Alain Decaux, la voix de l'histoire
Retour en 1957. L’ORTF lance une nouvelle émission d’histoire. André Castelot et Alain Decaux sont aux commandes…
"Et bien, je voudrais tout de même rassurer nos téléspectateurs et également certains journalistes, que nous remercions, qui ont cru que les énigmes étaient mortes. En fait, elles ne sont pas mortes, et dans le cadre même de la présente émission, périodiquement, nous ressusciterons certains problèmes mystérieux."
Avant "La caméra explore le temps", il y avait eu "Tribune de Paris" à la radio en 1951. Réticents au départ, Castelot et Decaux accepteront finalement d'aller à la télévision, média auquel ils ne croyaient guère !
Les reconstitutions historiques produites dans les studios des Butttes-Chaumont connaissent un immense succès. Les thèmes sont populaires mais le producteur Stellio Lorenzi, communiste, fait passer aussi des idées sur l’arbitraire sur les injustices…Les deux numéros sur Danton et Robespierre, la Terreur et la Vertu, sur les Cathares ou l’Inquisition en témoignent :
Mais Alain Decaux devient une grande figure médiatique avec une nouvelle émission: "Alain Decaux raconte", où il invente un ton, un style, ce que Pierre Nora appelle "Le moment Decaux"…
"Jusque-là on avait peur d'une petite femme en noir...maintenant on a peur d'un cadavre de femme en noir....Et savez-vous combien de Parisiens vont suivre le cortège...Cent mille...Cent mille Parisiens qui suivent et qui pleurent Louise Michel"
Seul, sans prompteur, pendant 3/4 d'heure, à une heure, Alain Decaux captive.
Mais, l'inventeur de l'histoire médiatique n'est pas un historien, et ne se revendique pas comme tel. Voilà notamment ce qu'il disait dans un entretien en 1984:
"L’historiographie ? Sûrement pas. Je pourrais faire, par exemple, une émission sur la formation de la légende napoléonienne, sujet sur lequel il existe déjà des ouvrages remarquables. Je n’intéresserais pas grand monde. Est-ce que je m’intéresserais moi-même ? Je préférerais évoquer le retour de l’île d’Elbe, oui, parce qu’il s’agit d’un moment exceptionnellement fort."
Pour autant l'oeuvre d'Alain Decaux va évoluer. Les têtes couronnées ou les énigmes laisseront peu à peu la place à des sujets plus difficiles, plus politiques. On l'a entendu sur Louise Michel en 1979, mais il y aura eu aussi dix ans plus tôt un plaidoyer pour les époux Rosenberg ou une belle série sur "L'Histoire des Françaises".
Mais quand Alain Decaux entre à l'Académie française en 1980, c'est bien le conteur, le passeur et non l'historien qui est célébré.
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