Festival d'Avignon 2023 : "Extinction" de Julien Gosselin, une troupe virtuose qui danse au bord du volcan
Pour commencer ce marathon théâtral de 5h, spectateurs et acteurs dansent sur scène au diapason de deux DJ survoltés. En 2013, Julien Gosselin dynamitait le festival d'Avignon avec son adaptation des Particules Élémentaires de Michel Houellebecq. Dix ans et quatre pièces plus tard, il ne s'est pas assagi avec Extinction, librement adapté de Thomas Bernhard.
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Julien Gosselin, l'enfant terrible du théâtre français, revient sur sa trajectoire : "Il y a dix ans, j'avais besoin de faire quelque chose qui était extrêmement "contre" beaucoup de choses que je voyais. La chose qui me rassure, c'est que progressivement les gens m'agressent de moins en moins avec cette question-là !"
Sur son utilisation de l'image filmée, il explique : "La vidéo, au départ ça a été pour moi une manière de mettre quelque chose à distance. L'image, le film crée du passé, crée la vision des morts. Il y a quelque chose que j'aime autour du dissensus avec le spectateur, je ne fais toujours pas du théâtre pour créer de manière immédiate un consensus disons mou avec le public."
"Un regard sur la destruction du monde"
Quand le public finit par s'asseoir, un spectacle débute, en noir et blanc, sur grand écran, filmé en direct dans un décor dont on ne voit que l'extérieur. Nous sommes à Vienne en 1913, les textes sont puisés dans l'œuvre d'Arthur Schnitzler, soirée mondaine d'une élite érudite, ambiance nihiliste de fin du monde avant la guerre.
La troupe virtuose danse au bord du volcan et le miracle opère. De cette vision d'apocalypse jaillit une force vitale : "Si j'étais véritablement nihiliste, je ne vois pas pourquoi je ferais du théâtre, le théâtre c'est quand même la force de la vie, plaide Julien Gosselin. C'est confronter des grands pessimistes parfois. Un regard sur la destruction du monde, sur sa propre destruction, donc oui, je vais continuer, sans doute - je vais peut-être un jour arrêter - mais je vais sans doute continuer à chercher des Thomas Bernhard partout."
Troisième et dernière partie, seule sur scène, l'Allemande Rosa Lembeck incarne Extinction de Thomas Bernhard, texte d'une violence intime et politique inouïe. Encore une fois, Julien Gosselin offre à une comédienne le meilleur de son théâtre, sous le regard complice de Victoria Quesnel et Carine Goron, piliers de la troupe, rincées par le 2e acte.
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