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Emmanuel Macron, président et candidat : après la disruption, le père de la Nation

Le candidat Macron de 2022 ne ressemblera pas au candidat Macron de 2017 : cette fois, il joue sur la continuité... au risque de l'immobilisme. L'édito politique de Renaud Dély.

Article rédigé par franceinfo - Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Emmanuel Macron en novembre 2021. (GAO JING / XINHUA / MAXPPP)

Emmanuel Macron est donc candidat à un second mandat. Quel est le sens politique de cette candidature ? Continuer. Continuer ce qu’il a été empêché de faire par une succession de crises. Et continuer à protéger les Français de ces périls qui les menacent. Il les cite dès le début de la Lettre aux Français dans laquelle il fait sa déclaration de candidature : guerre en Europe bien sûr, mais aussi pandémie, terrorisme ou encore "retour de la violence". Fini le candidat disrupteur de 2017, celui qui prétendait enterrer "l’ancien monde". Emmanuel Macron endosse le costume traditionnel de père de la Nation, souvent cher aux sortants, surtout en période de troubles.

Une posture qui rappelle fortement celle de François Mitterrand en 1988. Avec, lui aussi, une Lettre aux Français sans aspérités, une candidature tardive – à peine plus d’un mois avant le premier tour – et un slogan "la France unie" qui semble inspirer la prose macroniste. Sans oublier, pour Mitterrand à l’époque comme pour Macron aujourd’hui, un statut de grandissime favori du scrutin.

Le risque politique d'une campagne escamotée

Est-ce-à dire que le candidat Macron ne va pas faire campagne ? Il ne la mènera pas beaucoup. La justification est toute trouvée : la guerre. Le chef de l’Etat y fait allusion à la fin de sa lettre. "Bien sûr, je ne pourrai pas mener campagne comme je l’aurais souhaité en raison du contexte", dit-il. Quand on passe une heure et demie au téléphone avec Poutine tous les trois jours, comme jeudi encore, ça laisse peu de temps pour aller débattre avec Valérie Pécresse... C’est aussi une façon de profiter jusqu’au bout du statut de Président sortant.

Dans son entourage, il y a eu un long débat entre ceux qui préconisaient une campagne audacieuse, avec une vraie prise de risques, et le camp de la prudence. La gravité du moment a tranché. L’heure n’est pas aux immenses meetings festifs. Et dans un monde de plus en plus incertain, les Français en manque de repères ont besoin d’être rassurés plutôt que bousculés…

Le risque pour le candidat Macron, c’est l’immobilisme. Bien sûr, pour l’issue du scrutin d’abord. Rien n’est joué d’avance. Et puis surtout, au-delà. Si la campagne est escamotée, si l’élection se résume à une sorte de validation des acquis, de reconduction inéluctable du sortant, un second mandat du chef de l’Etat pourrait d’emblée souffrir d’un déficit de légitimité. La droite n’est pas encore battue que le président du Sénat, Gérard Larcher, en fait déjà le reproche à Emmanuel Macron. Et c’est le spectre d’une nouvelle crise civique, du type de celle des gilets jaunes, qui ressurgirait. Quand le débat public n’est pas complètement tranché dans les urnes, il a souvent tendance à se déplacer dans la rue.

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