"Danser les ombres" : Laurent Gaudé, brillamment lyrique
Rares sont les écrivains qui assument et maîtrisent leur lyrisme, dans ce livre c'est poussé à un tel point, qu'on entend un opéra, en trois actes: acte 1 avant la tragédie, Haïti, île à l'histoire violente, les années Duvalier père et fils, les années Aristide, semble enfin apaisée, acte 2 le tremblement de terre et acte 3 la veillée des morts, les ombres dansent, les morts accompagnent les vivants pour leur dire, continuez à vivre.
Il y'a Lucine, qu'on imagine soprane en guenilles dans les décombres, elle revient à Port au Prince après un exil familial forcé à Jacmel, elle rencontre ou retrouve dans la capitale des personnages magnifiques, une bande d'amis, libres, poètes du quotidien, un ancien tenancier de bordel, un médecin raté grand humaniste, il y'a le salaud, ancien tonton macoute qui ne fait plus peur à personne, et comme un chœur dans un opéra de Verdi, les élèves infirmières, dont certaines resteront sous les décombres et Laurent Gaudé comme beaucoup de visiteurs étrangers, a été frappé en voyant ces écoliers aux tenues impeccables dans les rues couvertes de fatras à Port au Prince.
Dans une langue simple et poétique, qui ne tombe pas dans le piège de l’emphase, l’auteur s’empare des clichés qui font l’image de l’île, comme le vaudou, qui fait partie de la vie à Haïti et la scène finale du roman, qui réunit morts et survivants, fait culminer la force lyrique de ce récit.
"Danser les ombres" de Laurent Gaudé chez Actes Sud.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.