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Édito
Vie politique : un embouteillage au tribunal dans l'indifférence générale !
Après le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, un deuxième ministre en fonction comparaît au tribunal, Olivier Dussopt en charge du Travail. Et du travail, le gouvernement en donne aux magistrats… Olivier Dussopt est poursuivi pour favoritisme et comparaît, depuis lundi 27 novembre, devant le tribunal correctionnel de Paris. Les faits qui lui sont reprochés, remontent à son mandat de maire d’Annonay, en Ardèche. Éric Dupond-Moretti a comparu devant la Cour de la justice de la République, seule instance à même de juger des ministres pour des faits commis au gouvernement. En l’occurrence, prise illégale d’intérêts. S’ils sont condamnés, ils seraient amenés à quitter leurs fonctions, mais en attendant, on peut déjà noter la régression de nos pratiques démocratiques.
Sous les prédécesseurs d’Emmanuel Macron, les ministres démissionnaient dès leur mise en examen. Désormais, ils ont l’onction du président de la République pour s’accrocher à leur poste jusqu’au bout.
Ils demeurent présumés innocents, c’est juridiquement indéniable. Mais politiquement très risqué pour l’action publique. Un ministre en charge de l’intérêt général peut-il voir sa mission ternie par un procès ? Le jour au tribunal, le soir au gouvernement, ces images jurent avec les pratiques en vigueur chez la plupart de nos voisins, par exemple, en Europe du Nord, où elles seraient inimaginables. Pas plus qu’on n’y verrait le retour en fanfare d’un ancien ministre lourdement condamné à quatre ans de prison dont deux fermes, cinq ans d’inéligibilité et 300 000 euros d’amende pour fraude fiscale, en l'occurrence Jérôme Cahuzac ! Il a purgé sa peine, certes, mais un ministre du Budget fraudeur qui a menti à la représentation nationale a-t-il vraiment droit à une seconde chance en politique ? Au regard de la morale publique, ce come-back est indécent.
Des élus condamnés... puis réélus
La politique est-elle gouvernée par la morale ? Non, et c’est heureux. Si ne se présentaient que des professeurs de vertu, il y aurait moins de candidats. Mais aujourd’hui, un procès, c’est une ligne supplémentaire devenue presque anodine dans le CV d’un élu. Ces jours-ci, l’embouteillage au tribunal n’émeut plus personne: un ex-Président, Nicolas Sarkozy, y est de retour une fois encore, cette fois pour l’affaire Bygmalion. François Bayrou a été jugé pour détournement de fonds publics, en attendant bientôt Marine Le Pen pour la même incrimination… Le tout dans l’indifférence générale. La faute sans doute aux électeurs eux-mêmes qui réélisent parfois des élus condamnés. La jurisprudence Balkany à Levallois-Perret nous rappelle qu’en démocratie, les citoyens n’ont que les élus qu’ils méritent.
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