Le premier tour de la présidentielle : le duel, la claque et la surprise
A la Une évidemment, la présidentielle, le premier tour, et déjà un peu le second tour. D'abord un coup d'oeil sur les titres dans la presse de ce lendemain d'élection. Avant la presse du matin ici en France, on va prendre un peu de recul, avec le regard de la presse étrangère...
La presse étrangère qui elle aussi a suivi ce match présidentiel. On s'intéresse à cette élection jusqu'en Inde : le magazine Courrier international sur son site internet raconte la folle journée de la correspondante en France du journal The Hindu de Madras... une journaliste très sollicitée, elle explique que les Indiens s'intéressent à la France qui reste pour eux le partenaire privilégié en Europe, notamment pour ses hautes technologies...
La correspondante du journal argentin la Nacion était elle aussi sur le pont pour raconter la présidentielle française à ses compatriotes à 12 000 kilomètres de Paris...
Journée compliquée pour le journaliste chinois d'un quotidien de Shangaï : il doit à la fois gérer le décalage horaire et expliquer cette élection tellement française à ses lecteurs chinois...
Plus près de chez nous, pour le confrère italien du Corriere della Sera, "Hollande est premier, mais la gauche n'a pas encore gagné", et ce qu'il retient du scrutin, c'est d'abord le score du Front national. Le titre du quotidien de gauche la Repubblica : "Hollande devant, ouragan le Pen", la Repubblica pour qui Sarkozy a été giflé dans sa course à l'Elysée. La Repubblica souligne que les deux finalistes devront se disputer le vote de la colère...
Enfin vu d'Allemagne et c'est à lire cette fois sur leparisien.fr...
L'ensemble de la presse d'Outre-Rhin retient elle aussi un vote de colère, la presse allemande qui est unanime à souligner le score élevé des extrêmes, côté Le Pen, comme côté Mélenchon.
Explication selon le Spiegel, les Français sont frustrés en voyant l'état de leur pays, et en colère contre Nicolas Sarkozy.
Pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung, pour gagner au deuxième tour, Sakrozy devra gagner des voix à la fois du côté de l'extrême-droite et du centre, ce qui serait souligne le journal "une prouesse inédite dans l'arithmétique politique".
D'où le sentiment général dans la presse allemande : c'est résumé par le titre d'un éditorial du Frankfurter Allgemeine Zeitung :"Avantage Hollande"...
Retour en France, le premier tour vu cette fois par nos journaux à nous ici en France...
Et c'est comme au lendemain d'un match, on se repasse les meilleurs et les pires moments. On refait l'histoire et on pense déjà au match d'après. Dans ce jeu politique aux règles compliquées, le match aller de la présidentielle hier s'est donc joué à 10, le match retour va se jouer à deux...
Côté public, le stade était bien rempli, malgré ou grâce à la météo maussade, le public a été nombreux à se déplacer. Et ce matin, les finalistes sont donc à l'honneur, les visages de François Hollande et Nicolas Sarkozy à la Une du Figaro, du Parisien et d'Aujourd'hui en France, des Echos et de la Croix... Les deux finalistes qui sont aussi à la Une de la plupart de vos journaux régionaux.
"Un duel attendu titrent le Parisien et Aujourd'hui en France, mais aussi une surprise, car c'est l'autre visage du jour à la Une des deux quotidiens, le visage de Marine le Pen qui s'invite comme la "trouble-fête du second tour", c'est l'un des titres de Libération.
Pour le Figaro, toujours à la Une, "la percée de Marine le Pen relance le second tour"... La "surprise Marine le Pen" titre aussi la Nouvelle République, le Pen "en arbitre" pour Nice Matin.
Vaucluse matin résume en trois mots et trois photos ce premier tour : "un duel Hollande-Sarkozy, une surprise Marine le Pen avec un score historique, et une double déception, celle de Jean-Luc Mélenchon et François Bayrou loin des scores qu'ils espéraient"...
Un autre résumé en quelques mots à la Une de l'Echo de la Haute-Vienne : "Hollande le favori, Sarkozy la claque, le Pen le danger et Mélenchon le combat".
Parmi les Unes des magazines qui vont trancher cette semaine dans les kiosques, il y aura celle de Marianne à paraître exceptionnellement demain. Une couverture tout en noir, avec un Sarkozy accablé et ce seul mot : "Fin". Comme en écho, toujours sur la même couverture noire de Marianne, un seul autre titre, "Marine le Pen, le mal français".
Pour la Voix du Nord, la surprise hier, c'était donc le Front national, encore et toujours le Front national, qui s'invite depuis 30 ans à toutes les élections, le FN, ce convive qui tire sur la nappe, ce visiteur qu'on ne maîtrise pas écrit Jean-Michel Bretonnier. Ce visiteur qui pour la Voix du Nord ne sert à rien sinon à rappeler que le monde change et que la France ne l'accepte pas.
Pour Guillaume Tabard dans les Echos, le score de Marine le Pen, c'est aussi un camouflet pour les élites politiques et médiatiques, dont elle n'a pas fini de dénoncer l'aveuglement et le décalage avec le "pays réel"... Pour les Echos, il suffit pour comprendre ce décalage de se rappeler ce qu'on a entendu sur la "vague Mélenchon" que rien ne pouvait arrêter, ou sur Marine le Pen qui se serait "trompée de campagne". Pour les Echos, parvenir à mieux comprendre les sentiments réels des Français, c'est aussi une des leçons du premier tour.
Alors Marine le Pen sera-t-elle l'arbitre du match du 6 mai ? C'est oui pour le Figaro et pour Var-matin, et c'est oui aussi pour Ranson, le dessinateur du Parisien, qui a croqué une Marine le Pen en chemise noire, "t'en as une belle chemise noire, Marine..." lui dit son père Jean-Marie, "t'emballe pas papa", répond sa fille, "c'est ma tenue d'arbitre"...
Et comme pour un match, les supporters ont choisi leur camp...
Des supporters qui se préparent pour la finale... Le Figaro souligne que "c'est tout à fait jouable pour Nicolas Sarkozy"... Même si Etienne Mougeotte reconnaît dans son éditorial qu'il faudra un sursaut pour aider son candidat à l'emporter, un sursaut aussi bien du côté de Marine le Pen que du côté de François Bayrou...
Immense défi souligne encore le Figaro, trouver les mots et les arguments pour éviter de confier l'Elysée à la gauche le 6 mai...
Et comme pour un match, rien ne sera négligé à l'entraînement : le Figaro pronostique une "campagne effrénée" du côté de l'UMP qui prévoit un meeting par jour et qui mise sur quinze jours d'omniprésence médiatique du président-candidat pour renverser les pronostics...
En face, contrairement à beaucoup d'autres, Libération a choisi de mettre à la Une non pas la photo des deux finalistes, mais la photo du seul François Hollande... "C'est son tour", c'est un des titres en pages intérieures de Libération.
Deux enseignements du premier tour pour Nicolas Demorand : la nette victoire de François Hollande et l'échec de Nicolas Sarkozy. Hier soir, pour Libération, l'horizon du candidat socialiste s'est joliment nimbé de rose...
Et du côté de l'entraînement, pour le match du 6 mai, quand l'équipe Sarkozy prévoit d'accélérer, l'équipe Hollande prévoit surtout selon Libération de ne rien changer : pas de nouvelle affiche, pas de nouveau slogan, juste la sacro-sainte "constance" hollandaise face au rouleau compresseur annoncé du côté Sarkozy. Une certitude du côté d'Ouest France : on va vivre un entre-deux tours acharné...
Côté coulisses maintenant, le match s'est aussi joué sur Internet...
Un match particulièrement animé sur Twitter, c'est raconté dans Libération, dans le Figaro et dans les Echos qui parlent d'un "joyeux tohu-bohu" sur la Toile... Malgré ou à cause des mises en garde officielles, les internautes s'en sont donné à coeur joie pour contourner les règles de publication des résultats... Ce sera aussi l'une des leçons à tirer de cette élection.
Les internautes qui se donnaient rendez-vous hier sur le réseau social avec le mot-clé "radiolondres". Un florilège de messages plus ou moins codés pour annoncer les résultats en toute illégalité, genre "Carla prépare le carosse pour Varennes" ou encore "le prix du flan a drôlement augmenté mais les Rolex sont en solde"... et aussi un pittoresque "le flan est au chaud, le goulasch est au frais"... Ou encore un bulletin météo : "Amsterdam, donc Hollande, 27-28, Budapest, allusion à Sarkozy, 26-27, Berlin pour Marine le Pen 17-18, Moscou pour Mélenchon 13-14"...
Cryptage léger tout à fait inutile d'ailleurs puisque les résultats des premières estimations pas très éloignées du résultat final circulaient dès le milieu de l'après-midi sur les sites francophones belges ou suisses du Soir, du Matin, de la Tribune ou de la RTBF...
L'AFP elle-même a fini par briser un tabou en diffusant à 18H46 le noms des qualififés pour le second tour... Comme le rappelle le Parisien, les internautes se sont bien amusés, mais la loi est la loi, et la justice aura sans doute son mot à dire sur l'épidémie de fuites qui a marqué la journée d'hier, puisque le Parquet de Paris doit ouvrir une enquête visant l'AFP et les sites qui ont "fuité".
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