens sont morts sur le
chantier parce qu'il y avait beaucoup de malaria. Quelques-uns se sont fait
tuer par des Indiens aussi. Mais ils ont réussi, après quelques années, à
construire le chemin de fer, comme il n'y avait pas de route." Construite
dans les années 30, la gare de Guajarà-Mirim a été définitivement fermée en
1962, à cause de la concurrence de la Chine. Seule une antique locomotive
vapeur qui trône devant le musée rappelle ce passé glorieux des "seringueros", ces courageux qui partaient chaque jour en forêt
recueillir le précieux latex produit par les hévéas. La voie ferrée relie alors
Guajarà à la grande ville de Porto Velho.
Un
baluchon sur l'épaule
Cela
fera bientôt soixante ans que Claude vit ici. Débarqué en Amazonie par hasard,
parce qu'il était tombé, dans la vitrine de chez Mollat, à Bordeaux, sur un
livre consacré au Brésil. "A l'époque, raconte-t-il, j'avais 20 ans et je
rêvais de liberté et de grands espaces. Et puis les souvenirs de la Seconde
guerre mondiale étaient encore bien présents." Nous sommes en 1953.
Claude Furlanetto quitte, un baluchon sur l'épaule, sa région natale de Saussignac,
près de Bergerac, en Dordogne. Aujourd'hui, il a fait sa vie là-bas et épousé
Maria, une Bolivienne, qui lui a donné 4 beaux enfants métisses. Pendant plus
d'un demi-siècle, il n'est pas rentré, jusqu'à ce que le maire de Guajarà lui
offre, en 2007, un billet d'avion pour la France à l'occasion des 25 ans du
musée.
Aller plus loin
Retrouvez ce portrait dans le magazine régional d'informations Objectif Aquitaine
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